SYNOPSIS: L'inspecteur Crowe, un homme réputé pour son tempérament et ses interventions musclés, traque Duke, le chef d'un réseau de pédophiles qui pousse des jeunes filles sur le trottoir. Lui-même père d'une adolescente envers qui il est très protecteur, Crowe se jette à corps perdu dans l'affaire d'un riche industriel japonais qui en appelle à son aide lorsque Duke s'en prend à sa fille.
Quand on voit le logo de la Cannon apparaître avant même le début du générique, on sait déjà à quoi s'attendre. Derrière ce nom de studio se cache en réalité une maison légendaire pour tous les amateurs de bis déviants et testostéronés qui firent la gloire des vidéoclubs de quartier. Si l'on devait parler de ses deux dirigeants (les cousins Menahem Golan et Yoram Globus), il faudrait parler non pas de producteurs talentueux et audacieux, mais plutôt de deux gros opportunistes ayant damé le terrain pour les futures exactions des frères Weinstein, à force de racheter de nombreuses licences à succès (histoire de capitaliser à moindre coût sur des franchises connues) et d'enfermer de nombreuses stars badass dans des rôles virils à fort potentiel iconique. Certes moins fragilisé que Chuck Norris, Michael Dudikoff et Jean-Claude Van Damme (et surtout moins porté sur la castagne qu'eux), le grand Charles Bronson se sera tout de même pris la malédiction Cannon en pleine tronche au début des années 80, démarrant par un Death Wish 2 de sinistre mémoire pour ensuite enchaîner les rôles de justicier sans pitié, adepte de l'auto-défense et promoteur réac de la loi du Talion, dans des nanars proto-fascistes qui achèveront de transformer sa fin de carrière en véritable champ de navets.
Casé en bonne place des dernières livraisons de cette période bouseuse, Kinjite, sujet tabou avait d'abord valeur de " testament " : il s'agit en effet de l'ultime film du réalisateur Jack Lee Thompson, vieux briscard du grand cinéma d'exploitation hollywoodien à qui l'on devait - entre autres - Les Canons de Navarone en 1961, Les Nerfs à vif en 1962 (depuis dépassé par le remake surpuissant qu'en aura tiré Martin Scorsese en 1991) et les deux dernières suites de La Planète des Singes. Mais surtout un cinéaste dont la longue collaboration avec Bronson (neuf films, tout de même !) aura permis d'entériner cette image de flic dur à cuire, raciste et sans pitié, dont la gueule burinée et le charisme magnétique n'auront jamais quitté le mythique acteur d' Il était une fois dans l'Ouest. Et même s'il n'atteint pas les sommets du magnifique Death Wish 3 en matière de dérapage facho, d'ultra-violence gratuite et de nettoyage ethnique suintant la pire des xénophobies, Kinjite a pour lui quelques beaux restes, qui en font malgré lui un nanar irresponsable de premier choix. Le scénario, cuisiné et découpé comme un vieux sashimi, vise à relier progressivement deux intrigues distinctes : d'un côté le combat d'un inspecteur vénère ( Bronson, donc) contre un immonde réseau pédophile ; de l'autre, l'arrivée aux Etats-Unis d'un énigmatique salary-man nippon qui agresse un soir la fille de l'inspecteur et voit sa propre fille kidnappée par le fameux réseau. Une intrigue bidon qui oublie vite ses intéressantes pistes narratives (le comportement ambigu d'un flic face à la puberté de sa propre fille, un Japonais déraciné et confronté à une culture US puritaine, etc...) pour s'enfermer dans des scènes ô combien racoleuses.
Il faut bien dire qu'entre ce film et le fameux Hardcore de Paul Schrader, il n'y a pas un fossé, mais carrément le Grand Canyon ! On est ici dans du cinoche bis qui veut capitaliser sur les bas instincts de son audience et surtout pas le faire réfléchir. Et avec un premier degré qui s'assume, la garantie d'un nanar fendard est plus ou moins acquise - c'est un fan de Steven Seagal qui vous le dit ! Or, la rigolade ne nous étouffe pas dans Kinjite. Passe encore le fait de voir Bronson brandir un godemichet pour faire la leçon à un pervers (inutile de vous faire un dessin...) ou en faire baver à un infect proxénète d'enfants en le forçant à avaler sa Rolex (!) avant de le laisser entre les gros bras d'un taulard amateur de mecs (!!!). Pris au dixième degré, tous ces dérapages révélant le fascisme sous-jacent et l'homophobie rance de leurs scénaristes peuvent susciter un fou rire nerveux. Mais ce qui pose problème dans Kinjite tient surtout à son rythme sous Lexomil, à son réalisateur septuagénaire plus à l'aise pour filmer des détails sordides que pour créer une scène d'action intense, et surtout à un papy Bronson qui accuse son âge dans une série de bourres-pifs dignes d'un épisode de Tatort. Le tout prend finalement l'allure d'un Hollywood Night bas du front, du genre à garnir la seconde partie de soirée d'un Ciné Dimanche sur TF1 (c'est d'ailleurs ainsi que votre serviteur a découvert ce film !) avant de sombrer dans l'oubli. Exhumer ces " sujets tabous " du puits à fossiles de vidéoclubs n'est pas ce que l'on pourrait appeler un bel acte d'archéologie, mais nous ramène à une époque où le cinéma d'exploitation avait des couilles... qui puaient quand même pas mal !
Titre Original: KINJITE : FORBIDDEN SUBJECTS
Réalisé par: Jack Lee Thompson
Casting : Charles Bronson, Perry Lopez, Juan Fernández (II) ...
Genre: Action
Sortie le: 26 avril 1989
Distribué par: -
ASSEZ MAUVAIS