Malgré une démarche louable et son pitch à base de zombies nazis, la nouvelle production J.J. Abrams peine à convaincre…
Que l’on aime ou pas J.J. Abrams et sa nostalgie de la période Amblin, il faut lui reconnaître l’ambition louable et honnête de ramener à la vie la série B d’exploitation et sa créativité, telles qu’on pouvait les trouver dans les années 80. Avec sa société Bad Robot, ce nouveau mécène de jeunes talents fascinés par le cinéma de genre sait moderniser ce type de productions, surtout en imposant des budgets « moyens », de moins en moins présents dans l’industrie hollywoodienne actuelle. Tout en restant contraignants sur le plan technique (et rien de tel pour inspirer un auteur !), ces projets se révèlent assez confortables pour concurrencer les plus gros blockbusters, sans avoir besoin de tomber dans certains de leurs travers si contemporains, à commencer par les sirènes d’un ricanement post-moderne désormais récurrent. Or, Abrams tient justement à cette simplicité de la série B à l’ancienne, qui réside avant tout dans le sérieux dans son entreprise, quel que soit le sujet abordé, aussi déviant soit-il. Donc forcément, quand le bougre annonce produire un film de guerre avec des zombies nazis, on ne peut que trépigner d’avance sur notre siège, dans l’attente d’une adaptation indirecte et irrévérencieuse de Wolfenstein.
Dès lors, Overlord remplit avec sympathie son contrat dans ses premières minutes, grâce à une caméra immersive suivant un largage de parachutistes au dessus d’un village français (par ailleurs encore plus efficace en 4DX, le format dans lequel il nous a été présenté). A la fois orienté vers un ride hyperactif et vers le sérieux de son contexte, le réalisateur Julius Avery sait plutôt intelligemment jouer avec une conscience globale de la Seconde Guerre mondiale (les détails de reconstitution sont assez bluffants) pour insuffler une tension amplifiée lorsque le film sombre dans l’horreur. Malheureusement, c’est aussi à ce moment là que le bât blesse, la faute à un retournement de situation trop tardif et un build-up trop imposant pour le propre bien du film. Malgré quelques visuels alléchants et une production design souvent inspirée, Overlord ne laisse jamais au spectateur le temps de l’apprécier, principalement à cause d’une photographie extrêmement sombre, et d’un découpage assez primaire, s’inspirant régulièrement des jeux de tir à la troisième personne (avec la caméra dans le dos), quitte à privilégier des focales offrant un arrière-plan flou.
Difficile alors d’ancrer dans cet environnement des personnages qui peinent à se démarquer au-delà de leurs caractéristiques de base (le pleutre idéaliste, le sergent doué mais obnubilé par les ordres…). On pourrait le pardonner au cinéaste au vu de son concept (un sérum rendant immortel mais plus vraiment humain) si cette démarche était assumée pour interroger les affres de la guerre au travers d’archétypes mis à mal par un déluge de violence. Mais Overlord semble déjà ne plus accepter sa condition de néo-film d’exploitation décomplexé, et se retient tellement de péter un coup qu’il est trop tard quand il se prête enfin à l’exercice dans un climax timoré. Entre-ouvrant un nombre conséquent de portes (parfois littéralement) qui ne débouchent sur rien, le long-métrage promet de pénétrer dans son côté obscur sans jamais vraiment l’oser. Et malgré son premier degré tout à son honneur, il ne parvient pas à déranger, ni sur la fascination que provoque encore aujourd’hui l’imagerie nazie dans la culture populaire, ni sur la barbarie que convoquent volontiers ses référents. Reste une démarche qui mérite d’être saluée, et un objet comme on aimerait en voir plus souvent, mais avec une plus grosse paire de cojones.
Réalisé par Julius Avery, avec Jovan Adepo, Wyatt Russell, Pilou Asbæk…
Sortie le 21 novembre 2018.