Avec Noémie Merlant, Adèle Haenel
Chronique : Film féminin plus que féministe, intelligent, retenu et ample, Portrait de la Jeune Fille en Feu est un geste artistique d’une impressionnante maitrise formelle autant que l’histoire aboutie d’un amour interdit, porté par un vibrant élan romantique.
Et c’est beau. Très beau.
Céline Sciamma prend le temps des regards peu assurés, du trouble qu’ils provoquent et de la crainte de les interpréter pour lentement faire émerger un désir finalement assumé.
Une passion autant intellectuelle que charnelle, l’art, que ce soit la peinture ou la littérature étant le vecteur des sentiments croissants entre les deux héroïnes.
Malgré un style un peu corseté, mais auquel on se fait très vite, les dialogues sont précis, crédibles et riches de sens, mettant en valeur des non-dits tout aussi explicites.
Le huis clos qu’installe la réalisatrice, mais qui s’ouvre cependant par intermittence sur des extérieurs splendides, est un espace de liberté rare et précieux pour y déployer son scénario. Un modèle du genre dans la manière de faire évoluer ses personnages par étape et traiter en fond de la condition féminine (mariage forcé, avortement clandestin, accès interdit à l’art), en éliminant toute figure masculine. Sa direction d’actrice est en ce sens parfaite, Héloïse et Marianne se transforment, s’ouvrent et deviennent de plus en plus lumineuses. Leurs interprètes, Adèle Haenel et Noémie Merlant sont habitées, intenses. Magnifiques.
Si Céline Sciamma a remporté le prix du scénario à Cannes, sa mise en scène aurait tout autant, si ce n’est plus, mérité d’être distinguée.
Chaque cadre est pensé dans l’espace et le temps, conscient de ce qu’il dévoile de ses héroïnes, capturant telle une ultime mise en abîme le rapport de l’artiste et son modèle, le regard que porte la première sur la deuxième, le rapport de force qui évolue et s’inverse.
Sciamma agence les corps pour composer des tableaux vivants, des portraits éloquents et des paysages splendides.
Un moment suspendu, hors du temps.
Synopsis : 1770. Marianne est peintre et doit réaliser le portrait de mariage d’Héloïse, une jeune femme qui vient de quitter le couvent. Héloïse résiste à son destin d’épouse en refusant de poser. Marianne va devoir la peindre en secret. Introduite auprès d’elle en tant que dame de compagnie, elle la regarde