Nuri Bilge Ceylan, un des chouchous cannois du moment, revient avec UN nouveau film fleuve de 3h10.Déjà Palmé avec « Winter sleep » en 2014 et auréolé du Grand Prix en 2011 avec « Il était une fois en Anatolie ». Le réalisateur est un lettré et sa filmographie en témoigne avec une écriture opulente et précise. Lecteur de Tchekhov et Dostoievski, ses films sont jalonnés de tunnels bavards s’étirant à l’infini. Les échanges dans ce film comme dans le très dense « Winter sleep » sont d’une intelligence fine ; et c’est le même reproche qui en découle, Ceylan fait-il du cinéma ou de la littérature ? Mais que son questionnement sur la filiation et l’hérédité est riche. Sinan, son personnage principal, a un égo surdimensionné et une assurance sans faille. Pour construire ce personnage Ceylan structure son film comme un road movie durant lequel différentes figures locales et familiales vont s’opposer à Sinan dans des dialogues amples. Ce procédé est empreint de lourdeur sur la durée et contraste avec la finesse des dialogues. Mais l’opposition la plus franche à laquelle il se confronte, au délà des joutes verbales stériles auxquelles il se livre, est celle qui l’oppose à son père. Jusqu’à un épilogue renversant durant lequel Sinan prend une leçon de vie. Final durant lequel Ceylan boucle sa démonstration avec force : la construction de Sinan en tant qu’adulte doit se conjuguer avec son héritage ; même si on réprouve souvent les traits de caractère de ses parents, on les reproduit tout de même malgré soit. Mais pour en arriver là, il faut en passer par un effort d’attention important. A voir, mais sous la forme de deux films de 1h30 afin d’éviter l’épuisement.
Sorti en 2018
Ma note: 11/20