Critiques Express : les Frères Sisters, Whitney, un Peuple et son Roi

Par Fredp @FredMyscreens

Et voici une nouvelle session de films qu’on n’a pas forcément le temps de chroniquer mais qui valaient tout de même bien le coup d’oeil. Au menu de ce mois de septembre : les Frères Sisters de Jacques Audiard, Whitney de Kevin McDonald et Un Peuple et son Roi.

Les Frères Sisters

Après la Palme d’Or pour Dheepan il y a 3 ans, que reste-t-il à accomplir pour le plus talentueux des réalisateurs français contemporains ? Un film anglophone bien sûr. Et quitte à y aller, autant aller directement sur les terres symboliques du cinéma américain, le western. C’est ainsi que Jacques Audiard se lance dans l’adaptation des Frères Sisters de Patrick DeWitt.
On y suit donc les frères Eli et Charlie Sisters (John C Reilly et Joaquin Phoenix), tueurs à gages engagés pour récupérer la formule du chimiste Hermann Warm (Riz Ahmed) qui permet de récupérer plus facilement l’or dans les rivières et tuer celui-ci à l’aide de John Morris (Jake Gyllenhaal).

Autant le dire tout de suite, le réalisateur français se montre particulièrement à l’aise dans ce western et ce n’est pas si étonnant au regard de sa filmographie. Grand paysages, nombreuses scènes de nuit et personnages troubles, voilà ce qui va nous guider, avec finalement assez peu de fusillades et surtout des dialogues pour nous permettre de complrendre la sauvegerie de l’époque, mais surtout comment petit à petit les différents personnages vont gagner en humanité, quittant les ombres pour rejoindre la lumière bien plus reposante pour l’esprit. Avec un quatuor impeccable, il nous emmène dans ce voyage intimiste en redoublant notre intérêt à chaque seconde qui passe.

Whitney

En 2012, Kevin MacDonald proposait l’un des documentaires musicaux les plus aboutis sur Bob Marley. Cette année il revient au genre en s’intéressant au destin tragique de Whitney Houston. Evidemment, la comparaison sera rapidement faite avec l’autre documentaire sur la star, Can I be me sorti récemment sur Netflix, mais ils sont en fait plutôt complémentaires.

Si celui de Netflix s’intéresse au succès et à la chute de la star, montrant bien son impact sur la musique et son contexte social tout en montrant clairement que Bobby Brown n’est pas si fautif que ça, celui de Kevin McDonald va plus loin sur le côté intime pour montrer à quel point Whitney Houston était perdue depuis son plus jeune âge.

Evidemment, on a rapidement droit à la partie glorieuse de la star à la voix d’or et qui a mine de rien fait avancer la cause afro-américaine (rien que son rôle principal de Bodyguard est une avancée énorme à Hollywood). Mais c’est surtout le portrait intimiste qui en est dressé par ses proches, tout en retenue et sobriété qui retient l’attention, sa mère, son ex-mari Bobby Brown, sa cousine … cela nous permet de comprendre l’enfance pas si idyllique qu’elle a pu avoir et donc les raisons de son addiction à la drogue.

Mais ce qui met en rage, c’est surtout le fait que personne n’a rien fait pour l’en sortir, préférant vivre sur son dos jusqu’à l’épuisement de la voix d’or. Passionnant de bout en bout, avec son lot de révélations mais aussi un grand respect pour la star, Whitney est un documentaire qui vaut le coup d’oeil pour comprendre comment peut être gâché le talent de nombreux artistes.

Un Peuple et son Roi

Depuis le succès de L’Exercice de l’Etat, Pierre Schoeller était en train de monter un projet particulièrement ambitieux. Un grand diptyque sur la Révolution Française. Peut-être trop ambitieux pour la production ciné française actuelle qui reste frileuse dès qu’il s’agit de films en costume, d’autant plus quand ils ont une portée politique. C’est donc avec seulement la moitié de son histoire que le réalisateur arrive au cinéma.

Un Peuple et son Roi commence donc juste après la prise de la Bastille et se déroule jusqu’à mort de Louis XVI à la guillotine. De quoi raconter donc les heures à la fois épique et sombre du soulèvement de la population française contre un roi qui les affame, alors que d’autres veulent garder tous leurs privilèges et redoutent un nouveau despote.

Malheureusement, malgré toute l’ambition de l’auteur et le casting incroyable rassemblé pour l’occasion, le film ne sera jamais à la hauteur de son sujet. Un Peuple et son Roi souffre d’une narration en vignettes qui pose peu de contexte et rend ses personnages assez fades tout en étant enfermés avec une réalisation bloquée sur des gros plans ou des décors ne dépassant pas les 3 mètres carrés. C’est dommage car il y a à côté de ça quelques superbes scènes (comme celle des Tuileries) et surtout une réflexion toujours aussi actuelle sur le rapport entre ceux qui exercent le pouvoir et le peuple qui les a élu. Comme quoi finalement, en 300 ans, rien n’a vraiment changé.