LA LISTE DE SCHINDLER (Critique)

LA LISTE DE SCHINDLER (Critique)LA LISTE DE SCHINDLER (Critique)

SYNOPSIS : Evocation des années de guerre d'Oskar Schindler, fils d'industriel d'origine autrichienne rentré à Cracovie en 1939 avec les troupes allemandes. Il va, tout au long de la guerre, protéger des juifs en les faisant travailler dans sa fabrique et en 1944 sauver huit cents hommes et trois cents femmes du camp d'extermination de Auschwitz-Birkenau.

1993. Alors qu'il met le monde entier à ses pieds en donnant vie à des dinosaures plus vrais que nature et qu'il bat tous les records avec Jurassic Park, Steven Spielberg est déjà accaparé par son nouveau projet, un film écrasant qu'il a mis un temps fou à se décider à faire, incitant même à un moment Martin Scorsese à s'y atteler, avant de le lui reprendre contre Les Nerfs à vif: La Liste de Schindler, un film de 3h15 en noir et blanc sur l'histoire vraie d' Oskar Schindler, un industriel allemand qui durant la seconde Guerre Mondiale sauva plus d'un millier de juifs. En inscrivant ce récit dans la Grande Histoire, en racontant l'horreur absolue de la pire tragédie de l'humanité, Spielberg signe un film immense, une œuvre nécessaire qui transpire l'humanité et invite autant au devoir de mémoire qu'à vivre un étourdissant moment de cinéma au travers d'un film poignant. Les premières incursions de Spielberg vers des sujets dits " sérieux " ( La Couleur Pourpre, L'Empire du Soleil, Always) souffraient aux yeux des observateurs d'un sentimentalisme trop prégnant qui plombaient ce que d'aucuns prenaient notamment pour des tentatives de légitimité du cinéaste. Avec La Liste de Schindler, Steven Spielberg atteint la quintessence de son art en racontant, parce qu'il ne faudra jamais l'oublier, le pire épisode de l'Histoire et provoque à la fois une émotion considérable couplée à la conscience aigüe que cette émotion découle de faits réels, ce qui en décuple la profondeur et l'écho. En nous faisant vivre au plus près ces atrocités, en nous faisant comprendre l'inhumanité et la barbarie et en utilisant le cinéma comme vecteur d'utilité publique, Spielberg nous transperce d'émotion en réussissant à la perfection à trouver le bon équilibre.

LA LISTE DE SCHINDLER (Critique)

En racontant l'Holocauste dans ce qu'il a de plus terrible et sans atténuer la portée de son propos, Spielberg devient aux yeux de l'intelligenstia un cinéaste complet, un réalisateur majuscule, qu'aucun sujet n'effraie ou ne rebute. La force du cinéma lorsqu'il est utilisé à cet effet n'a pas d'équivalent au monde. On tremble devant ces meurtres gratuits, on a le cœur serré devant ces enfants livrés à eux-mêmes qui cherchent une cachette de fortune pour éviter d'être capturés, on se mord l'intérieur de la joue à la vision de ces femmes et de ces hommes nus, décharnés et traités comme du bétail... La violence graphique et psychologique de ces scènes -et il y en a un paquet d'autres- est proprement insoutenable mais donne paradoxalement au film une ampleur et une émotion que peu d'œuvres peuvent se targuer d'avoir approchées. Spielberg ne fait pas un documentaire même si il en épouse parfois certains codes comme la caméra à l'épaule mais une fiction formellement magnifique, un vrai film de cinéma où passe subrepticement des traces d'humanité dans une histoire qui en semble dépourvue. Que le metteur en scène de Jaws et de E.T soit capable de nous emporter dans cette tragédie sans nom en faisant voler en éclats toutes nos réserves est un véritable prodige qui donne lieu à une réussite éblouissante.

LA LISTE DE SCHINDLER (Critique)

La véracité des images que filment Steven Spielberg, la douleur indicible qu'elles charrient, la crudité implacable qu'elles impriment en nous, tout est fait pour que La Liste de Schindler marque les esprits et s'inscrive dans la conscience collective. Mais l'immense et profonde intelligence du film est de ne jamais être didactique, de ne jamais manipuler l'émotion ou de tirer sur d'évidentes ficelles. En s'entourant d'artisans remarquables à tous les postes clés (le brillant Steven Zaillian au script, le fantastique Janusz Kaminski à la photo, le fidèle John Williams à la musique...) Steven Spielberg s'est assuré de réaliser un film sobre, dépourvu de superflu, aussi tranchant qu'une lame et qui va à l'essentiel, sans sacrifier ses ambitions artistiques sur l'autel de la réalité historique. Tout est là, sans indécence et sans emballage, chaque étape de cette épouvantable tragédie passant devant la caméra d'un Spielberg que le sujet semble transcender de manière littéralement viscérale. Parce qu'il était sans doute mû par une mission qui dépassait le simple cadre artistique, parce que ce sujet lui était forcément destiné et qu'il l'a embrassé de plein fouet, Spielberg a fait un film qui réussit le tour de force de passionner, d'émouvoir et d'interpeller avec une cachet d'authenticité qu'il ne quitte pas un instant. Cette prouesse est aussi due à des personnages loin de tout manichéisme, ni blancs, ni noirs, ni tout à fait bons, ni tout à fait mauvais mais plein d'aspérités, des personnages qui existent totalement devant nos yeux et dont on comprend les choix et les enjeux sans bien entendu les approuver. Ralph Fiennes ou Ben Kingsley rivalisent de subtilité dans des interprétations d'où chaque nuance est éclatante tandis que dans le rôle de Schindler, Liam Neeson trouve un personnage trouble, équivoque et d'une profondeur sans commune mesure, auquel il confère toute sa complexité, loin de l'action star qu'il est devenu. On ne ressort pas indemne du visionnage de La Liste de Schindler, c'est un film qui s'inscrit en nous de manière indélébile et qui nous fait dire que oui, le cinéma peut nous élever haut et nous emporter sur des sommets qui, même 25 ans après, restent irrespirables mais dont on doit nécessairement se souvenir.

LA LISTE DE SCHINDLER (Critique)

Titre Original: SCHINDLER'S LIST

Réalisé par: Steven Spielberg

Genre: Historique, Guerre

Sortie le: 02 mars 1994

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