De Jean Libon, Yves Hinant
Chronique : Ni juge, ni soumise, déclinaison cinématographique de l’émission culte StripTease, se révèle être une immersion assez fascinante au cœur de la justice belge. Mais si le documentaire est aussi saisissant, c’est qu’il suit un personnage fantasque, surprenant et séduisant, au verbe haut et à la répartie imparable.
Sans filtre, ni tabou, la juge Anne Gruwez est un petit bout de femme hors norme qu’on ne penserait rencontrer que dans univers fictionnel. Mais ici tout est vrai. On la suit déterrant (au sens propre comme au figuré), une histoire de meurtre vieille de 20 ans qui sera le fil rouge du film. En parallèle, le quotidien. Des histoires de mœurs, de violences conjugales, des petits larcins aux crimes les plus abominables (le regard d’une mère infanticide crée un malaise palpable et foncièrement dérangeant dans les derniers instants du film), la juge s’en sort toujours par une pirouette ou un bon mot à l’humour très noir. Le cocasse se dispute en permanence au sordide.
Mais plus on avance dans le reportage plus on comprend que ce bagout et cette attitude parfois désinvolte face à l’horreur qu’elle côtoie constitue pour la juge Gruwez une armure indispensable. Il faut bien toute la hauteur et la distance qu’elle manifeste pour trouver la force d’y revenir chaque jour.
Certes, Ni juge ni soumise est souvent drôle, on rit, mais souvent d’un rire gêné, parfois aux dépens des prévenus, parfois même de la justice belge elle-même. Un rire embarrassé, de ces rires qui permettent d’échapper à la tension de scènes surréalistes et dérangeantes. Le rire et l’humour pour faire face à la misère et la violence du monde. Un rire qu’on ne voudrait pas condescendant, mais qui l’est un peu malgré nous, c’est la petite limite du film. Son atout majuscule est bien ce personnage inimitable qu’est la juge Gruwez.
Synopsis : Ni Juge ni soumise est le premier long-métrage StripTease, émission culte de la télévision belge. Pendant 3 ans les réalisateurs ont suivi à Bruxelles la juge Anne Gruwez au cours d’enquêtes criminelles, d’auditions, de visites de scènes de crime. Ce n’est pas du cinéma, c’est pire.