Les années 80 ne sont pas connues pour être une décennie à western, et encore moins du western spaghetti et pourtant "Scalps" est un ersatz du genre, un film qui survit au genre signé par deux compères peu connu bien que Bruno Mattéi soit particulièrement suivi pour sa filmo foisonnante en nanards comme "KZ9 - Camp d'extermination" (1977) et "Les Rats de Manhattan" (1984). Fragasso et Mattéi ont déjà travaillé ensemble sur de l'épouvante avec "L'Autre Enfer" (1980) et sur un autre survival avec le peplum "Les Sept Gladiateurs" (1983) et déjà un western avec le encore moins connu "White Apache" (1986). Mattéi co-signe le scénario avec d'autres scénaristes plus ou moins confidentiels, à l'image du casting par ailleurs, composé d'acteurs/actrices qui trouve avec ce film le moyen d'atteindre le haut de l'affiche pour la première et dernière fois de leur carrière.
On notera surtout le méchant incarné par un vétéran, Alberto Farnese vu au début de sa carrière dans "L'Or de Naples" (1955) de Vittorio De Sica avant d'écumer près de trente années de cinéma bis italien avec "Le Gladiateur de Rome" (1962) de Mario Costaou encore "Les Vengeurs de l'Ave Maria" (1970) de Bitto Albertini. On reconnait aussi Carlos Bravo aperçu dans "Les 100 Fusils" (1969) de Tom Gries, on croise la très belle Lola Forner Miss Espagne 1977, Miss Monde 1979 et Miss Europe 1980 surtout connue pour avoir jouer avec Jackie Chan dans "Soif de Justice" (1984) et "Mister Dynamite" (1986). Enfin, les deux premiers rôles sont joués par Vassili Karis vu par exemple dans "Le Retour de Sabata" (1971) de Gianfranco Parolini et surtout, la sublime Mapi Galan future Lune dans "La Cité des Enfants Perdus" (1993) de Jean-Pierre Jeunet et Marc Caro. Pour l'anecdote, ne pas confondre le film avec l'éponyme "Scalps" (1983) de Fred Olen Ray, un film d'horreur sur un esprit amérindien vengeur... Le duo Fragasso-Mattéi ne s'était pas encore attellé au western, les bons succès (1985) de et avec Clint Eastwood et "Silverado" (1985) de Lawrence Kasdan y sont assurément pour quelque chose. Mais au vu du film c'est surtout "Le Soldat Bleu" (1970) de Ralph Nelson qui a dû inspiré les deux cinéastes, arrangé évidemment à la sauce spaghetti. Quelques temps après la fin de la Guerre de Sécession, on suit donc une indienne qui, après le massacre de sa tribu et sa fuite, doit survivre alors qu'elle est poursuivi par des soldats sudistes renégats... Les premières minutes font craindre le pire avec un colonel façon nazi nostalgique (on pense là beaucoup à "Rio Conchos" en 1964 de Gordon Douglas) qui déblatère un discours insipide au vocabulaire ordurier complètement anachronique. Heureusement, cette scène est vite oubliée et le récit ne tarde pas à prendre son envol après un massacre de tribu indienne particulièrement féroce et musclé. Les soldats enlèvent la squaw pour leur colonel mais celle-ci va prouver qu'elle a de la ressource. Niveau violence, si on n'est pas clairement dans le gore les deux cinéastes n'hésitent pas à placer ici et là quelques séquences qui marquent. Le scalp aura été rarement montré ainsi !...
Dans l'action et la violence le film est efficace et maitrisé, à l'exception d'une scène de torture à la fin qui reste maladroite, d'abord parce que la victime s'en sort un peu trop bien et ensuite à cause d'un effet maquillage plutôt laid (alors que les scalps sont réussis). La dernière scène se veut dans la grande lignée du lyrisme spaghetti avec un duel inédit auquel il aurait fallu un peu moins de théâtralité. On reste aussi un peu perplexe par l'héroîne qui se transforme en guerrière dès qu'elle trouve son arc (où et comment ?!) alors même qu'elle semblait surtout avoir besoin du cowboy. Comme le disait Howard Hawks pour justifier (1959) contre "Le Train Sifflera trois Fois" (1952) de Fred Zinneman : pourquoi chercher à avoir de l'aide si on peut se débrouiller seul ?!... Un western spaghetti qui oscille de la grâce (rare) et efficacité (beaucoup) à la caricature (beaucoup) et au surjeu (trop surtout la fin) mais qui reste une belle surprise pour un Mattéi aux commandes. Que ce soit Fragasso ou Mattéi, "Scalps" est sans aucun doute leur meilleur film avec en prime une musique discrète mais omniprésente, entre classique de la Sécession et sonorité à la Morricone, une BO signée Luigi Ceccarelli qui lui aussi signe sa partition ultime aux côtés des autres films qu'il a tourné en majorité avec le duo Fragasso-Mattéi. En conclusion, un western pas déplaisant, avec un scénario solide qui donne surtout envie de l'imaginer avec Corbucci voir Leone à la mise en scène.
Note :