[Hors Compétition – Film de clôture]
De quoi ça parle ?
D’une vieille maison hantée par le fantôme d’un petit garçon mort quelques années plus tôt. D’un couple déchiré et d’une nouvelle naissance à venir.
Marco (Stefano Accorsi) et Clara (Maya Sansa) se sont aimés et ont vécu heureux dans une vieille bâtisse vénitienne, mais leur couple n’a pas résisté au décès accidentel de Leo, leur petit garçon de cinq ans. Quelques années plus tard, Marco a refait sa vie avec Anita (Serena Rossi) et il s’apprête à avoir à nouveau un enfant. Mais au moment où il pense enfin aller de l’avant, il reçoit la visite de Perla (Valeria Golino) qui lui explique qu’elle est la propriétaire de son ancienne maison et que celle-ci est “occupée” par la présence de Leo. Le fantôme exige le départ des intrus et le retour de ses parents. Marco, qui ne croit pas aux revenants refuse d’écouter cette histoire, mais Perla insiste et prévient également Clara. Les deux anciens amants vont devoir se retrouver et affronter ensemble la page la plus difficile de leur histoire.
Pourquoi on appelle d’urgence les ghostbusters ?
Sur le papier, Lasciami andare avait de quoi séduire. Son point de départ, tiré du roman “You came back” de Christopher Coak, entrelace un drame familial déchirant, très dans l’air du temps – le deuil d’un enfant faisait partie des grands thèmes de la Mostra cette année –, une histoire de fantômes et un thriller angoissant. Et l’idée de transposer le récit à Venise était particulièrement excitante, car la Cité des Doges avec ses eaux troubles, ses vieux palaces en décomposition, ses ruelles étroites où il est facile de se perdre, ses impasses, ses ponts multiples, possède une aura singulière. Le personnage principal est un ingénieur spécialisé dans la restauration de vieux bâtiments rongés par les eaux. Avant de reconstruire, il doit s’assurer que les fondations sont toujours saines. Il en va de même pour sa vie personnelle. Il doit s’assurer qu’il a bien fait le deuil de Leo avant de devenir père à nouveau.
Un tel sujet, une telle ambiance, aquatique et douloureuse, ne peut que nous rappeler les beaux films qui hantent nos mémoires de cinéphiles, histoires fantastiques qui traitent de fantômes et de deuils impossibles, comme L’Orphelinat ou Vinyan. Et évidemment, vu la trame et le cadre du récit, impossible de ne pas penser au Don’t look now de Nicolas Roeg, dans lequel un couple en deuil était confronté aux apparitions de leur fillette disparue, au détour des ruelles de Venise.
C’est là que ça se complique, de notre point de vue. Car forcément, on ne peut s’empêcher de comparer les deux oeuvres et la balance ne penche pas du tout en faveur du film de Stefano Mordini.
Ici, il n’y a absolument aucune tension, aucun trouble. Juste une ambiance vaguement déprimante. Certes, l’intrigue originelle est plus un drame psychologique explorant le thème du deuil qu’un vrai thriller ou un film purement fantastique, mais l’intrigue imposait quand même de jouer sur tous les tableaux, ce qui n’est pas le cas ici, ou de façon complètement ratée. Le récit manque cruellement de rythme et de souffle. Ses “rebondissements” sont prévisibles du début à la fin et, malgré les efforts des acteurs, on peine à s’attacher aux personnages. La mise en scène, trop illustrative, n’arrive pas à impulser l’énergie qui fait défaut à la narration ou à donner plus d’ampleur à l’oeuvre. Mais là où on en veut vraiment au cinéaste italien, c’est de ne jamais réussir à exploiter le potentiel de son décor pour créer une ambiance mystérieuse, angoissante et funèbre. La ville semble filmée comme une carte postale pour touristes. Pour garantir au film un succès international ? Mais plaira-t-il à un large public? Rien n’est moins sûr…
C’est d’autant plus rageant qu’on sait de quoi Stefano Mordini est capable. Il nous avait fait plutôt bonne impression avec Le Témoin invisible, un thriller modeste, sans prétention, mais plutôt bien ficelé, avec ce qu’il faut de fausses pistes et de rebondissements. On aurait aimé la même chose ici…
Autres avis sur le film
“Ottimo film per una prima televisiva o un sabato sera in multisala meno per la chiusura di un festival nonostante l’ambientazione in laguna. Ha il pregio di riportare al cinema Maya Sansa”
(“C’est plus un téléfilm ou un film du samedi soir qu’un film de clôture pour un grand festival, même s’il a pour cadre la Lagune. Il a toutefois le mérite de faire revenir Maya Sansa au cinéma”)
(@pietropala sur Twitter)
”When the first act of a movie is like this, you know its creativity’s akin to a pack of Pringles”
(Martin Velev sur Letterboxd)
“J’ai trouvé ça plutôt pas mal pour un film italien. Pas un grand film, mais une oeuvre correcte.”
(Un de nos collègues français, plus enthousiaste en sortie de projection)
Crédits photos : Courtesy of Warner Bros / Andrea Pirrello / images fournies par La Biennale di Venezia