Le 11 juillet prochain, le film qui a fait exploser le talent de Bong Joon Ho sur la scène cinéma international sort en vidéo dans une superbe édition. Il fallait au moins ça pour fêter les 15 ans de Memories of Murder et c’est l’occasion de se pencher dessus dans le culte du dimanche !
2003 est une année charnière pour le cinéma coréen. En effet, cette année là, le talent d’une nouvelle vague de réalisateurs explose dans les différents festivals internationaux. Alors que Park Chan-wook frappe la croisette à coups de marteau avec Old Boy, Kim Jee-Woom fait frissoner Gerardmer avec Deux Soeurs (et nous accrochera à notre fauteuil avec J’ai Rencontré le Diable quelques années plus tard). C’est dans cette vague qu’oeuvre Bong Joon Ho qui, la même année, nous plongera dans l’enfer de Memories of Murder.
Basée sur l’histoire réèle d’une vague de meurtres qui a eu lieu dans la campagne coréenne en 1986, il nous entraîne donc dans l’enquête qui est lancée. Deux inspecteurs que tout oppose (l’un étant du coin, campagnard un peu rustre, l’autre dépéché de la capitale, sur de lui et de ses méthodes) vont donc devoir collaboter pour piéger ce tueur en série. Ils vont alors plonger dans une enquête de plus en plus glauque qui va aussi changer leur regard sur leur vie.
Bienvenue en enfer !
Dès la découverte du premier corps, Bong Joon Ho plante le décor. Le film ne sera pas une balade de santé et le réalisateur ne prendra pas de pincette. Le polar est d’emblée marqué d’images violente avec un corps mutilé. L’enquête est intense, pluvieuse, avec des images glauques et les frissons vont avec. Mais il n’hésite cependant pas à pousser d’autres curseurs pour bien montrer parfois l’absurdité de certaines méthodes ou le décalage entre les équipes. Ainsi, on ne peut pas s’empêcher de sourire quand l’un des enquêteurs se dit que l’homme recherché est glabre et qu’il va faire le tour des saunas du coin pour le coincer.
Mais ce ne sont là que des moyens de désamorcer l’horreur dans laquelle vont plonger nos deux inspecteurs. Car plus ils plongent dans les meurtres plus ils y découvrent des éléments glauques, en particulier ce que le violeur va cacher dans le vagin de ces femmes. Cela rend le film parfois vraiment difficile à regarder. Le réalisateur va aussi y glisser une pointe de tristesse poétique qui va rendre le meurtrier pathétique avec une musique jouée à chaque fois qu’il pleut et va l’amener à tuer à nouveau.
Les larmes du tueur
Une pluie qui devient d’ailleurs un élément essentiel à l’atmosphère du film. Car Bong Joon Ho maîtrise son image à la perfection. Certainement influencé par le Se7en de Fincher, il nous entraîne à la recherche d’un diable et réuni les indices dans des décors qui nous mettent toujours plus mal à l’aise comme ce bureau de police dont on semble parfois prisonnier.
Et ainsi, dans cette enquête qui ne trouvera aucune résolution, les deux inspecteurs vont radicalement changer. Alors que le citadin cartésien va finir par laisser exploser sa rage qui était contenue, le campagnard va quand à lui laisser de côté sa beauferie pour gagner en sensibilité. Et cet aspect est aussi un signe pour la société coréene en pleine mutation pour laquelle la fin reste d’ailleurs ouverte.
Avec une maitrise de la caméra impeccable, comme l’illustre le plan séquence lors de l’établissement du premier périmètre de la sécurité, Bong Joon Ho nous offre donc un formusable thriller qui balaye beaucoup d’incertitudes. Il devient alors lui aussi l’un des chefs de file de cette nouvelle vague de réalisateurs. Ce qu’il va confirmer ensuite avec le succès de the Host et son ouverture internationale sur Snowpiercer et Okja.
Un superbe coffret collector
C’est donc l’éditeur La Rabbia qui offre aujourd’hui ce superbe coffret collector pour apprécier le film dans les meilleures conditions. Car avec la superbe édition restaurée du bluray est également proposée toute une série de bonus. Tout d’abord un nouveau documentaire d’une heure où le réalisateur et ses collaborateurs reviennent sur l’histoire du film avec tout le recul 15 ans après. Il se rendent alors compte de ce qu’il ont réalisé. Et il en est de même avec l’interview d’un quart d’heure sur le son du film.
Les autres bonus seront plus d’époques mais tout aussi intéressant avec le making of original de 17 minutes, une interview du compositeur, 7 scènes coupées et commentées par les réalisateurs et des featurettes sur les décors, costumes et effets spéciaux. Tout cela sans oublier le film et la reproduction du storyboard. 366 pages de découvertes passionnantes sur le film, à la hauteur de son impact.