Un grand merci à La Rabbia pour m’avoir permis de découvrir et de chroniquer le DVD du film « Kids return » de Takeshi Kitano.
« On ne vous demande même pas d’être bons. Juste de ne pas embêter les autres »
Masaru et Shinji n’aiment pas le lycée. Ils préfèrent traîner dans les bars, voler et glander. Mais un jour, après avoir été pris à partie, deux ados reviennent accompagnés d’un ami boxeur qui met Masaru K.O. Il décide alors de se mettre au Noble Art. Rapidement suivi par Shinji, lequel va se révéler bien meilleur boxeur. Dépité, Masaru va tenter sa chance du côté de la pègre locale.
« Ces deux idiots sont irrécupérables... »
Ex-trublion de la télévision où il s’imposa comme l’un des humoristes les plus populaires du Japon, Takeshi Kitano entame dès les années 80 une carrière d’acteur au cinéma en enchainant les seconds rôles. Sa carrière prend cependant une autre dimension en 1989 lorsqu’à la suite d’un concours de circonstance, il se voit proposer de réaliser son premier film, « Violent cop », qui rencontrera un très grand succès populaire au Japon. Mais le public occidental ne le découvrira toutefois qu’en 1993 avec le très nihiliste « Sonatine » qui, en dépit d’une exposition assez confidentielle dans les salles européennes et américaines, sera présenté dans de nombreux festivals. Sorti en 1996, « Kids return » marque un véritable tournant dans la carrière du cinéaste, annonçant les années fastes à venir avec notamment les succès de « Hana-Bi » (1997, récompensé du Lion d’or à la Mostra de Venise) et « L’été de Kikujiro » (1999), qui demeurent à ce jour ses films les plus aboutis.
« Quand tu seras un champion et moi un caïd, on se retrouvera »
Avec « Kids return », Kitano se met en retrait derrière la caméra (il n’est ici que réalisateur) et signe une formidable chronique sur la jeunesse japonaise. Construit autour d’un savant jeu de miroirs, le film suit le destin de deux amis depuis leur dernière année au lycée où à force de faire les quatre cent coups ils se retrouvent en voie de déscolarisation et à flirter avec la petite délinquance, jusqu’à leurs premiers pas dans le monde des hommes, dans lequel ils rentrent pas ses franges marginales (l’un intègre un gang de yakuzas, l’autre tente de faire une carrière dans la boxe). Mais comme toujours, Kitano porte un regard mélancolique et résigné sur la société japonaise, rythmée par un infernal « métro-boulot-dodo » dans lequel les individus n’ont d’autres choix que de devenir de dociles travailleurs corvéables à merci, laissant bien peu de place (et d’espoir) pour les rêveurs. Dès lors, la marginalité apparait comme un ultime échappatoire. Mais même là, à force de dilettantisme et de mauvais choix, les deux héros finiront par échouer en pleine ascension. Comme si au fond, ils étaient rattrapés par une société encore plus dure (et à laquelle on n’échappe pas) que les univers marginaux pourtant violents dans lesquels ils évoluaient. Kitano signe là une chronique mélancolique de haute-volée sur la fin des illusions. Son « Il était une fois en Amérique » à lui en quelque sorte. Et toute proportion gardée, bien entendu.
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Le DVD : Le film est présenté en version restaurée, en version originale japonaise (2.0) ainsi qu’en version française (2.0). Des sous-titres français sont également disponibles.
Côté bonus, le film est accompagné d’un Making of (21 min.) et d’une Bande-annonce version restaurée.