Avec Agnès Jaoui, Jean-Pierre Bacri, Léa Drucker
Chronique : Après un détour par la fable moderne (le joli Au bout du conte en 2013), c’est un retour cynique et désabusé à la comédie humaine qu’opère le duo Bacri-Jaoui.
Certes, ils naviguent clairement dans leur zone de confort, le film chorale grinçant, très écrit et aux ressorts aujourd’hui un peu éculés. Mais les dialogues sont toujours d’une redoutable efficacité pour peu qu’on ne soit pas lassés par les petitesses de leurs personnages, des personnages bien dessinés et ancrés dans une réalité parisianno-bourgeoise dont les auteurs peuvent à loisir pointer du doigt les contradictions, l’égoïsme et la vanité.
On ne parlera donc pas de renouveau ni de renouvellement pour les Bacri-Jaoui, mais on notera que Place Publique se distingue des précédents films du duo par une noirceur inédite et un état des lieux sombre et peu avenant de la société actuelle. Un constat crépusculaire qui engendre plus des rires crispés et malaisés qu’une franche hilarité. Si leurs thèmes de prédilections sont bien présents, le poids du regard des autres, le culte de l’image et du plaire à tout prix, les affres de la réussite, c’est surtout l’effroi de la vieillesse, l’amertume du temps qui passe et les regrets des occasions ratées qui cadence un film peu amène sur le monde actuel.
Jaoui et Bacri font du Jaoui Bacri (mais on aime bien, avouons-le), tout en s’entourant de nouveaux venus dans leurs univers, tous parfaitement à l’aise, en particulier une savoureuse Léa Drucker, comme un poisson dans l’eau.
La mise en scène joue habilement sur les affrontements et évitements entre personnages, démontrant tout le savoir-faire d’Agnes Jaoui pour les films chorale. Mais la réalisatrice aurait pu avoir la main moins lourde sur les musiques et les chansons, omniprésentes et éreintantes.
Place publique? comédie acide et crépusculaire, ne révolutionnera sans doute pas la filmographie du couple Bacri-Jaoui, mais il la marquera peut-être comme la fin d’une ère.
Synopsis : Castro, autrefois star du petit écran, est à présent un animateur sur le déclin. Aujourd’hui, son chauffeur, Manu, le conduit à la pendaison de crémaillère de sa productrice et amie de longue date, Nathalie, qui a emménagé dans une belle maison près de Paris. Hélène, sœur de Nathalie et ex-femme de Castro, est elle aussi invitée. Quand ils étaient jeunes, ils partageaient les mêmes idéaux mais le succès a converti Castro au pragmatisme (ou plutôt au cynisme) tandis qu’Hélène est restée fidèle à ses convictions.
Leur fille, Nina, qui a écrit un livre librement inspiré de la vie de ses parents, se joint à eux.
Alors que Castro assiste, impuissant, à la chute inexorable de son audimat, Hélène tente désespérément d’imposer dans son émission une réfugiée afghane. Pendant ce temps, la fête bat son plein…