L'ibis rouge

Par Platinoch @Platinoch

Un grand merci à ESC Editions pour m’avoir permis de découvrir et de chroniquer le blu-ray du film « L’ibis rouge » de Jean-Pierre Mocky.

« Je comprends très bien qu’on puisse étrangler une femme mais si c’était moi, je la ferais d’abord passer à la casserole ! »

Raymond Villiers ne se doute pas que l’homme qui lui fait face dans l’ascenseur n’est autre que l’étrangleur qui défraie la chronique. Mais Raymond ne s’attarde pas, il abandonne ce personnage et se met en quête des trois millions qu’il a perdu au jeu et qu’il doit rembourser au plus tôt. Dès lors, une succession de quiproquos et de méprises vient bouleverser l’ordre naturel des événements.

« Seigneur, je vous demande de nous délivrer du péché ma verge et moi et de nous faire connaitre les caresses des anges »

Ex-jeune premier du cinéma français, où il a démarré sa carrière enfant devant la caméra de Marcel Carné et de Marcel L'Herbier, Jean-Pierre Mocky met sa carrière d'acteur entre parenthèses au milieu des années 50 pour apprendre les rudiments du métier de réalisateur aux côtés de plusieurs grands cinéastes (Visconti, Mankiewicz) et démarre sa propre carrière de réalisateur à la toute fin des années 50. Il s'impose ainsi dans le paysage cinématographique français au milieu des années 60 grâce à ses comédies populaires grinçantes (« Un drôle de paroissien », « La grande lessive », « L'étalon ») dans lesquelles il brocarde gentiment les travers de la société française des Trente glorieuses, à l'aube de la libération des mœurs et de l'avènement de la société de consommation. Mais à partir des années 70, le cinéaste se laisse quelque peu déborder par sa veine un peu anar et, en dépit de quelques succès commerciaux, glisse progressivement vers un cinéma plus marginal (et plus radical), évoluant un peu à l’écart du système et enchainant les films à très petits budgets.

« Cocu ? Mais je ne suis même pas marié ! »

Librement inspiré d'une nouvelle de Frédéric Brown, « L'Ibis rouge » est une étrange comédie de mœurs, construite autour de trois personnages dont les destins n'auront de cesse de se croiser: un agent de la sécu obsédé par les grosses poitrines qui devient un tueur en série à la nuit tombée et qui parle à une mouche prénommée Solange, un représentant de commerce spécialisé dans les spiritueux qui cherche à rembourser une forte dette de jeu, et un vieux kiosquier bougon et raciste, qui cherche obstinément à se faire passer pour le mystérieux tueur de femmes. Trois personnages qui, en ce milieu particulièrement tourmenté des années 70, représentent un peu les obsessions et les frustrations de la société française (le sexe, l'argent, une certaine recherche de reconnaissance). Le problème, c'est que le film demeure très peu écrit et que Mocky laisse tourner ses acteurs en totale roue libre, faisant fi de tout enjeu dramatique au profit d'un humour libertaire et machiste un peu noir qui ne passerait sans doute plus aujourd'hui (le tueur en série qui passe un peu pour un looser auprès de ses amis car il n'a jamais pensé à violer les femmes avant de les étrangler). Sans doute un peu daté, le film vaut surtout pour ses comédiens et notamment son beau trio de Michel: Serrault, Galabru et Simon (dont il s'agit du dernier film, tourné très peu de temps avant son décès). Un film tout de même assez mineur.

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Le blu-ray : Le film est présenté dans un nouveau Master Haute-Définition, en version originale française (2.0).

Côté bonus, le film est accompagné d’un entretien avec le réalisateur Jean-Pierre Mocky, qui revient sur la genèse du film et son tournage.

Edité par ESC Editions, « L’ibis rouge » est disponible en DVD ainsi qu’en blu-ray depuis le 5 mars 2019.

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