🎬 Réalisateur : James Mangold
🎬 Casting : Christian Bale, Matt Damon, Caitriona Balfe...
🎬 Genre : drame
🎬 Pays : Etats-Unis
🎬 Sortie : 15 novembre 2019 (Etats-Unis), 13 novembre 2019 (France)
Deux ans après avoir illuminé le monde avec son western crépusculaire Logan, qui brigue sans hésitation la place de meilleur film de super-héros de la décennie, James Mangold remet le couvert avec Le Mans 66, biopic (ou presque) sur Carroll Shelby et Ken Miles. Profitant de sa position de réalisateur en vogue à Hollywood, le new-yorkais est allé débaucher Matt Damon et Christian Bale pour tenter de passer la vitesse supérieure et de gagner une place d'honneur en cette fin d'année. Pari réussi ?
On le sait, il est toujours très difficile d'adapter cinématographiquement un événement passé. Doit-on prendre le parti pris de reconstruire la structure du passé pour lui offrir un impact émotionnel optimal, ou doit-on au contraire rendre un copier-coller le plus rigide possible pour rendre une parfaite transmission historique ? James Mangold a choisi, à l'image d'une filmographie jusque là généreuse et riche en émotions, la première option. Si le film s'autorise quelques grosses libertés historiques (que l'on ne détaillera pas ici, par respect pour ceux qui n'ont pas encore vu le film), il n'en reste pas moins que ce choix délibéré sert la vraie volonté du réalisateur : celle de rappeler toute l'étendue humaniste du sport automobile de l'époque. Car c'est là que réside finalement tout l'attrait du film : en décidant non pas d'opposer deux grandes firmes automobiles mais bien deux humains face à une grande puissance, James Mangold ancre son film aussi bien dans l'époque de son histoire que dans la nôtre : le conflit permanent entre passion et pressions, entre humain et argent n'est finalement qu'une transposition du monde dans lequel nous vivons. Cette double visée ne cesse tout du long de servir le film, lui conférant un vrai pouvoir réflectif tout en lui permettant ainsi de poser un décor clair et net, offrant ainsi aux personnages la possibilité d'évoluer à vue pour aller au bout de leurs destinées. Si le film a une durée non négligeable (plus de 2h30 !), il n'en reste pas moins que le rythme scénaristique proposé ici ne relâche pas une seule seconde, offrant moment après moment de quoi construire la légende qui se dresse devant nos yeux.
Ken Miles (Christian Bale) visionnant le tour parfait avec son fils Peter (Noah Jupe).
Mais si la richesse scénaristique de l'oeuvre, bien aidée par les événéments qu'elle décrit, n'explique pas cependant toute la réussite du film. Dans la droite lignée (notamment) de Sylvester Stallone dans Cop Land, Joaquin Phoenix dans Walk the line ou bien Hugh Jackman dans Logan, Mangold confirme encore une fois son formidable talent à diriger ses acteurs : si Christian Bale brille encore une fois par la précision de son jeu, où il s'efface encore une fois pour devenir véritablement Ken Miles, Matt Damon trouve ici son meilleur rôle depuis bien longtemps, sortant de son stéréotype que l'on a trop souvent vu ces derniers années pour nous rappeler au combien son talent est grand. Mais si ces deux stars (auquel on aurait pu rajouter Jon Bernthal si son rôle n'avait pas été aussi famélique) se partagent le devant de la scène, il ne faudrait pas non plus oublier de citer le jeune Noah Jupe, brillant en progéniture de fougueux Ken Miles. Ces remarques sur le casting ne sont d'ailleurs pas sans raison : Le Mans 66 se démarque comme étant avant tout un film de personnages, un film où l'humain tient une place centrale : en cherchant à chaque fois à fuir, parfois même frontalement, les images publiques que ces figures représentent pour se contenter de montrer le privé, Mangold dresse le portrait intime de ces hommes et ces femmes, mettant par la même occasion un gros coup à ces images publiques et imparfaites. En choisissant d'aborder ainsi son récit, Le Mans 66 s'élève au-delà d'une vulgaire page Wikipédia et couronne finalement son intention : Le Mans 66 n'est pas là pour vous raconter ce que vous pouvez déjà savoir ; le film est là pour évoquer ce qui se cache derrière l'histoire.
Ken Miles (Christian Bale) et Carroll Shelby (Matt Damon) face à leurs destins.
Mais, les intentions, aussi louables soient-elles, déserves aussi partiellement l'oeuvre : Le Mans 66 semble se dérouler dans une certaine candeur, une naïveté qui donnerait presque par moments une sensation de factice : les méchants sont très méchants, les gentils très gentils. Le manichéisme parfois latent du film laisse parfois penser que le film perd en puissance, et cela est renforcé par la mise en scène de Mangold qui, si elle met à l'amende bon nombre de productions hollywoodiennes actuelles, semble être réalisés avec le frein un bon nombre de temps, comme si le réalisateur se réservait pour les scènes de course. Et quelles scènes ! Mangold nous offre sur ces moments un travail racé et précis qui nous scotche au siège comme les pilotes dans leurs baquets. L'intensité y est à son comble, magnifiant ainsi tout le reste de l'oeuvre et finissant de nous confirmer que nous sommes là face à une belle réussite de 2019.
Si Le Mans 66 ne fera sûrement pas date dans la filmographie de James Mangold, il n'en reste pas moins que le réalisateur new-yorkais nous a finalement offert une des oeuvres les plus marquantes du cinéma automobile, magnifiant la course et ses acteurs comme trop rarement. Si Mangold offre un pur exercice stylistique, teinté certes de quelques défauts, Le Mans 66 témoigne néanmoins de l'immense passion du bonhomme, pour offrir un immense spectacle à très haute vitesse. A voir !
Note 7,5/10Le Mans 66 ravira aussi bien les fans de sport auto que les cinéphiles. Oeuvre au grand coeur, le film est avant tout porté par son formidable duo Bale/Damon et le travail réussi de Mangold sur les scènes de course. Une belle surprise qu'on vous recommande !