Trahisons, ruses, mensonges, voilà ce que nous propose Robert Aldrich avec cette oeuvre. Vera Cruz est un western beaucoup trop méconnu alors qu'il a pourtant été un tournant dans la conception des westerns de la décennie suivante. Le tournage s'est effectué dans une grande improvisation malgré un budget de 3 millions de dollars, ce qui n'était pourtant pas négligeable à l'époque. Doté d'un casting attrayant et expérimenté avec Gary Cooper, dans le métier depuis 1925 et Burt Lancaster lui depuis 1946, Vera Cruz ne peut qu'être réussi. Le résultat du box-office parle de lui-même puisque il totalisera plus de 9 millions de dollars de rente. Pourtant lorsque nous parlons de western, il n'est pas le premier qui nous vient à l'esprit.
En effet Gary Cooper, qui joue le rôle de Benjamin Trane, un sudiste qui a tout perdu suite à la guerre de Sécession et Joe Erin, incarné par Burt Lancaster qui est un petit bandit, contredisent l'image traditionnel du cow-boy américain. Ici nos deux protagonistes ne sont qu'attirés par l'argent. Le bien, le mal, la justice et les moeurs ne sont que les derniers de leurs soucis. Deux personnages illustrant à la perfection la nature humaine lorsque celle-ci est corrompu. L'individualisme règne, ils se servent l'un de l'autre afin de mettre à bien leurs interêts personnels. Chacun pour soi.
L'amitié ? Non. L'argent ? Oui. Le charme, la séduction ? Non. L'argent ? Oui. L'égoïsme et la cupidité sont au rendez-vous. Ce western est important car il est le premier à avoir comme héros deux crapules, deux bandits détestables de A à Z. L'argent corrompt. Défendre une grande cause n'est pas dans leur projet et ce film est le précurseur d'un certain genre : le western-spaghetti. Effectivement " l'amitié " qu'entretiennent Joe et Benjamin n'est pas sans nous rappeler celle de Blondin et Tuco dans " Le bon, la brute et le truand ". Mais avant ce dernier, l'adaptation américaine des 7 samouraïs de Kurosawa, c'est-à-dire " Les 7 mercenaires ", s'est largement inspiré de Vera Cruz en 1960.
Joe et Ben.
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Ces crapules, malgré tout, sont charmants et nous éprouvons une certaine compassion envers eux. Ils représentent une certaine liberté. Néanmoins à la fin du film Gary Cooper rejoint le héros traditionnel et le dénouement le replace en tant que défenseur du bien en combattant pour les rebelles mexicains, tandis que durant les trois quarts du film il a servi le roi, avec comme récompense une très grosse somme d'argent. L'humain n'est peut être pas totalement corrompu. Son coéquipier, Joe, utilise le prétexte de s'allier aux rebelles pour s'emparer du trésor.
Toujours fidèle à lui-même il préfère servir ses intérêts personnels, ce qui va lui coûter la vie. Robert Aldrich nous montre que cette éthique de vie ne mène à rien, si ce n'est la mort. Benjamin pleure. L'une des dernières scènes est absolument formidable et très émouvante. Il est le bourreau de son seul " ami ". Son émotion montre qu'il s'est repenti, contrairement à son compère.
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L'aspect purement formel du film est cohérent aux années 50. Quelques plans panoramiques, de nombreux plans moyens et italiens, mise en scène d'un western. Il y a un fait à noter : lorsque Joe ou Ben est dans le cadre, celui-ci est alors en contre-plongée. Cela signifie qu'ils sont puissants, qu'ils ont du pouvoir et que si, par malheur vous êtes confrontés à eux, ils n'auront aucune pitié. Nous sommes impuissants face à ces crapules.
NOTE :
8/10 Malgré une mise en scène connu du public et parfois ennuyante, Robert Aldrich se rattrape en nous proposant deux héros non-conventionnels avec comme fond un contexte mexicain très interessant. Ce western, trop méconnu, mérite de nombreuses louanges et il n'est pas étonnant qu'il soit encensé puisqu'il aura été le précurseur du western-spaghetti. Un film à voir et à revoir. Bande-annonce :