C’est quoi votre histoire ?

Par William Potillion @scenarmag

Dans la foulée de notre approche de la pensée d’Alexandra Sokoloff, abordons un point qu’elle juge important et souvent difficile à passer quand votre histoire ressemble à un déferlement de personnages (il faut apprendre à faire l’économie de certains personnages qu’on croyait indispensables mais qui n’offrent qu’en fin de compte qu’une redondance et qui n’ont pas de véritables affections (adfectio en latin, influence) sur les autres personnages), d’idées de scènes, d’images et de bribes de dialogues, il est assez difficile de déterminer avec précision ce qui va lier tout ces éléments dramatiques en un tout, c’est-à-dire au mieux en une histoire.

Un modèle d’histoire avant d’être une structure

Dans un article précédent, Alexandra Sokoloff nous proposait de lister les 10 histoires qui nous touchent le plus. Ce qu’elle suggère maintenant, c’est de déterminer dans ces histoires qui ont su atteindre votre esprit ou votre cœur et souvent les deux, quel modèle chacune de ces histoires emprunte pour se communiquer à vous.

Parce que les différents types d’histoires ont des agencements différents, des configurations très spécifiques pour se dire, pour s’exprimer. Et ces structures ont leurs propres éléments dramatiques uniques (ce n’est pas l’idée qui compte mais ce que vous allez en faire pour qu’elle vous émeut, d’abord vous puis par vous, votre lecteur) et essentiels dont il est incroyablement utile d’être conscient pour pouvoir les utiliser pour vous-même, ajoute Alexandra Sokoloff.

Le type d’une histoire n’est pas son genre non plus. A quel genre appartient Inception, par exemple ? Quelque chose comme un thriller de science-fiction ? Certes, cette histoire possède des traits esthétiques qui la rapproche assez intimement du mouvement futuriste (il faut pleinement accepter ses références ce qui justifie davantage cette notion de lister les choses qui nous touche afin de s’y référer et de se positionner de manière nouvelle face à elles), Inception utilise la technologie du rêve, dit Sokoloff.

Cette histoire a des éléments de thriller et de l’action. Mais ce qui motive vraiment Inception, c’est qu’il s’agit d’une histoire de vol qualifié. Il y est décrit l’effraction de l’intimité des êtres. Ce avec quoi nous sommes souvent en rupture.

Very Bad Trip est une comédie. Plus précisément, cette histoire est un Buddy Movie.

Mais la structure de l’histoire est un mystère dans la pure conduite d’un mystère : le marié a disparu au cours d’une nuit d’enterrement de vie de garçon, et ses amis doivent suivre les indices pour reconstituer ce qu’il s’est passé cette nuit-là et retrouver le marié (avant le mariage !).

L’action de l’histoire consiste à démêler ce mystère pour retrouver le marié. Donc, si vous écrivez une histoire comme Very Bad Trip, Alexandra Sokoloff suggère de s’intéresser à comment les mystères s’assemblent parallèlement aux conventions de la comédie.

Ce que propose Sokoloff, c’est qu’une histoire appartient rarement à un seul genre. Ainsi, s’il est important de connaître la structure générale en trois actes et huit séquences (c’est ce que propose Alexandra Sokoloff), et de connaître les caractéristiques du genre particulier dans lequel vous écrivez, il est parfois encore plus utile d’identifier le type d’histoire que vous écrivez dans ce genre.

On écrit pour un lecteur

Une fois que vous connaissez le type d’histoire que vous écrivez, vous pouvez étudier des exemples de ce modèle d’histoire particulier et avoir une idée des éléments structurels et des astuces narratives communes à ce modèle d’histoire – les scènes clés qu’un lecteur veut et s’attend à voir dans ces histoires.

Une histoire d’identité cachée, par exemple Tootsie, comportera presque toujours la menace d’être découverte trop tôt, un confident qui connaît la vérité, de nombreuses épreuves pour le héros ou l’héroïne, des scènes où le héros ou l’héroïne est pris dans le piège de sa propre imposture, des scènes où le mensonge commence à se retourner contre lui ou elle, et bien sûr, une grande scène de dévoilement, généralement au point culminant de l’acte III, autrement dénommé le climax.

Identifier ces scènes attendues par le lecteur et examiner comment d’autres auteurs les ont traitées est un excellent moyen de réfléchir à des scènes originales et plaisantes de votre cru, affirme Alexandra Sokoloff.

Blake Snyder a identifié 10 modèles, Georges Polti affirmait qu’il existait 36 situations dramatiques. Ces auteurs sont toujours intéressants à lire. En fait, tout ce qui se rapporte à l’écriture de fictions est intéressant à lire, que l’on soit d’accord ou non avec les prétentions de ces différents auteurs. D’ailleurs, nous pouvons aussi en débattre dans le forum (j’en serais vraiment heureux).
L’embarras avec des tentatives comme celles de Snyder, de Polti et même de William Wallace Cook et sa méthode très personnelle et qui se veut pourtant universelle PLOTTO de situations conflictuelles est que ce sont des généralisations.

Et les généralisations ont tendance à corrompre la multiplicité des choses vers une perfection bien illusoire. Alors, Sokoloff revient à son idée de multiplier les genres à la manière par exemple de Harry Potter.

Harry Potter est ce que l’on pourrait appeler une histoire de Roi Arthur – l’Élu sera reconnu (voir aussi Star Wars, Matrix…) mais elle est racontée comme un mystère traditionnel, avec des indices et des fausses pistes et les trois enfants jouant les détectives. Il comporte également de forts éléments de conte de fées. Donc, si vous écrivez une histoire qui combine ces trois types d’histoires (et plus), l’examen d’exemples de ces types d’histoires vous aidera à réfléchir et à structurer votre propre histoire.

Suivez votre intuition

Vous devez créer vos propres définitions des types d’histoires, et trouver vos propres références pour vous aider à apprendre ce qui fonctionne dans ces histoires. Tout ce qui compte dans l’écriture, c’est de créer vos propres règles et d’y croire, affirme Alexandra Sokoloff.

Il ne suffit pas d’identifier les genres. Il ne suffit pas de savoir comment fonctionne la structure générale d’une histoire. Quel est le genre d’histoire que vous écrivez – selon votre propre définition ?

Quand vous commencez à être précis à ce sujet, c’est là que votre écriture commence à devenir vraiment intéressante. Et lorsque vous regardez de bons exemples du type d’histoire que vous écrivez, vous vous retrouvez avec votre propre liste de contrôle des éléments spécifiques de l’histoire, qui va bien plus loin qu’une liste de contrôle générale des éléments ne le pourrait jamais.

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