[CRITIQUE] : Dumbo

Par Fuckcinephiles
 

Réalisateur : Tim Burton

Acteurs : Colin Farrell, Michael Keaton, Eva Green, Finley Hobbins, Nico Parker,...
Distributeur : The Walt Disney Company France
Budget :-
Genre : Famille, Aventure.
Nationalité : Américain.
Durée : 1h52min

Synopsis :

Les enfants de Holt Farrier, ex-artiste de cirque chargé de s’occuper d’un éléphanteau dont les oreilles démesurées sont la risée du public, découvrent que ce dernier sait voler...


Critique :

Plus universel et moins tragique que le film original tout autant qu'il met joliment l'accent sur la cause animale,#Dumbo, tourné avec le coeur mais pas sans maladresses, privilégie l'inédit au copie-calque et incarne un beau poème personnel et touchant, esthétiquement renversant pic.twitter.com/nGtn51Qn75— FuckingCinephiles (@FuckCinephiles) March 26, 2019

Tim Burton et Disney, c’est une longue histoire qui remonte aux années 1980 et qui n’a pas toujours été de tout repos. Pourtant, c’est grâce au succès de son Alice au Pays des Merveilles que la firme aux grandes oreilles a commencé à travailler sur les remakes en live-action de ses classiques d’animation. Près de 10 ans après nous avoir présenté son Alice gothique et farfelue, Burton s’est de nouveau associé à Disney pour proposer une toute nouvelle version en prise de vues réelles du film d’animation Dumbo, sorti en 1941.


Une histoire qui semble parfaitement correspondre au fantasque réalisateur : le personnage principal de Dumbo, petit éléphant qui devient un paria à cause de ses oreilles démesurément grandes, n’est pas sans rappeler ses précédents personnages si décalés et attachants, comme Edward aux Mains d’Argent évidemment. Le casting de Dumbo est d’ailleurs composé de la plupart des acteurs et actrices fétiches de Burton, comme la sublime Eva Green dans le rôle de Colette, une trapéziste française, Michael Keaton, qui interprète V. A. Vandevere, le sombre directeur de Dreamland, et Danny DeVito qui campe le directeur de cirque Max Medici. Même le célèbre compositeur Danny Elfman, qui nous a habitués à illustrer de son univers musical les films de Burton, fait partie de cette flamboyante équipe. Tous les ingrédients semblent réunis pour un grand film Disney à la sauce Tim Burton.


On peut concéder à Dumbo plusieurs choses : d’abord, la proposition d’une histoire assez inédite, qui prend bien plus de libertés avec le film d’animation que les précédents remakes, notamment La Belle et la Bête. Le film commence en 1919 après la Première Guerre mondiale, et se place du point de vue de deux enfants, Milly et Joe, dont le père Holt (incarné par Colin Farrell) était un ancien dompteur de chevaux pour le cirque Medici Brothers et qui revient de France avec un bras en moins. Holt est alors assigné par le directeur du cirque au soin des éléphants, et notamment de Mme Jumbo, une grande éléphante d’Asie dont il vient de faire l’acquisition et qui est enceinte. Naît alors le petit Jumbo Junior qui sera surnommé Dumbo, cruel sobriquet qu’il doit à ses trop grandes oreilles. Heureusement, les enfants sont là pour s’occuper de l’éléphanteau, et s’aperçoivent bien vite que ses oreilles lui permettent de voler. Et lorsque Dumbo devient une vedette du cirque Medici, le sombre Vandevere entre en jeu pour racheter le cirque et faire venir l’ensemble de la troupe et des animaux à Dreamland…


Les décors de Dumbo sont d’ailleurs très beaux et inspirés : entre l’univers bucolique des premières représentations du cirque Medici, et celui enlevé et spectaculaire de Dreamland, on ne peut qu’être séduit par cet univers haut en couleurs. On note d’ailleurs que Disney a accepté la référence noire à peine déguisée à son propre Pays Enchanté !

Le film n’est pourtant pas exempt de défauts : avec sa dimension résolument familiale, les personnages sont si convenus qu’ils en deviennent parfois fades. Le jeu effroyable des jeunes acteurs, couplé à celui bien morne de Colin Farrell, rend le trio de personnages principaux assez ennuyeux. Heureusement que Michael Keaton, Eva Green et Danny DeVito sont là pour relever le niveau avec leur jeu flamboyant et émouvant à la fois.
La meilleure surprise de ce film est bel et bien Dumbo, le petit éléphanteau en animation : pari d’ailleurs risqué mais qui fonctionne à merveille, et dont les grands yeux bleus ne peuvent que faire fondre le coeur des spectateurs. Tout en restant fidèle à l’animation d”origine, le jeune éléphant se fond parfaitement dans les décors et avec les acteurs réels. On en vient presque à regretter qu’il ne soit pas davantage au centre du film, plutôt qu’un prétexte pour les changements de vie des personnages...

En définitive, Dumbo est un pari réussi en terme d’adaptation et propose une oeuvre qui, sans être parfaite, est tout à fait inédite et ne manque pas d’intérêt. Les références au film d’animation, de la célèbre chanson Baby Mine au train Casey Jr, en passant par les éléphants roses, feront en tout cas plaisir aux puristes du film d’animation.


Victoire



On ne croyait plus ou presque en Tim Burton, génie excentrique et marginal du septième art qui a su bercer nos esprits de cinéphiles à coups de péloches cultes avant de gentiment perdre de son mojo au fil du temps, usé par une firme aux rêves qu'il avait embrasé avant de rentrer dans le rang, comme si lui non plus ne croyais plus en sa magie, où même en sa propre magie.


Reste que son léger retour aux sources enclenché avec Miss Peregrine, laissait présager que la poésie féerique un tantinet macabre d'Edward ou encore Beetlejuice, n'avait pas totalement quitter la caméra du roi du gothique, et que son nouveau passage du côté obscur d'Hollywood - Disney -, pour Dumbo, neuf ans après le difficilement défendable Alice aux Pays des Merveilles, pouvait décemment nous réconcilier pour de bon avec le bonhomme.

Bonne pioche, car si non seulement sa version live des aventures de l'éléphant volant est un bijou de divertissement familial grisant et émouvant, elle est avant tout et surtout une bande Burtonienne comme il n'en faisait plus, prolongeant à merveille les questionnements esquissés dans ses deux derniers essais.
Même si l'introduction est un poil laborieuse, Burton a totalement conscience que même 78 ans après son arrivée dans les salles obscures, Dumbo est un personnage phare férocement ancré dans la psyché collective, un héros bouleversant et attachant dont le portrait déchirant, saupoudré d'une critique cruelle mais legitime du star-system, est sans doute l'un des plus brillants croqué par la firme aux grandes oreilles, voilà pourquoi il en fait un pilier central de son odyssée nostalgique sur la différence - qui se dédouble sur le personnage de Holt Farrier, lui aussi blessé par la dureté de la vie -, avant de lentement le faire glisser au second plan, pour judicieusement lui préférer les humains et renouer fougueusement avec son amour des freaks.

Et c'est bien là le vrai beau tour de force de ce remake (qui correspond de facto totalement à son statut) : Burton ne fait plus de Dumbo le sujet de l'histoire mais bien l'élément central des interactions avec les humains - un peu comme Beetlejuice -, la bulle d'amour et de légèreté qui embellit la vie de personnages de chair et d'os tranchant littéralement avec les animaux de l'animé, pour mieux pousser à l'empathie et enivrer un auditoire dans son multiple récit initiatique/d'apprentissage/reconstruction aux fortes résonances méta.

Impossible de ne pas imaginer que Big Tim, totalement en confiance (il retrouve Eva Green, Michael Keaton et Danny DeVito devant la caméra, Elfman à la B.O.) et en pleine possession de ses moyens, ne se reconnaisse pas un minimum dans la marginalité raillée de Dumbo, ni qu'il ne cherche pas a jeter une petite crotte de nez au front du studio aux grandes oreilles (démarcheuse/briseuse de talent au fil des décennies) via le personnage aux ambitions mercantiles de Keaton.
Plus universel et moins tragique que le film original, moins épuré sans pour autant brader ses morceaux de bravoure, et mettant habilement l'accent sur la cause animale (et leur traitement dans les cirques, les zoos,...), le Dumbo de Tim Burton, tourné avec le coeur mais pas sans maladresse (quelques SFX limités, quelques longueurs,...), privilégie l'inédit au copie-calque sans saveur (comme le mésestimé Maleficent) et incarne un beau poème personnel et touchant, esthétiquement renversant (les décors sont somptueux, la reconstitution du début des années 20 est appliquée).

Qu'on se le dise, le grand Tim Burton est de retour, et on rit autant qu'on pleure et que l'on est émerveillé à la vue d'un de ces métrages, et c'est bien là l'une des plus belles nouvelles de ce riche début d'année ciné 2019.


Jonathan Chevrier



Dumbo, une histoire pour enfant inventée par Helen Aberson, est devenu un des classiques d’animation Disney en 1941. L’histoire de ce petit éléphanteau, à la différence physique au niveau de ses oreilles, qui fait de sa différence une force est considéré comme un des Disney les plus sombres et durs (à l’instar de Bambi). Dans le besoin obsessionnelle de la firme aux oreilles de Mickey de vouloir adapter tous leur anciens films en version live, Dumbo nous paraissait un choix bizarre. Peut-être à cause du grand âge du film, quatre vingt ans, ce qui explique pourquoi les nouvelles générations ne le visionnent pas forcément. Ou le côté psychédélique et malsain qui ressort (quand on le voit avec des yeux d’adultes). Pourtant, il est vrai que le sujet du film reste d’actualité. Cette histoire de rejet, de faire de nos défauts une force, cela fait encore mouche dans nos petits cœurs fragiles. Surtout que le film n’est pas mis dans les mains de n’importe qui, mais dans celles de Tim Burton. Si ses films sont constamment controversés depuis une vingtaine d’années maintenant, chaque annonce d’un nouveau projet de sa part s’accompagne d’une attente : va-il-faire son grand retour parmi les cinéastes de génie ? 


Quand on parle du style burtonien, nous avons en tête du macabre, du gothique, un personnage principal différent (physiquement ou moralement), sur une musique de Danny Elfman. Cette fois, Burton quitte tout aspect gothique pour nous dévoiler un univers plus féerique, moins pessimiste que prévu. Dans une adaptation qui se libère de l’oeuvre de base, le réalisateur nous fait rentrer dans le monde du cirque, le jour où deux enfants Milly et Joe retrouvent leur père parti en guerre. Dumbo est ici en personnage secondaire, car le film se concentre cette fois sur les humains. Ceux qui acceptent Dumbo, qui l’encouragent, qui l’aident. Ceux qui voient en lui un profit. Ceux qui se moquent. Une occasion de s’entourer d’un casting quatre étoiles : Colin Farrell (dont on ne présente plus le talent), Eva Green (qui a du s’entrainer à certaines acrobaties), Michael Keaton et Danny DeVito. 


Tim Burton n’hésite pas à être grandiloquent dans ce Dumbo, avec une mise en scène qui en jette. Tout est mis en oeuvre pour nous faire couler la petite larme (qui vient facilement). On regrette quand même l’absence du personnage de la petite souris Timothée, même si le choix est judicieux vu que dans cette adaptation, les animaux ne parlent pas.

Dans une parfaite maîtrise numérique, Dumbo propose un nouveau point de vue sur un classique Disney, au lieu de nous présenter une copie conforme. Un choix à encourager, surtout quand c’est aussi émouvant et féerique. 

Laura Enjolvy