Sortit cet été ce thriller danois a une réputation qui le précède après avoir été multi-primé lors de festivals dont Sundance et Rotterdam... Premier long métrage du réalisateur danois Gustav Möller qui avait jusque là été remarqué pour un unique court métrage "I Morke" (2015), ce dernier se lance dans le sous-genre du huis-clos téléphonique. Un sous-genre qui n'a rien de nouveau avec quelques perles déjà existantes comme "Phone Game" (2003) de Joel Schumacher, "Buried" (2010) de Rodrigo Cortès et "Locke" (2014) de Steven Knight... Cette fois le réalisateur et co-scénariste s'est inspiré d'un podscast d'une émission d'investigation qui revenait sur un enlèvement suivi en live par le service d'appels d'urgence 112. Le cinéaste explique : "J'ai compris que chaque personne écoutant cet enregistrement verrait des images différentes : une femme différente, un kidnappeur différent,...etc... "... "A chaque épisode, on recevait de nouvelles informations sur l'affaire et le suspect et ce qui est intéressant, c'est que ces informations changeaient à chaque fois, modifiant ainsi les images qu'on se faisait de l'environnement enregistré. Je m'en suis inspiré pour The Guilty : le film commence d'une certaine façon, afin que les spectateurs se créent une image et ensuite, au fur et à mesure que l'on expose plus d'informations sur l'affaire... (...) Au cinéma, on est assis dans une pièce avec d'autres personnes et ça devient l'extension de cette pièce sur l'écran. J'aimerais qu'en regardant le film, on se sente dans la même pièce que les personnages."...
Il existe plusieurs personnages dans l'histoire, une partie des collègues policiers du centre d'appel très secondaires et les protagonistes du rapt plus important mais invisibles à l'écran et, évidemment, le personnage central Asger Holm qui reçoit l'appel. Ce dernier est omniprésent, de chaque plan, magnétique il vampirise l'écran et il s'impose presque comme l'unique personnage à l'écran. Ce dernier est incarné par l'acteur danois Jakob Cedergren qu'on a déjà aperçu dans "Les Bouchers Verts" (2005) de Anders Thomas Jensen, "Arn Chevalier du Temple" (2009) de Peter Flinth et dans le polar français (2015) de Benjamin Rocher avec Jean Reno. A la production on retrouve Henrik Zein connu pour avoir été derrière les projets (2013) de Tobias Lindholm, "Mémoires de Jeunesse" (2015) de James Kent et "Les Oubliés" (2017) de Martin Zandvliet... On suit donc le policier Asger dont on apprend très vite qu'il a été muté au centre d'appel en attente d'un jugement. On devine qu'il n'apprécie guère son travail, alors qu'il reçoit un appel d'une femme victime d'un enlèvement... Gustav Möller instaure d'emblée une atmosphère tendue, d'abord en distillant quelques infos presque anodines sur la vie de Asger, puis en montrant par de menues détails le fonctionnement d'un centre d'appels d'urgences. Une atmosphère pesante mais qui prend une tournure particulièrement angoissante et anxiogène dès lors que l'appel fatidique plonge le policier dans une mission qui le prend plus à coeur comme pris par surprise, par là même le spectateur est aussitôt impliqué. Une attraction qu'on doit beaucoup au travail précis sur la bande-son, autant dans le réalisme des appels (plusieurs sont des retranscriptions réelles) mais aussi et surtout sur les sons environnants provenant des appels téléphoniques avec les protagonistes du rapt.
Le scénario est implacable, d'un policier qui tente d'enquêter via des appels plus ou moins express et en tentant des choix plus ou moins audacieux avec 2-3 rebondissements qui font leur effet autant sur le suspense que sur le frisson. Par contre on peut rester perplexe sur l'isolement de Asger, comment comprendre et pourquoi tait-il cet appel en particulier ?! Pourquoi ne fait-il jamais appel à ses collègues directs du centre d'appel ?! Une sorte de secret dont on ne comprend pas franchement l'utilité et/ou le besoin... Dommage car on frôle le chef d'oeuvre... Gustav Möller signe un thriller captivant et terrifiant mais aussi émotionnellement éprouvant. En tous cas un film qui met en avant un pan du métier de l'ombre pas toujours aisé à gérer. A voir et à conseiller.
Note :