Miss Daisy et son chauffeur

Par Platinoch @Platinoch

Un grand merci à Pathé pour m’avoir permis de découvrir et de chroniquer le DVD du film « Miss Daisy et son chauffeur » de Bruce Beresford.

« Ecoutez Miss Daisy, vous avez besoin d’un chauffeur et moi d’un salaire alors, avec votre accord, restons-en là »

À la fin des années 1940, miss Daisy, une vieille dame juive vivant à Atlanta en Géorgie, institutrice à la retraite, se retrouve dans l'incapacité de conduire sa voiture sans l'endommager. Son fils, Boolie, patron d'une filature de coton, décide d'embaucher un chauffeur, malgré les réticences de sa mère. Son choix se porte sur Hoke, un homme noir chrétien d'une cinquantaine d'années, volontaire et sympathique. Néanmoins, Boolie prévient Hoke qu'il restera sous son autorité afin de lui éviter d'être congédié pour une raison futile par sa mère, une femme au caractère acariâtre. Au fil du temps, le chauffeur parvient à apprivoiser sa patronne, et c'est ainsi que va se tisser une amitié sincère qui durera 25 ans.

« Un vieux nègre et une vieille youd qui font la route ensemble... c’est pas beau à voir ! »

Grand artisan du renouveau du cinéma australien des années 70 et 80 aux côtés notamment de ses collègues Peter Weir et George Miller, Bruce Beresford connait une intense et prolifique première partie de carrière dans son Australie natale. Mais le succès international de « Héros ou salopards » (1980) qui lui vaut une nomination à l’Oscar du Meilleur scénario, lui ouvre les portes de Hollywood, où il débute en fanfare avec « Tendre bonheur » (1983) qui vaut à Robert Duvall l’Oscar du Meilleur acteur et pour lequel Beresford est cette fois nommé à l’Oscar du Meilleur réalisateur. La suite de sa carrière américaine sera plus discrète et sans doute moins prestigieuse (« Le roi David », « Un anglais sous les tropiques », « Double jeu »). Exception faite de « Miss Daisy et son chauffeur » (1989) qui restera sans doute son plus gros succès critique et public et qui fut récompensé de quatre Oscars, dont Meilleur Film et Meilleure actrice pour Jessica Tandy.

« Qu’est-ce que vous croyez que ça me fait de devoir demander la permission de faire pipi comme un petit enfant ? Je ne suis pas une mule, je suis un vieil homme de 70 ans ! »

Adapté d’une pièce d’Alfred Uhry créée en 1987 à Broadway et qui valut à son auteur le Pullitzer de l’œuvre théâtrale, le film nous conte la relation tumultueuse entre une vieille dame blanche et acariâtre d’Atlanta et le chauffeur noir que lui impose son fils sur près d’un quart de siècle. Deux personnages par nature antagonistes et aux caractères affirmés qui finiront - sans jamais le dire - par s’apprivoiser et se respecter, le tout sur fond de vieux sud américain raciste et ségrégationniste. Il faut dire que les deux personnages ont en commun de ne pas correspondre aux standards WASP tant aimés de la vieille société américaine car si Hoke est noir, Daisy, elle, est juive. A grands renforts de bons sentiments et d’humour, le film s’emploie à dénoncer le racisme ambiant et perdurant qui ronge cette frange de l’Amérique profonde et, en bonne fable, encourage à dépasser les préjugés. Reste que compte tenu de son année de sortie (1989), soit quatorze ans après le très dur « Mandingo » ou à peine un an avant la violente charge de « Mississippi Burning », on s’étonne un peu du manque d’aspérité du discours et du côté finalement très propret du film, où le noir reste représenté comme un homme soumis et obséquieux (tout juste revendique-t-il le droit de faire une pause pipi) tandis que le blanc - exception faite de deux policiers d’Alabama - demeure finalement bienveillant. Ainsi, et aussi étonnant que cela puisse paraitre, aucune référence directe ne sera faite au Ku Klux Klan (dont le nom n’est jamais prononcé), pas plus qu’aux conditions de vie des afro-américains. Tout juste les ellipses permettent-elles à la fin au vieux chauffeur de faire savoir que, signe du progrès et des temps qui changent, sa petite-fille enseigne à l’Université. Mais malgré ces évolutions, il continue jusqu’au bout à appeler les blancs « Monsieur » ou « Miss » tandis que ces derniers l’appellent toujours par son prénom. S’il demeure pas foncièrement désagréable à regarder, le film pêche par son côté bien-pensant et finalement trop peu lisse. Vu de 2018, cela reste quand même assez décevant.

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Le DVD : Le film est présentée en version restaurée en 4K, en version originale américaine (2.0) ainsi qu’en version française (2.0). Des sous-titres français sont également disponibles.

Côté bonus, le film est accompagné de « Miss Daisy et son réalisateur » : Entretien avec Bruce Beresford (22 min.) et de trois actualités Pathé d’époque : L’Amérique noire : Le mur (7 min.), L’Amérique noire : Le combat (8 min.) et Ce monde nouveau - Martin Luther King (3 min.).

Edité par Pathé, « Miss Daisy et son chauffeur » est disponible en combo collector blu-ray + DVD depuis le 7 novembre 2018.

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