Frères Ennemis (2018) de David Oelhoffen

Après "Nos Retrouvailles" (2007) et "Loin des Hommes" (2015) le réalisateur David Oelhoffen s'attaque au polar avec le thème des "frères ennemis", thème cinématographique récurrent où des frères ou amis d'enfance prennent des chemins différents, généralement l'un vers le banditisme l'autre vers la police... Dans le genre on peut citer "Les Anges aux Figures Sales" (1938), "La Nuit nous Appartient" (2007) de James Gray et "Les Liens du Sang" (2008) de Jacques Maillot ; notons que James Gary a d'ailleurs co-écrit le remake de ce dernier (2013) de Guillaume Canet... Oelhoffen co-signe son scénario pour une histoire sommes toute assez banal, soit un gang de dealers qui se retrouve orphelin d'un de leur leader assassiné alors qu'il était un indic des stups par le biais d'un ami d'enfance devenu flic... Le cinéaste réuni un joli casting mené par le duo Reda Kateb et Matthias Schoenaerts, tous deux qui avaient pris un virage non négligeable chacun après avoir tourné avec Jacques Audiard, le premier dans "Un Prophète" (2009) le second dans "De Rouille et d'Os" (2012). Reda Kateb qui était également dans le dernier film de Oelhoffen retrouve son partenaire Nicolas Giraud.

Frères Ennemis (2018) de David Oelhoffen

Le troisième "ami" est joué par Adel Bencherif qui était lui aussi dans "Un Prophète". A leurs côtés il y a les atouts charmes avec Sabrina Ouazani et Gwendoline Gourvenec qu'on retrouve dans un registre bien différent après avoir été mademoiselle Chiffre "Le Petit Spirou" (2017) de Nicolas Bary. Si le thème n'a rien de bien original le cinéaste avoue avoir voulu se lancer après avoir rencontré des dealers via des amies avocates, ce qui a enrichi sa curiosité surtout après avoir déjà collaboré au scénario du film "L'Affaire SK1" (2014) de Frédéric Tellier. Oelhoffen précise : "Elle m'a permis d'approfondir ma connaissance de l'institution. de comprendre la réalité du métier. Et de nouer des contacts inattendus. J'avais donc une documentation assez unique des deux côtés de la barrière du trafic de drogue et j'ai commencé à bâtir une histoire sur ce thème."... Outre la rivalité flic-voyou exacerbé évidemment par les liens du passé il y a une volonté nette du réalisateur-scénariste à être le plus réaliste possible, du moins à être le plus crédible possible. Le scénario est prenant et particulièrement dense notamment grâce à une intrigue savamment construite où comment le système des Cité est pernicieux même pour ses propres membres. L'ami caïd ou l'ami flic s'en morde tous les deux les doigts de manière différente.

Frères Ennemis (2018) de David Oelhoffen

Il n'y a pourtant aucun parallèle entre les deux destins, depuis leur "séparation" chacun a vécu sa vie sans avoir à être tributaire de l'autre. L'intrigue première (sorte d'enquête interne à la Cité et à leur milieu stups) offre un réel suspens, l'intrigue seconde (l'enquête policière) manque elle un peu plus de vraisemblance (relation et fonctionnement interne à la police). Malgré quelques faiblesses et/ou maladresses (capitaine avec des galons de commandant, manque d'équipe autour de Driss,...) Oelhoffen offre un polar sombre qui a le mérite d'éviter l'écueil de l'esbroufe comme chez Olivier Marchal. Magnifique performance des deux acteurs principaux, un bémol pour Sabrina Ouazani qui semble peu crédible en mère de famille. Un film noir à la française avec ses coulisses et ses coups de poignards dans le dos, une violence froide qui se dessine également dans la psychologie des protagonistes. Un bon moment.

Note :

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