En plein mois d’août à Madrid, José, sans travail, est envoyé par l’Agence pour l’Emploi comme figurant sur le tournage de l’émission télévisée Spéciale Nouvel An. Des centaines de personnes comme lui vont passer une dizaine de jours enfermés jour et nuit, transpirant abondamment, à faire semblant de rire, à applaudir sans cesse des numéros qu’ils ne voient même pas et célébrer bêtement la fausse arrivée de la nouvelle année. Alphonso, la vedette de la soirée, est capable de tout pour s’assurer la meilleure audience .
Mi Gran Noche – 23 Octobre 2015 - Réalisé par Alex de la Iglesias
José, sans emploi, reçoit un sms qui l'envoie pour aller travailler comme figurant lors du tournage d'une émission « spéciale nouvel an » ! Pourquoi lui ? Parce que son prédécesseur s'est fait écraser par une caméra en plein tournage. Le voilà donc prêt à aller faire la fête, munis de son plus beau costume, ce qui laisse perplexe les personnes qu'il croise dans le métro, car oui en plein mois d’août ce n'est pas commun ! Une fois au studio, il rentre dans un univers chaotique, la fête bat son plein, les figurants s'enlacent, s'embrassent et bien plus. Les présentateurs se déchirent, le jeune éphèbe à la mode est la cible de chantage et la vieille gloire est aussi sympathique que le plus célèbre des seigneurs Sith. Un cocktail explosif auquel le stoïque José prend part …
C'est un film que j'ai longtemps attendu, d'abord en salles, puis en vod, puis en téléchargement illégal avant de penser par dépit à me rabattre sur un blu-ray ou un dvd en import, bref les 4 étapes logiques lorsque que vous attendez un film qui ne sortira jamais chez vous ! Et c'est donc plus de deux ans après sa sortie en Espagne que j'ai pu enfin le découvrir sur « Netflix » !
« Mi Gran Noche » m'a fait passer un agréable moment ! C'était un peu comme revenir dans le passé, à une époque ou les émissions de variétés étaient légions, ou l'on voyait les « vedettes » de l'époque, avec son lot de strass et de paillettes. Une industrie du faux et du divertissement qui à évoluer avec son temps et parfois pas de la meilleure des façons. Elle a ainsi pris de nouveaux traits, celui de la télé-réalité omniprésente, ou encore ceux des animateurs stars qui font clairement ce qu'ils souhaitent. Et cette plongée dans l'envers du décors tel que nous le présente Alex de la Iglesias est jubilatoire de bout en bout, parce qu'il pose un regard à la fois tendre et féroce sur ce milieu spécial !
Pour ce film, Alex de la Iglesias retrouve son plus fidèle compagnon, le scénariste Jorge Guerricaechevarria. Pour leurs onzièmes collaborations ils s'en prennent au monde de la TV et font ça avec un grand plaisir. Le scénario s'articule autour de plusieurs storylines, avec comme fil rouge le tournage de cette émission, un tournage qui sert aussi bien de fil rouge que de tempo. Et c'est sur ce rythme, imprévisible et chaotique que l'intrigue s'agence, avec suffisamment d'intelligence pour que chaque histoires et personnages ne soit pas délaissés, tout en tendant vers l'objectif final, la fin de l'émission.
Le scénario ne se contente pas de faire en sorte que l'on s'y retrouve, il parle aussi sans détour et avec un sens de l'exagération propre à De la Iglesias du monde de la TV et on oscille entre dégoût et bienveillance. Un monde ou les rapports humains sont aussi factice que les décors qui les entourent, le personnage de José en est le parfait témoin, timide et maladroit au milieu d'une table qui a passé sa journée à rire quand on lui dit, à coucher avec son voisin parce que c'est la fête. Puis les innombrables célébrités sont imbuvables, désagréables, voire carrément en dehors de la réalité et les coups les plus bas sont légion pour arriver à sa fin. Un panier de crabe abject qui n'a que faire de ce qu'il se passe en dehors du studio (grève) tant que le spectacle continuera ! Et c'est là que se situe toute l'ambivalence de ce milieu, car si betes soient ils, ils ne vivent que pour cet instant ou ils passent devant la caméra …
Ce qui m'a fasciné ici dans la réalisation de Alex de la Iglesias, c'est cette capacité à suivre l'action constamment, avec fluidité, souvent a la caméra porté, c'est simple l'action on ne la suit pas, on la vit littéralement. Malgré la multitude de personnages à suivre, on ne s'ennuie jamais et le réalisateur sait quand il faut passer de l'un à l'autre pour marquer une pause ou maintenir le tempo frénétique qu'impose cette émission en presque temps réel. Ce qui n’empêche pas le film d’être vraiment très beau, la photographie de Angel Amoros souligne toute la démesure de ce que l'on voit à l'écran, et le travail de la direction artistique, auquel il faut ajouter le boulot de Paola Torres aux costumes, le tout combiné fait que l'on assiste à un show dans le show particulièrement sublime !
Le casting quant à lui réunit un peu la fine fleur du cinéma espagnol et ils savent faire le show. Bon certains sortent un peu plus du lot, je pense à Jaime Ordonez qui campe un fan légèrement extrême, avec intensité, rage et avec une sensibilité qui touche ; Mario Casas dans le rôle de Adanne, un pot pourri de chanteur estampillé « boys band » absolument hilarant, ou encore le duo qui se forme entre Pepon Nieto et Blanca Suarez. Puis comment ne pas cité feu « Terele Paves » inoubliable alors qu'elle n'a que cinq minutes de présence à l'écran …
Venez célébrez "Mi Gran Noche" !