SYNOPSIS: Le chaos règne partout dans le pays, depuis la Maison Blanche jusqu'aux petites villes les plus reculées. Nos quatre tueurs doivent désormais affronter de nouvelles races de zombies qui ont évolué en dix ans et une poignée de rescapés humains. Mais ce sont les conflits propres à cette " famille " improvisée qui restent les plus difficiles à gérer...
L'histoire du cinéma a montré à de nombreuses reprises que connaître un grand succès critique et public pour son premier film est certes une chance inestimable donnée à peu de réalisateurs, mais qui n'est pas une garantie quant à la suite de leur carrière, voire peut même se révéler être un poids dont ils ne peuvent se défaire. Ruben Fleischer n'est pas le plus à plaindre et s'il a, de notre point de vue, entamée une lente descente artistique, la qualité de ses films laissant à désirer depuis ( 30 Minutes Maximum, Gangster Squad, Venom), il aura réussi à surfer sur la vague de Zombieland pour obtenir de gros budgets et faire tourner quelques uns des meilleurs acteurs de leur génération (pour ne rien en faire malheureusement): Sean Penn, Ryan Gosling, Josh Brolin, Tom Hardy, Michelle Williams ... S'il n'a jamais cessé de travailler et de bénéficier du soutien de gros studios, nous ne sommes pas seuls à considérer qu'il n'a pas confirmé tout le talent qu'on pouvait lui prêter après avoir réussi à réveiller le genre du film de zombie avec son approche comique, ludique et irrévérencieuse, même si ce cousin américain de Shaun of The Dead était loin de l'égaler et a assurément beaucoup moins bien vieilli.
Une grande partie de la réussite de ce premier opus reposait sur l'effet de surprise d'une première partie extrêmement dynamique, inspirée, portée par un duo d'acteurs au tempérament radicalement opposé ( Woody Harrelson aka Tallahassee et Jesse Eisenberg aka Colombus), mais totalement complémentaire, dans la grande tradition du buddy movie dans lequel l'objectif commun poursuivi va souder deux personnages aux antipodes l'un de l'autre dont l'amitié naitra à l'écran. A l'équation de cet excellent duo, le film ajoutait celui des deux sœurs roublardes ( Emma Stone aka Wichita et Abigail Breslin aka Little Rock), pour le meilleur au début de leur rencontre, puis le pire quand il emmène le film vers un " sentimentalisme " trop artificiel et prévisible. Ces réserves rappelées étaient autant de raisons d'accueillir avec une pointe de perplexité cette suite qu'en une autre époque, moins désespérément obsédée par les reboots et suites, on aurait voulu croire avant tout guidée par la folle envie de chacun de retrouver ces personnages, rendue enfin possible par un scénario inspiré, ne se contentant pas de reproduire les recettes du premier opus. En sortant de la salle, force est de reconnaître que nous sommes surement encore un peu naïfs, nos réserves paraissant à posteriori bien dérisoires. Il faut reconnaître que nous étions loin, très loin d'imaginer qu'un désastre d'une telle ampleur fut possible. Nous craignions une suite décevante et paresseuse et avons finalement subi un film d'une indigence rare, tant au niveau de l'écriture que de la mise en scène, contaminant même jusqu'à son casting.
Il ne s'agit même plus réellement de déplorer tel ou tel défaut et de pointer ici et là ce qui nous semble être raté, lorsque l'on se retrouve devant un film qui donne clairement l'impression de n'en avoir rien à faire de son récit et de ses personnages, manifestement même de ses spectateurs auxquels il donne une bouillie qui a de quoi rester sur l'estomac. Reprendre les ingrédients de base du 1er film sans se soucier à aucun moment de leur dosage, ajouter ici et là des personnages jetables qui ne sont là que pour servir quelques vannes d'une faiblesse qui laisse pantois, Retour à Zombieland coche consciencieusement toutes les cases de la suite purement opportuniste déjà pensée comme le second volet d'une possible franchise dans laquelle les uns viendront se vider la tête et les autres remplir leurs poches. En première ligne de ce désastre, Woody Harrelson qui campait un faux dur très attachant dans le précédent film se retrouve ici à devoir se dépêtrer d'un rôle tellement dégradé, pour ne pas dire dégradant, qu'il symbolise à lui seul tout ce qui s'est perdu et a même, disons le, été massacré dans cette suite. On ne compte pas les scènes où il est obligé de forcer jusqu'au malaise le moindre gag, appuyant déjà lourdement sur des traits de caractère qui faisaient le sel du premier film parce qu'ils étaient infiniment mieux dosés et qu'ils venaient en opposition avec le caractère très introverti et cérébral de son sidekick. De gros dur un peu beauf dont on avait envie de découvrir la personnalité et les failles, Tallahassee est devenu un gros beauf un peu ramolli (les scènes où il joue le papa protecteur avec Little Rock sont un sommet de malaise) qu'on a juste envie de voir défourailler du zombie, seule chose dans laquelle il excelle comme il le dit lui-même.
Les trois autres membres de la bande ne sont pas spécialement mieux lotis. Seul l'alchimie du duo Emma Stone - Jesse Eisenberg sauve un peu les meubles lors de quelques scènes mais globalement chaque acteur donne l'impression de jouer sa partition dans son coin, avec ses quelques scènes pour le mettre un peu en valeur et attacher le spectateur à son personnage, même si dans le cas d' Abigail Breslin c'est peine perdue tant son personnage est creux (alors qu'il est pourtant le moteur de l'intrigue, tout du moins le prétexte à cette nouvelle aventure) et son interprétation cataclysmique. Ainsi ces personnages, la dynamique et l'alchimie de leur groupe qui étaient l'attrait principal de Zombieland se trouvent considérablement affadis, n'ayant plus rien à nous montrer d'eux-mêmes, sinon leurs côtés les plus caricaturaux. Lorsqu'ils sont tous réunis dans des scènes sans action leurs échanges tiennent plus de la sitcom bas de gamme que de la comédie fraiche et enlevée que l'on aura envie de revoir pour retrouver des personnages que l'on aime. Le scénario accumule les fausses bonnes idées, déjà vues ailleurs, comme celle de confronter Tallahassee et Colombus à un autre duo qui leur ressemble en tout point (ce gag repris x fois depuis et jamais égalé vient notamment de l'épisode The Bizarro Jerry de la 5ème saison de Seinfeld). A l'instar de ce duo, les quelques nouveaux personnages introduits dans ce second volet sont avant tout fonctionnels et même jetables quand ils apparaissent et réapparaissent sans réel souci de cohérence.
Le film ouvre une piste qui aurait pu être intéressante en introduisant une caractérisation des zombies qui n'étaient dans le 1er volet qu'une horde homogène de morts-vivants qui pris isolément ne représentaient pas de réel danger, tout du moins pour la bande de Tallahassee. Là encore, il n'y a pas grand chose derrière cette idée dont la durée de vie ne dépasse guère le sympathique prologue présentant les Homer, Hawkin et autres Ninjas, noms donnés à ces nouveaux zombies. Quant au T-800, il est un clin d'œil de plus à ceux déjà très appuyés faits à Terminator et si l'on mesure leur dangerosité quand nos héros en rencontrent un pour la première fois, elle ne fait planer aucune menace tangible quand se déplaçant pourtant alors par centaines, ils sont au centre de la grosse scène d'action finale (laquelle est amenée avec la même incohérence que celle du premier épisode). Le sentiment de décalque et même de simple fan service est trop présent pour qu'on puisse se mettre en mode plaisir coupable au lieu de s'agacer devant l'indigence du spectacle proposé. La mise en scène de Ruben Fleischer est à l'avenant, usant et abusant des effets qui étaient payants il y a 10 ans. Il donne par ailleurs le sentiment de tourner les pages du scénario sans jamais rien incarner à l'écran, jamais poser une seule situation ou enjeu. On finit par se dire qu'un monteur fou est passé derrière lui pour charcuter ses scènes et enlever toute transition quand on se retrouve devant certaines scènes censées alors être émouvantes mais qui ne s'articulent pas avec les précédentes et sont traitées avec un je m'en foutisme sidérant. Pour ne pas trop alourdir cet inventaire à la Prévert de tout ce qui ne fonctionne pas dans cette suite, nous jetterons un voile pudique sur la qualité des effets numériques qui nous incitera à plus d'indulgence devant un épisode des Power Rangers. Ni fait, ni à faire, ce Retour à Zombieland qui annonce clairement une suite, marquera pour nous le terminus des aventures de cette petite troupe pour laquelle nous avions pourtant beaucoup de sympathie il y a 10 ans.