Un grand merci à Coin de Mire pour m’avoir permis de découvrir et de chroniquer le blu-ray du film « L’affaire Dominici » de Claude Bernard-Aubert.
« Le vieux a toujours tout su. Mais il a toujours tout gardé pour lui. »
4 aout 1952, une chaude nuit en Haute Provence. Un triple meurtre : le père, la mère, la petite fille sont sauvagement assassinés. Ces 3 anglais sont tués en pleine campagne… À 500 mètres d’une ferme qui, du jour au lendemain, devient célèbre dans le monde entier : la grand’Terre. C’est le fief de Gaston Dominici, ancien berger, qui règne tel un seigneur sur ses terres, sur ses neuf enfants et dix-neuf petits-enfants. Au matin qui suit la tragédie, l’enquête commence…
« Tu sais ce qui arrive à ceux qui parlent trop ? Un beau jour, ils ne parlent plus du tout ! »
Reporter de guerre durant tout le conflit d’Indochine, Claude Bernard-Aubert se tournera vers le cinéma et plus particulièrement vers la réalisation dès le milieu des années 50. A son actif, une quinzaine de longs-métrages réalisés en un peu plus de trente ans de carrière, essentiellement centrés autour du thème de la guerre (« Les portes de feu ») - et plus particulièrement de la Guerre d’Indochine (« Patrouille de choc », « Le facteur s’en va-t-en guerre », « Charlie bravo ») - mais aussi de la question du racisme et de la ségrégation (« Les tripes au soleil », « Les lâches vivent d’espoir »). Ce que l’on sait moins, c’est qu’il mènera en parallèle à sa carrière dans le cinéma traditionnel une seconde et prolifique carrière de réalisateur dans le milieu du cinéma porno sous le nom de Burd Tranbaree. Reste que l’apogée de sa carrière de cinéaste restera sans doute sa reconstitution de « L’affaire Dominici » tournée en 1973.
« Je préfère des aveux stupides à pas d’aveux du tout »
« L’affaire Dominici », nom donné au triple meurtre d’une famille anglaise survenu durant l’été 1952 dans les Alpes-de-Haute-Provence, demeure encore à ce jour l’une des plus célèbres et des plus mystérieuses affaires criminelles françaises du vingtième siècle. Et pour cause, sans véritable mobile et sans coupable(s) avéré(s), ce terrible crime semble devoir, plus d’un demi-siècle plus tard, rester à jamais irrésolu. Avec une immense minutie, Claude Bernard-Aubert reconstitue ici les principaux évènements de cette affaire, de la découverte de la scène du crime jusqu’au verdict du procès. Avec un grand mérite : celui de replacer constamment les évènements dans leur contexte local (l’omerta général des villageois) et historique, en l’occurrence le climat tendu de l’immédiat après-guerre et les rivalités entre les différentes factions politiques nées de la résistance, période où chacun a pu se procurer des armes. Si le film pointe allègrement les errements et les négligences de l’enquête (scène de crime mal protégée et polluée qui devient vite inexploitable), il met également en évidence le comportement trouble de la famille Dominici et l’étrange jeu de rétractations permanentes auquel ses membres se sont prêtés devant les enquêteurs comme devant les magistrats. Un comportement totalement aberrant, qui expliquera en grande partie l’échec de l’enquête et l’infructuosité du procès. On retiendra surtout de ce film passionnant la qualité générale de l’interprétation (Victor Lanoux, Paul Crochet, ou encore Gérard Depardieu dans un de ses tous premiers rôles) et plus encore celle de Jean Gabin, formidable en patriarche autoritaire et manipulateur, dont le regard plein de défiance semble constamment indiquer qu’il connait la vérité. Seul le laïus final du véritable avocat de Dominici, défendant sa conviction en l’innocence de son client, parait quelque peu hors-sujet. Le résultat n’en demeure pas moins passionnant.
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Le blu-ray : Le film est présenté en version restaurée dans un Master Haute-Définition à partir du négatif original par TF1 avec la participation du CNC, en version originale française (2.0). Des sous-titres français pour malentendants sont également disponibles.
Côté bonus, la collection « La séance » propose un formidable concept : celui de reproduire les conditions d’une véritable séance d’époque. En mode « Séance complète », le film sera ainsi précédé des authentiques actualités Pathé de la semaine de sortie du film ainsi que de publicités et bandes-annonces d’époque, le tout en HD. En mode « film seul », « L’affaire Dominici » se lancera directement.
Edité par Coin de Mire, « L’affaire Dominici » est disponible depuis le 22 mai 2019 dans une très belle édition Digibook limitée à 3000 exemplaires numérotés, comprenant le blu-ray + le DVD du film ainsi qu’un livret reproduisant des documents d’époque (24 pages), 10 reproductions de photos d’exploitation (15,5 x 11,5 cm) et la reproduction de l’affiche d’époque (29 x 23 cm). Un très bel objet qui ravira à coup sûr tous les cinéphiles.
Le site Internet de Coin de Mire est ici.