Personne n’aime le changement. Nous réglons nos vies une fois pour toute. Nous aimons ce qui nous est familier. Et nous en faisons une soi-disant zone de confort.
Et pourtant, tout autour de nous, comme une injonction, appelle de ses vœux que nous changions. Souvent, cet appel ne ferait que rajouter de la banalité à notre quotidien et le changement presque exigé ne servirait en fait pas à grand chose.
Alors, l’habitude nous a comme donné une certaine résistance à tous ces appels qui nous incitent à changer. Dans un certain sens, cette résistance est bénéfique parce qu’autrement, certaines personnalités plus fortes que d’autres pourraient nous faire rouler comme des dés et nous ne saurions plus quelle face présenter au monde.
Un personnage fictif fait exactement la même chose. Il n’aime pas changer. Il résiste au changement. Il a peut-être conscience que les choses ne sont pas idéales dans sa vie mais il n’a pas trouvé de meilleure solution que celle qui a abouti à sa vie actuelle. Alors pourquoi céder au changement ?
Un être humain conforme à sa nature
La nature humaine réelle ou fictive n’aime pas le changement. Et plus les choses (dans la vie réelle) ou l’auteur d’un personnage poussent cet individu dans ses retranchements pour qu’il accepte le changement, et plus l’individu ou le personnage fictif résisteront.
Il est certain qu’il freinera des deux pieds. Afin que le changement soit possible (il faut bien que l’histoire avance), le personnage doit se convaincre (généralement par les circonstances) que sa façon de faire les choses pour le moment présent n’est pas la bonne.
Après l’incident déclencheur (l’événement qui initie l’intrigue), le personnage principal montrera quelques réticences à cet appel à l’aventure. Somme toute, ce moment lui propose de pénétrer et de faire son chemin à travers un monde dont ce personnage principal ignore tout.
Vers la fin de l’acte Un, cependant, le héros prendra conscience (c’est une première révélation) qu’il faut qu’il participe à cette aventure. Par exemple, dans Le Verdict, Frank n’accepte de défendre cette jeune fille dans le coma qu’à partir du moment où il lui rend visite à l’hôpital.
Cette scène fait soudain prendre conscience à Frank que non seulement justice doit être rendue à cette pauvre victime mais il y voit aussi pour lui une forme de rédemption. C’est à ce moment précis qu’il accepte de prendre en charge son problème. Et l’intrigue peut débuter.
Classiquement, le personnage principal n’échappe pas au changement
Il ne peut pas se le permettre. Il faut qu’il change (c’est l’option retenue dans la plupart des cas, mais ce n’est nullement une obligation).
En fait, nos personnages, tout comme nous, résisteront jusqu’à ce que le coût de maintenir le statut quo de leurs vies devient trop pesant. Un personnage ne changera pas tant que sa vie ordinaire ne le blesse pas.
Votre personnage ne changera pas de lui-même. Il faut qu’il souffre dans son quotidien pour que cette décision lui apparaissent comme évidente. Frank Galvin souffrait de ressentir et dans sa chair et dans son âme ce que ce quotidien avait fait de lui. Devant cette jeune femme en détresse, c’est la pleine conscience de sa souffrance à lui qui remonte de l’obscurité où elle se terrait.
Les épreuves et obstacles qui l’attendent dans le cours de l’intrigue lui permettront alors de nommer cette douleur. Les enjeux pour le personnage principal seront bien établis afin que le lecteur comprenne la nécessité du changement. Vous n’avez pas arbitrairement à décider pour votre personnage cette décision. Les circonstances l’amèneront de lui-même à considérer le changement.
Le personnage sera amené progressivement à envisager comment les choses seraient autrement. Et c’est précisément à cet endroit que vous devez emmener votre personnage. Lorsqu’il comprendra quel est le problème (ou plutôt cette faiblesse dans sa personnalité, ce mensonge qu’il se faisait à lui-même) qui le retenait d’avancer dans sa vie.
Ce sera son moment de vérité. Ce sera sa chance pour une rédemption. Et pour rester dans ce ton, vous allez créer pour lui un véritable chemin de croix qu’on appelle l’intrigue.