Réalisateur : Yolande Zauberman
Acteurs : -Distributeur : New Story
Budget : -
Genre : Documentaire.
Nationalité : Français.
Durée : 1h46min
Synopsis :
«M» comme Menahem, enfant prodige à la voix d’or, abusé par des membres de sa communauté qui l’adulait. Quinze ans après il revient à la recherche des coupables, dans son quartier natal de Bnei Brak, capitale mondiale des Juifs ultra-orthodoxes. Mais c’est aussi le retour dans un monde qu’il a tant aimé, dans un chemin où la parole se libère… une réconciliation.
Critique :
M ou un documentaire renversant qui ébranle les fondements d'une communauté religieuse murée dans un silence qui tue. A l'image du joueur de flûte de Hamelin, Menahem (en hébreu, le consolateur) panse ses plaies au contact de celles, prégnantes, pugnaces, des autres (@Nanoushkah) pic.twitter.com/FEQrtqKKj0— FuckingCinephiles (@FuckCinephiles) March 30, 2019
Sept ans après Would you have sex with an arab ?, Yolande Zauberman revient avec un nouveau documentaire – renversant – qui divulgue les viols commis en toute impunité dans la communauté juive orthodoxe de la banlieue de Tel Aviv. Elle y prolonge son cycle d'errance nocturne – M est filmé intégralement de nuit – et confirme son ambition d'inscrire son œuvre dans un cinéma du réel engagé (Classified People, Caste Criminelle).
Déconcertant dans la forme – le montage fragmentaire peut donner l'impression d'une suite de témoignages décousus et paraître inesthétique – comme dans le fond, M s'impose par sa grande sincérité et prolixité. On est surpris de prime abord par ce garçon qui confie sa blessure à tous ceux qui croisent son chemin avant de saisir qu'il s'agit, à travers cette parole intarissable et meurtrie, d'ébranler les fondements d'une communauté murée dans un silence qui tue. M aborde ainsi – et sans tabou – les conséquences d'un viol sur la sexualité, la culpabilité, la honte, la crainte de devenir soi-même un violeur ou encore le poids de la tradition. Une démarche synthétisée par ces quelques mots, empruntés à Kafka et réappropriés par la réalisatrice à la fin du documentaire : "Je suis parmi les miens avec un couteau pour les agresser. Je suis parmi les miens avec un couteau pour les protéger. Ce film est mon couteau". Une supplique enragée, diffuse, authentique, d'une grande musicalité – plus encore que l'OST signée Ibrahim Maalouf, ce sont les chants yiddishs qui transpercent l'âme du spectateur. Pour longtemps.
Anaïs