A l'heure du mouvement Black Lives Matter dans le monde et de mouvements sociaux successifs en France, les violences policières ont été encore plus montrées du doigt par les victimes. Il y a quelques jours, Maurice Rajsfus est décédé à 92 ans. Il recensait les bavures et violences policières depuis mai 68. Nous avons ainsi voulu nous pencher sur la représentation de ces violences au cinéma.
La Haine (1995) : S'inspirant de l'affaire Makomé M'Bowolé en 1993, Mathieu Kassovitz livre un manifeste sur la vie et les tensions dans les cités en banlieue. Les violences policières sont le point de départ de la journée que vont vivre les trois personnages principaux. Tout en révélant les incroyables Vincent Cassel, Saïd Taghmaoui et Hubert Koundé, le film marque par sa photographie en noir et blanc, ses dialogues et sa tension permanente. Un film culte qu'on ne présente plus dont l'impact reste toujours aussi indélébile. A voir et à revoir.
Les Misérables (2019) : Pour son premier long-métrage, Ladj Ly explore les rapports complexes aujourd'hui en banlieue entre les adolescents, les adultes et la police, notamment trois agents, tous différents. Les violences policières marquent le début de la fin dans ce digne héritier de La Haine récompensé par 4 César dont celui du Meilleur Film en février dernier. Un film coup de poing à voir absolument.
Detroit (2017) : Après les excellents Démineurs et Zero Dark Thirty, la réalisatrice oscarisée Kathryn Bigelow et son scénariste Mark Boal reviennent avec un grand film sur les émeutes de l'été 1967 à Detroit (qui protestent contre la ségrégation raciale aux États-Unis et la guerre du Vietnam). Le long-métrage se concentre sur l'affaire du motel Algiers, où des policiers vont torturer des clients de l'hôtel jusqu'à l'irréparable. Porté par d'excellents acteurs (notamment l'effrayant Will Poulter et l'incroyable Algee Smith), le film est, comme d'habitude avec la mise en scène de Bigelow, hyperréaliste, dur, et porté par une tension permanente qui vous hantera après le visionnage, tout comme la magnifique chanson du générique de fin It ain't fair du groupe The Roots. Cette affaire étouffée et cette injustice résonnent encore plus aujourd'hui.
Fruitvale Station (2014) : L'histoire est inspirée de faits réels et décrit la dernière journée de Oscar Grant, 22 ans, victime de violences policières le 1er janvier 2009, à San Francisco. Multi-primé, ce premier long-métrage déchirant de Ryan Coogler, futur réalisateur de Creed et de Black Panther, a permis de révéler l'excellent Michael B. Jordan. Il nous rappelle aussi avec douleur l'injustice concernant de nombreuses victimes, et notamment George Floyd aujourd'hui.
Diaz un crime d'état (2012) : 2001, pendant le sommet du G8 à Gênes, des altermondialistes manifestent pacifiquement tandis que des anarchistes du Black Block saccagent la ville. En représailles, 300 policiers lancent un assaut d'une violence extrême. Relatant les événements réels et tragiques de cette dernière journée du G8 en Italie, le long-métrage utilise plusieurs points de vue pour être au plus près de la réalité. Fort et dérangeant, ce film méconnu est à découvrir absolument.
La belle et la meute (2017) : Lors d'une fête étudiante, Mariam est violée par des policiers. En état de choc, elle va devoir mener un véritable parcours du combattant pendant toute une nuit pour prouver que le crime a eu lieu. En 9 plans-séquences intenses et qui font froid dans le dos, la réalisatrice tunisienne Kaouther Ben Hania nous montre la victime se battre après l'horreur qu'elle a subi contre toute une institution pour le respect de ses droits et de sa dignité. Ce grand film féministe est implacable dans sa dénonciation et immense dans sa mise en scène en temps réel. A voir absolument.
Rambo (1982) : Rambo est victime fait ressortir en lui son instinct de survie et son expérience militaire. Loin d'être la caricature qu'on en fait aujourd'hui, le propos du film est assez intelligent, Sylvester Stallone assure et les scènes d'action sont excellentes. John Rambo est un vétéran des Forces Spéciales de la guerre du Vietnam. Il erre de ville en ville depuis son retour aux États-Unis. Quand il essaye de trouver un endroit pour manger dans une bourgade montagneuse de l'Amérique profonde, le shérif l'arrête sans raison (si ce n'est qu'il n'aime pas les vagabonds) et le met en cellule où il est maltraité par les policiers du commissariat. Mais ils ne savent pas à qui ils ont affaire. Premier volet de la célèbre saga, c'est l'un des premiers films à aborder le trouble de stress post-traumatique (" PTSD " ou " post-traumatic stress disorder " en anglais) et le retour des soldats du Vietnam, qui sont ignorés par leur nation et ont parfois de grande difficulté à se réintégrer dans la société. Le long-métrage est sombre, voire désespéré car la bavure policière dont
Le Prix de la loyauté (Pride & Glory, 2008) : Dans la famille Tierney, on est policier de père en fils à la NYPD, la police de New York. Quatre policiers sont tués dans une affaire de stupéfiants. Mais le jeune Ray Tierney découvre que celle-ci est plus complexe qu'elle ne paraît. En plus d'être un drame familial porté par d'excellents acteurs ( Edward Norton, Colin Farrell, Jon Voigt pour ne citer qu'eux), ce long-métrage de Gavin O'Connor ( Warrior) sur la corruption de la police new-yorkaise est un excellent film malheureusement passé inaperçu qu'on vous recommande fortement.
Memories of murder (2003) : Un violeur et tueur en série sévit dans la campagne sud-coréenne dans les années 80. Un policier de Séoul vient aider la police de province, mais leurs méthodes sont expéditives et de moins en moins professionnelles au fur et à mesure que les meurtres continuent. Avant sa Palme d'Or pour Parasite, Bong Joon-ho réalise ce chef d'œuvre inspiré des premiers meurtres en série de l'histoire de la Corée du Sud (dont un dernier rebondissement vient d'avoir lieu fin 2019). Le ton mélangeant les genres, la mise en scène grandiose ainsi que sa photographie et son intensité en font un film inoubliable et une date dans l'histoire du film policier.
L.A. Confidential (1997) : Los Angeles dans les années 1950. Trois policiers très différents vont être amenés à enquêter sur une affaire plus compliquée qu'il n'y paraît. Adaptation remarquable du roman de James Ellroy, cet immense film est un polar vénéneux, usant des codes et des personnages archétypes du film noir pour mieux les détourner. Autour de Guy Pearce, Kevin Spacey, Kim Basinger, James Cromwell et Danny DeVito, Russell Crowe (qui faisait ces débuts à Hollywood) joue un policier rustre et agressif à la fois dans sa vie professionnelle et privée, l'incarnation de la police d'alors avec ses méthodes violentes et expéditives. A voir et à revoir.
The Hate U Give - La haine qu'on donne (2019) : après avoir assistée impuissante au meurtre de son meilleur ami par un policier, une lycéenne afro-américaine fait face à la pression de sa communauté et doit décider entre se taire ou parler. Porté par l'épatante Amandla Stenberg, ce film adapté d'un best-seller décrit avec une grande force émotionnelle les réactions de la communauté noire pour demander justice après une bavure policière. La résonance avec le meurtre de George Floyd et ses conséquences internationales est déconcertante.
Mentions : Do the right thing, Ma 6-T va crack-er, Training Day, Queen & Slim, Kings, Blindspotting, Monsters and Men, Serpico, 3 Billboards les panneaux de la vengeance, Police Fédérale Los Angeles, A.C.A.B. All cops are bastards, French Connection, Leon, 36 quai des orfèvres, L'inspecteur Harry, The Place beyond the pines...
Séries : deux séries françaises : Engrenages, Sur le fil...