[Y-A-QUOI A LA TELE CETTE SEMAINE ?] : #75. Semaine du 29 décembre 2019 au 4 janvier 2020

Par Fuckcinephiles


Chaque semaine je continue à faire — pour vous — le tour des programmes TV en extirpant de tout cela une offre cinématographique autour de trois œuvres. Mais, je vais aussi vous proposer des contre-programmations ainsi que des secondes parties de soirée pour les cinéphiles insomniaques.

Semaine du 29 Decembre au 4 Janvier

Dimanche 29 Decembre. 

Le Prestige de Christopher Nolan sur Arte.
À la fin du XIXe siècle, Alfred Borden et Robert Angier assistent un magicien pour un tour très dangereux : Julia, l’épouse d’Angier, ligotée dans une cuve remplie d’eau et hermétiquement close, doit se libérer. Un soir, Julia se noie sous les yeux de son mari, Angier accuse Borden de l’avoir attachée avec un nœud inédit.
Dans une temporalité toute Nolanienne — entendait par là que le temps n’est pas linaire, le cinéaste offre un film qui au travers des codes du tour de magie — la Promesse, le Tour et le Prestige — embrasse tout autant le fantastique que le thriller. Telle une poupée russe, l’œuvre n’a de cesse de se laisser découvrir, quand un mystère semble s’éclaircir un autre vient assombrir l’horizon. C’est dans cette structure que réside toute la puissance du film, puisqu’il apporte complexité, richesse et malice à un récit qui, pourront dire certains, est assez simple quand la résolution vient nous happer. Pourtant, comme un gamin devant un tour de magie, on se laisse avoir et on en redemande.

Lundi 30 Decembre. 

Ridicule de Patrice Leconte sur Arte.
En 1780, l’hydrographe Grégoire Ponceludon de Mlavoy, jeune marquis désargenté et candide, veut obtenir de Louis XVI le financement de travaux d’assainissement. Il lui faut s’introduire à Versailles, où il est rapidement pris en main par le marquis de Bellegarde. Celui-ci l’héberge…


À l’aurore des années 90, Patrice Leconte opère un virage dans sa carrière, à partir de Tandem livrer des œuvres à la fois plus ambitieuses et plus personnelles. C’est dans cette période qu’émerge Ridicule, un long-métrage qui demeure comme un sommet, quatre Cesar — dont le meilleur film et meilleur réalisateur, mais également un BAFTA et même une nomination aux Oscars. Film du mot, qui, comme le Cyrano de Depardieu, illustre toute la richesse, la nuance, l’agilité de langue de Moliere. Ridicule est en cela une vraie dentelle linguistique qui décortique avec brio, acidité et cruauté cette société de cour. Mais là où certains n’auraient tiré qu’un objet poussiéreux, Leconte en extirpe un miroir de notre époque, illustrant avec cynisme et un pointe de moquerie a quel point le monde ne change pas. Brillant.
Mais aussi... W9 propose Le Prénom de Alexandre de La Patellière et Matthieu Delaporte. Un huis clos désopilant qui prend des faux-airs de thriller avec sa montée en puissance terminant par une explosion. Peuplé par un sens du dialogue, bouillonnant, ciselé à la perfection, souvent piquant, cynique, voire même teinté de tristesse. Tout cela étant incarné par un casting impeccable qui fait de chaque réplique un véritable match de tennis ou la balle ne touche jamais le sol.
La soirée continue... avec à 22 h 35 Allez coucher ailleurs ! de Howard Hawks sur Arte. Soit, une pure screwball comedy qui se construit sur un running gag qui entraine une succession de hasard tout bonnement hilarant. Si le film n’est pas le plus connu de son réalisateur, il n’en demeure pas moins l’un de ces plus burlesque — avec un Cary Grant travesti — et qui mérite d’être découvert.

Jeudi 2 Janvier. 

Les Lumieres de la ville de Charlie Chaplin sur Arte.
Charlot, un vagabond, achète une rose à une jeune fleuriste aveugle, qui le prend pour un riche prometteur. Peu après, par le plus grand des hasards, il assiste à la tentative de suicide d’un alcoolique et lui sauve la vie. Le suicidaire est en fait un millionnaire qui convie chez lui son sauveur.
Dernier film muet de son auteur, Les Lumieres de la ville est un petit bijou — comme souvent chez Chaplin. Si l’œuvre est sans dialogue, elle n’est pas sans son, Chaplin l’utilise comme un objet de gag et le fait diablement bien. Mais, c’est tout de même l’image qui contient la majorité de l’humour du long-métrage, qui illustre une nouvelle fois la palette burlesque de son auteur qui offre quelques bons exercices pour les zygomatiques. Mais, comme toujours chez le cinéaste, tout cela cache une œuvre sociale, qui s’imbibe d’émotion pour devenir réellement bouleversante, sans jamais tomber dans un quelconque misérabilisme ou pathos. Et si cela ne vous convainc que moyennement, Orson Welles n’a eu de cesse de répéter que Les Lumieres de la ville étaient le plus beau film de tous les temps, de quoi convaincre plus récalcitrant non ?
La soirée se poursuit... avec Le Cirque toujours de Charlie Chaplin, toujours sur Arte. Une œuvre qui repose sur l’éternel même équilibre Chaplinien, le burlesque et le drame, qui ici s’incarne dans cette piste aux étoiles tout autant le décor parfait pour les numéros comiques du réalisateur que pour le drame humain qui s’y joue. C’est donc, encore et toujours, un moment de pur cinéma qu’offre Chaplin et qui mérite comme quasiment l’ensemble de son œuvre d’être intitulé chef d’œuvre.
Thibaut Ciavarella