Le Grand Blond avec une Chaussure Noire (1972) de Yves Robert

Par Seleniecinema @SelenieCinema

Le réalisateur Yves Robert, qui a commencé à se faire un nom avec "Ni Vu Ni Connu" (1958) et "La Guerre des Boutons" (1962), a eu l'idée de cette histoire car il était passionné par "ces professionnels du mensonge que sont les agents secrets". Il s'est surtout inspiré du roman autobiographique particulièrement rocambolesque "La Cinquième Corde" (1971) du violoniste Igal Shamir. Soutenu par le producteur Alain poiré de chez Gaumont, Yves Robert rencontre de vrais espions et propose à Jean-Loup Dabadie d'écrire le scénario mais celui-ci refuse et lui souffle le nom de Francis Veber alors un scénariste à succès. On doit à ce dernier le nom de François Perrin, puis plus tard de François Pignon et qui signera son premier long métrage en tant que réalisateur avec "Le Jouet" (1976) avec un certain Pierre Richard. Yves Robert a dû imposer justement Pierre Richard pour le rôle titre, le cinéaste ayant déjà fait tourner Pierre Richard dans "Alexandre le Bienheureux" (1967) et produit son premier succès personnel avec le film "Le Distrait" (1970) de et avec Pierre Richard donc.

Au casting Pierre Richard et Yves Robert retrouve également Jean Carmet (5ème film sur 10 avec Yves Robert !), Paul Le Person et Jean Saudray déjà au générique de "Alexandre...". Outre ces derniers on reconnait quelques grands seconds rôles avec Maurice Barrier, Jean Obé, Robert Castel et Robert Dalban. Autour de Pierre Richard, les autres personnages principaux sont incarnés par Jean Rochefort qui, après quelques années abonnés aux seconds rôles prendra une autre dimension avec le succès du dyptique "Un Eléphant ça Trompe Enormément" (1976) et "Nous Irons Tous au Paradis" (1977) de Yves Robert. Le concurrent de Rochefort est joué par le monstre sacré Bernard Blier qui retrouve pour l'occasion Mireille Darc après le débuts de la belle dans "Les Barbouzes" (1964) de Georges Lautner... On plonge donc dans une guerre secrète et fratricide au sommet des services d'espionnage français où un adjoint complote contre son directeur d'agence. Un jeu de dupes s'instaure où un grand blond avec une chaussure noire va s'avérer être un "piège à cons" - Veber renvoie ainsi sans le savoir à son futur chef d'oeuvre "Diner de Cons" (1998)... Pierre Richard incarne un violoniste distrait et maladroit, ingénu et manipulé dans un jeu d'espions qui le dépasse et surtout dont il ne voit rien.

Le scénario oscille entre les coulisses et le jeu des secrets entre les deux pontes d'une service d'espionnage puis le quotidien du violoniste pantin à son insu des espions et d'une espionne en particulier. Cette espionne est évidemment incarnée par Mireille Darc dont la robe décolletée sur le haut des fesses (Pierre Richard n'avait pas été prévenu afin de garder l'effet de surprise !) est définitivement devenue culte. Mais outre le côté "bienheureux" du héros le face à face savoureux entre Rochefort et Blier est également une réussite, grâce notamment à leurs sbires respectifs dont le flegme Paul Le Person dont les réactions en disent long sur la bêtise de cette lutte intestine. Si le rythme n'est pas particulièrement nerveux l'action et réaction restent sur un tempo régulier. Plusieurs séquences sont devenues cultes, l'osmose entre les acteurs et des personnages bien croqués offrent une comédie d'espionnage drôle qui a connu un succès international. En effet, outre ses 3,5 millions d'entrées France le film est multiprimé dont un Ours d'Argent au festival de Berlin. Le film connait également un remake américain avec "L'Homme à la Chaussure Rouge" (1985) de Stan Dragoti avec Tom Hanks. Le succès ouvre aussi la voie à une suite, ce sera "Le Retour du Grand Blond" (1974).

Note :