Synopsis : " Quatre amis décident de mettre en pratique la théorie d'un psychologue norvégien selon laquelle l'homme aurait dès la naissance un déficit d'alcool dans le sang. Avec une rigueur scientifique, chacun relève le défi en espérant tous que leur vie n'en sera que meilleure ! Si dans un premier temps les résultats sont encourageants, la situation devient rapidement hors de contrôle. "
Les lumières de la salle de cinéma s'allument, tu te repositionnes sur ton siège pour avoir fière allure parce que la position "je m'installe comme à la maison" ce n'est pas trop ça, et là, ton ami(e) se retourne vers toi et te pose la question fatidique...
Cinéaste d'origine danoise, Thomas Vinterberg est de ceux dont on aime dire qu'ils sont : prolifiques. Avec un film tous les deux à trois ans, lorsque l'on prend conscience du temps de préproduction, ainsi que de post-production, que ne demande ne serait-ce qu'un long-métrage, difficile de croire que le petit garçon originaire de la ville de Copenhague aurait, ne serait-ce qu'un jour, pensé avoir la chance de pouvoir en faire autant dans sa vie future. Si toutes ses réalisations n'ont pas été des succès, ou, n'ont pas eu le succès escompté, il est aujourd'hui un auteur qui a marqué la mémoire du cinéma et des cinéphiles. Tel Lars Von Trier, ami proche avec lequel (ainsi que deux autres) ils ont fondés le Dogme95, Thomas Vinterberg est un auteur qui puise son inspiration dans les méandres de l'être humain.
Ses œuvres les plus puissantes sont celles qui racontent des histoires dont les personnages moteurs vont être chamboulés par des réactions humaines. Leurs propres réactions suites à des événements vécus ou la réaction des autres. Les autres, l'opinion et/ou le regard des autres sur ce que l'on vis. Là réside le cœur de la fascination que l'on éprouve pour un auteur comme Thomas Vinterberg. Créer des histoires profondes, aux accents psychologiques torturés, mais logiques et compréhensibles, autour de personnages qui ne sont autres que vous et moi. Des personnages qui n'ont aucune caractéristique extraordinaires. Des personnages aux caractères bien tranchés et aux réflexions qui ne cèdent pas au manichéisme, car dans la prolongation de leur mode de pensée. Des personnages qui nous paraissent vrais, crédibles à l'image grâce à une mise en scène qui prend le temps de montrer le personnage dans ses moments de vie. Une caractérisation qui prend de l'ampleur et qui offre aux personnages une belle épaisseur grâce à ces moments de vie, qui racontent énormément en plus de densifier le pouvoir immersif chez le spectateur.
Une mise en scène posée, qui, dans le cas d'un film comme Drunk va réussir à faire comprendre aux spectateurs, par ses mêmes moments de vie, pourquoi les personnages font ces choix. Pourquoi l'alcool ? Qu'est-ce que leur apporte l'alcool et en quoi l'aspect désinhibant est quelque chose d'aussi dangereux qu'important pour une personne en détresse psychologique. Thomas Vinterberg met en scène une œuvre forte, puissante et évocatrice dont le moteur est la désinhibition par l'alcool. Désinhiber pour retrouver l'humain, retrouver cette joie de vivre permise par cet abandon de soit tant désiré intérieurement, mais fondamentalement enfermé par le regard des autres et des règles sociales. Avec Drunk, Thomas Vinterberg raconte une histoire sur la confiance en soit, sur le bien être, et ce, par le prisme de l'alcool. Moteur de cette émancipation, il serait pour le cinéaste, très facile de tomber dans la normalisation de la consommation d'alcool. Ce qu'il ne fait pas grâce à une direction d'acteur incroyable. Et on pèse nos mots. Si, grâce à cette perte volontaire de contrôle permise grâce à l'alcool, le film nous offre de beaux moments de vie et de communion, il suffit d'un plan succinct ou d'une courte séquence (qui va mettre en image un simple regard ou autre choix de mise en scène) pour que surgisse le drame intérieur qui se joue chez nos protagonistes. L'alcool comme moteur d'une prise de conscience, et non, comme nécessité au bonheur.
Une direction d'acteur fabuleuse et une mise en scène au cordeau, auxquels se joint une distribution impeccable. Si Magnus Millang, Thomas Bo Larsen, Lars Ranthe ou encore Maria Bonnevie sont excellents, il n'est sans nul doute que la prestation qui marque est celle du bien connu Mads Mikkelsen. S'il a déjà prouvé par le passé (notamment chez Thomas Vinterberg ou Nicolas Winding Refn) que le talent d'interprète ne se mesure pas uniquement au charisme, il trouve en ce film le personnage idéal afin de parfaire sa filmographie. L'acteur déploie un jeu tout en intériorisation d'une densité incroyable. Réussir à faire paraître en un regard, en un simple détournement de regard ou en un geste, une douleur intériorisée ou la redécouverte d'un plaisir insoupçonné. Une intensité de jeu qui va décupler la force des choix de mise en scène et permettre au film d'être ce drame bouleversant dont les moments de joie et de communion vont donner au sourire la larme à l'œil et le sourire aux lèvres.
Drunk est une œuvre aisément qualifiable comme une représentation du cinéma. C'est une histoire mise en image par des choix de mise en scène qui vont eux même permettre de créer un rythme, une atmosphère, ainsi que de caractériser des personnages. Permettre à un auteur de raconter une histoire et de faire naître des émotions chez les spectateurs. Et ce, porté par des interprètes de talent, eux-mêmes supportés par un Mads Mikkelsen touchant et galvanisant. Drunk est un drame bouleversant qui a la capacité de faire du bien chez le spectateur. Une œuvre incarnée par un auteur (superbement écrite, mise en scène et dirigée), ainsi que par ses comédiens qui vont venir densifier et donner du corps à cette histoire. Une œuvre complète : drôle, attachante et bouleversante.
Dès le 14 octobre 2020 dans les salles de cinéma françaises.
" Par sa mise en scène délicate, Thomas Vinterberg s'efface au profit de ses personnages. Hymne à la vie. Grande et belle histoire d'amitié, d'abandon et de courage. Mads Mikkelsen est bouleversant, galvanisant. "