Gravity, film de science-fiction américano-britannique, réalisé par Alfonso Cuaron, avec Sandra Bullock et George Clooney
Synopsis : Le commandant de la navette spatiale américaine Explorer, Matt Kowalski (George Clooney), et l’astronaute scientifique Ryan Stone (Sandra Bullock), seuls survivants d’une mission spatiale destinée à réparer le télescope spatial Hubble, tentent de retourner sur Terre en regagnant d’abord la Station spatiale internationale.
Il y a quelques jours, nous avons eu l’occasion de voir en 4DX l’avant-dernier film d’Alfonso Cuaron, Gravity. Survival ultra-immersif dans l’espace, le film avait à l’époque de sa sortie tout raflé sur son passage, avec en point d’orgue dont celui de meilleur réalisateur. Mais, six années de recul plus tard, que vaut le film ? Est-il le chef d’oeuvre annoncé ou simplement une oeuvre surcôtée ? Tentative de réponses en quelques points.
Ce qui frappe à première vue devant Gravity, c’est cette volonté constante de Cuaron de nous immerger au plus près de ces personnages afin ainsi de nous faire ressentir au mieux la dureté de ce qu’ils traversent. Pour cela, Cuaron confie la photographie au génial Emmanuel Lubezski (oscarisé pour ce film d’ailleurs) qui nous livre des plans séquences étirés à l’extrême qui fais de nous, spectateurs, des témoins actifs de l’action. En effet, c’est en alternant des plans larges où le spectateur devient presque le troisième homme de la situation, observant nos deux acolytes se battre pour leur survie sans pouvoir intervenir, et les plans serrés anxiogènes, où Lubezski nous projette littéralement dans les yeux de Ryan Stone afin de nous faire ressentir tout le désarroi de l’astronaute face à la situation. C’est justement là que s’oriente le choix fort de Cuaron ; plutôt que de nous dévoiler une histoire en bonne et due forme, le réalisateur mexicain préfère nous livrer une véritable expérience sensorielle, où nous accompagnons Stone dans son voyage iniatique vers la détermination de soi par le lâcher prise, comme une rupture avec la tranquille monotonie de son existence au profit d’une existence plus organique, ce qui la rend naturellement plus active.
Ryan Stone (Sandra Bullock)C’est d’ailleurs dans cela que réside le principal reproche qui avait été fait contre le film au moment de sa sortie : la finesse notoire de son scénario. Force est de constater que cette remarque n’a pas été émise à tort, le film étant bien loin de briller par ces capacités narratives. Mais cela semble pourtant assez cohérent lorsque l’on gratte la simple surface : l’objectif de Cuaron n’est pas de divertir, mais bien d’interroger directement le spectateur sur sa propre existence : si notre vie ne tenait plus qu’à un fil, saurions-nous capable de nous en remettre à notre instinct primaire pour nous surpasser ? Par cela Cuaron va se servir de la science-fiction avant tout comme un contexte (même s’il reprend beaucoup les codes, notamment esthétiques, du genre) pour nous distiller plus profondément son intention : il nous invite ici à un voyage dans lequel nous sortirons grandi, comme dans une nouvelle vie (le parallèle entre une Ryan Stone incapable de marcher à la fin et l’absence de connaissance de marche à la naissance n’est d’ailleurs pas anodin). Si cela n’excuse pas les quelques moments de flottements, ou des personnages malgré tout stéréotypés, il n’en reste pas moins que Gravity s’impose comme un captivant voyage iniatique sensoriel.
En somme, Gravity semble être un film aux multiples pistes de lecture. Doté en premier lieu d’une capacité de divertissement énorme par l’intensité que traduit la photographie de Lubezski, Cuaron dote son film d’une portée réflextive sur notre position dans le monde et sur le dépassement de soi qui justifie finalement le statut culte que le film possède déjà. Face à tout cette densité, la seule chose qui nous vient à l’esprit, c’est bien de retourner le voir pour continuer d’y percer toutes ses subtilités…
Note
4,5/5
Mélangeant survival sensoriel et science-fiction à grand spectacle, Gravity profite notamment du travail sur la photographie de Lubezski et de la réflexion artistique de Cuaron pour justifier son statut culte et se révéler comme une oeuvre magistrale aux diverses pistes de lecture.
Bande-annonce