Film événement de ce début du mois d'octobre, Joker décrit la lente plongée d'un clown professionnel, Arthur Fleck (immense Joaquin Phoenix, j'y reviendrai) dans la folie pure. Todd Phillips que l'on connaissait pour ses comédies potaches livre ici un film grandiose, et qui de surcroît est reparti avec le Lion d'Or à la Mostra de Venise 2019.
Précisons-le tout de suite, Joker n'est pas un film qui fait parti du DC Comics. Non, il s'agit d'une histoire originale inédite et inventée de toutes pièces sur l'ennemi juré de Batman. Bien sûr, le réalisateur nous offre quelques passages empruntés aux comics mais il le fait avec parcimonie. Voilà pourquoi, nous y croisons le petit Batman, Bruce Wayne, âgé de dix ans. Pour le reste, c'est un Joker amaigri (Joaquin Phoenix a perdu 23 kilos) et sans fioritures que nous voyons évoluer dans un Gotham à feu et à sang. Oubliez le Joker burlesque interprété par Jack Nicholson ou le Joker franchement dérangeant de Heath Ledger, voici un nouveau Joker au rire sardonique qui vous hantera pendant longtemps ! C'est bien simple, Joaquin Phoenix ne joue pas le Joker, il est le Joker. Complètement habité par son rôle, il clame sa marginalité au monde entier. Et c'est là que le film se fait plus politique, oui, car après (spoilons un peu) avoir tué trois hommes, il devient l'icône des opprimés dans la ville de Gotham.
Joker est alors ce film qui se rapproche des films scorsesiens pour s'en détacher et former une magnifique tragi-comédie sur un anti-héros. Le réalisateur nous donne ainsi à voir un Gotham pourrissant entre métros délabrés, tagués et sacs poubelles dégobillés sur les trottoirs. La mise en scène de Todd Phillips est comme braquée sur le Joker, son rire et la ville en arrière-plan. La musique lancinante et la photographie sale mettent franchement mal à l'aise : le film est pour ainsi dire glauque et par certains aspects malsain dans son traitement des meurtres orchestrés par Fleck.
Bref, Joker est donc ce film qui n'a pas volé son Lion d'Or à la Mostra de Venise tant l'interprétation de Joaquin Phoenix est époustouflante et mérite dare-dare un Oscar ! Le réalisateur a su imposer sa patte dans un univers généralement multicolore. On retiendra en effet la noirceur de ce film avec la violence inhérente au Joker. Outre ce personnage, on notera aussi la présence de Robert de Niro à l'écran comme un clin d'oeil à la filmographie encore une fois de Scorsese avec des films comme La Valse des Pantins ou Taxi Driver rappelant Joker.
En quelques mots : allez voir ce film ! Au pire, il vous angoissera ; au mieux, il vous poursuivra longtemps après la séance tant le tout est réalisé avec maestria.
Je vous assure, c'est pas une mauvaise blague !