Après "Je ne suis pas un salaud" (2016) le réalisateur Emmanuel Finkiel s'attaque à Marguerite Duras (en savoir plus ICI !) en réalisant et écrivant l'adaptation du roman éponyme de Marguerite Duras. Ce livre a été écrit par la romancière d'après ses cahiers de guerre, rédigés pendant celle-ci, le roman "La Douleur" se focalisant sur 12 mois en 1944-1945. Il s'agit donc d'un livre autobiographique, n'en déplaise d'ailleurs au cinéaste qui semble se complaire à éluder cette problématique : "... Moi je ne connais pas d'écrivain, je connais des gens qui écrivent. Le personnage de l'écrivain est un concept et je voulais d'emblée évacuer la figure de Duras - son récit lui-même me l'autorisait puisqu'on ne peut pas dire que c'est une véritable autobiographie."... D'une mauvaise foi évidente qui lui sert surtout d'excuse pour les libertés dont il a besoin.
Néanmoins, quoi qu'il en dise, "La Douleur" de Marguerite Duras est bel et bien un récit sur son vécu lors d'une période trouble et tragique. Le rôle titre de Marguerite Duras est dévolue à Mélanie Thierry qui était déjà dans le film précédent de Finkiel et qu'on a vu récemment dans l'excellent "Au Revoir Là-Haut" (2017) de et avec Albert Dupontel. A ses côtés on trouvera Benoit Magimel en agent de la gestapo et Benjamin Biolay dans le rôle de son ami et amant Dyonis Mascolo. Emmanuel Bourdieu incarne lui Robert Antelme, époux déporté de Duras. Niveau référence, Emmanuel Finkiel avoue s'être inspiré de "Monsieur Klein" (1972) de Joseph Losey et "Rome, Ville Ouverte" (1946) de Roberto Rosselini ; le premier pour la reconstitution historique notamment sur les costumes, le second pour la scène de prison inspirée par la scène finale de Rosselini. Deux inspirations plutôt bien vues.
On peut être déçu par le traitement des liens humains de Marguerite avec les autres protagonistes. Dyonis est son amant mais ça reste à peine effleuré. Normalement la relation avec l'agent de la Gestapo Rabier est ambigüe, elle est ici claire comme de l'eau de roche. Ensuite c'est l'abus de la voix Off, omniprésente qui ajoute un ton pompeux à l'ensemble, qui alourdit le propos malgré le beau texte de Duras. En effet, un texte lu de façon si "littéraire" associé au ton formel très austère du film accentue très fortement la sensation d'ennuie. Le rythme lancinant et cette austérité d'ensemble empêche toute passion et ce, même si Mélanie Thierry offre une performance remarquable et reste touchante. Emmanuel Finkiel se regarde beaucoup trop filmer, il y a un côté snob dans sa mise en scène, il signe un film trop intellectualisé formellement tout en oubliant que le fond a besoin de passion et de chair. Au final, 02h10 qui en paraissent le double, dommage pour un livre qui méritait un souffle plus palpable à l'image que cette errance vocale et littéraire.
Note :