SYNOPSIS: Un tueur professionnel, Martin Terrier, envisage de se retirer, mais ses commanditaires s'y opposent, préférant le voir mort que retraité. Terrier se réfugie alors dans une ferme tenue par la belle Claire et son mari. Le gang ne tarde pas à le débusquer.
Le titre de ce film, on devine comment il aurait fallu l'interpréter. Le titre de ce film, on sait hélas comment on doit l'interpréter. Parce que si choc il y a, c'est de voir - avec un petit sourire au coin du visage - comment une nuée d'arguments commerciaux peuvent se manger un joli effet reverse en pleine face. De l'adaptation d'un excellent roman de Jean-Patrick Manchette ( La Position du tireur couché, qui donnera lieu 33 ans plus tard à une autre adaptation, Gunman de Pierre Morel), il ne reste qu'un banal polar comme on en pondait treize à la douzaine, à une époque où l'on ne cherchait qu'à capitaliser sur l'image iconique de nos méga-stars hexagonales. D'un projet censé mettre en avant la rencontre de deux stars glamour ( Alain Delon et Catherine Deneuve), il ne reste qu'un film à la seule et unique gloire de sa tête d'affiche, plus narcissique que jamais, qui relègue (malgré lui ?) tout autre membre du casting au rang de subalterne destiné à lui servir la soupe. D'un film auréolé d'un statut de ratage méprisé par la critique (on se souvient encore de ce qu'en disait Serge Daney dans le journal Libération) et le public (qui ne s'est pas laissé rouler dans la farine), il ne reste aujourd'hui plus grand-chose. Même pas la légère sympathie d'un navet ayant tourné au nanar rigolo au fil des années. Juste un produit de consommation courante qui montre à bien des égards les limites du " star-system ".
Alors que papy Delon vient tout juste de choper une Palme d'honneur pour l'ensemble de sa carrière, revoir Le Choc fait figure de piqûre de rappel sur une filmographie en réalité très inégale, où les classiques inoxydables avaient côtoyé un bon paquet de purges. Dans le cas présent, on n'est certes pas tombé aussi bas que Le Passage (celui où un Delon pleurnichard foutait une branlée à la Grande Faucheuse avec du Francis Lalanne en fond sonore !) ou Dancing Machine (celui où un Delon ex-danseur dragouillait une Tonya Kinzinger toute jeune et pas encore Sous le soleil !), mais pour un film casé pile poil entre le succès de deux réalisations sans relief ( Pour la peau d'un flic et Le Battant), il est clair que les impératifs commerciaux ont drivé tous les partis pris du projet. Du roman de Manchette, il ne reste pas grand-chose (même pas sa fin, très nihiliste et surprenante), si ce n'est le concept du tueur professionnel pris en chasse par ses anciens employeurs après sa décision d'arrêter son activité. Le plus étonnant, c'est que même en essayant de se détacher de son aura melvillienne, Delon peine ici à jouer les flingueurs charismatiques, se contentant ainsi de froncer les sourcils, de porter des lunettes fumées, d'esquiver toute surcharge dramatique dans son jeu (on le sent absent quand un drame se produit à l'écran) et, en fin de compte, de faire le minimum syndical en attendant son chèque. De son côté, la divine Deneuve n'intervient qu'au bout de vingt minutes de film en apparaissant au beau milieu des poules dans une ferme, désérotisée et désincarnée comme rarement elle ne l'a été - elle avoue encore aujourd'hui conserver un sale souvenir du tournage.
Que reste-t-elle à ce Choc qui n'en est pas un ? Faisons un petit vrac : ce cher Féodor Atkine en tueur à lunettes (vous savez, celui qui bavarde un peu trop longtemps pendant qu'il braque sa cible, et qui finit par se faire descendre par inattention...), Dany Kogan qui singe à nouveau le rôle de tueuse perverse qu'elle tenait dans Le Professionnel, Philippe Léotard qui lit son texte au lieu de jouer son rôle, un ersatz mollasson de mexican standoff dans une ferme, des flinguages aussi survoltés qu'un concours de pistolets Nerf dans un open-space de 15m², une bagarre très embarrassante entre Delon et une cuisinière obèse, une intrigue dont on se fiche éperdument au bout d'une demi-heure, sans oublier l'inévitable scène d'amour sur la peau de bête face à la cheminée (avec la zik ridicule en fond sonore). Pas de choc, que du chic. Hélas, c'est lisse et c'est l'os.
Titre Original: LE CHOC
Réalisé par: Robin Davis
Genre: Policier
Sortie le: 28 avril 1982
Distribué par: UGC
TRÈS MAUVAIS