[SƎANCES FANTASTIQUES] : #38. Prince of Darkness

Par Fuckcinephiles

Copyright Splendor Films


Parce que les (géniales) sections #TouchePasAMes80s et #TouchePasNonPlusAMes90s, sont un peu trop restreintes pour laisser exploser notre amour du cinéma de genre, la Fucking Team se lance dans une nouvelle aventure : #SectionsFantastiques, ou l'on pourra autant traiter des chefs-d'œuvres de la Hammer que des pépites du cinéma bis transalpin, en passant par les slashers des 70's/80's ; mais surtout montrer un brin la richesse d'un cinéma fantastique aussi abondant qu'il est passionnant à décortiquer. Bref, veillez à ce que les lumières soient éteintes, qu'un monstre soit bien caché sous vos fauteuils/lits et laissez-vous embarquer par la lecture nos billets !

#38. Prince des Ténèbres de John Carpenter (1987)
Au-delà du plaisir incommensurable de pouvoir redécouvrir encore et encore, pour tout môme des 80's/90's ayant grandi avec la VHS (puis le DVD, dans des éditions pas toujours défendables), l'un des monuments du cinéma béni de John Carpenter - et encore plus, un n'étant pas encore passé par la moulinette du remake infâme -, il y a aussi et surtout un sévère pincement au coeur d'y revoir le légendaire Donald Pleasance, ami et acteur fétiche du big John, qui lui a offert quelques-uns de ses plus beaux rôles.
Échaudé par l'échec injuste des Aventures de Jack Burton dans les griffes du Mandarin, et résolument plein d'amertume, le John, bien décidé à ne plus s'aventurer dans les méandres du divertissement populaire, va dès Prince of Darkness, se lancer dans la mission folle d'imprimer sur la pellicule, sa vision nihiliste - donc infiniment juste - de l'humanité.
Pierre centrale férocement Lovecraftienne de sa trilogie de l'apocalypse avec ses deux autres bijoux The Thing et L'antre de la Folie, révérence totalement assumé à la Hammer dans son mélange entre science-fiction et fantastique (jusque dans le fait que Carpenter se crédite en tant Martin Quatermass au scénario), le film croque une horreur presque expérimentale, ou il fait s'épouser le mysticisme religieux et l'occultisme pour qu'ils accouchent d'une menace aussi implacable qu'indicible, un mal inconnu qui questionne pourtant férocement la place de la foi, de l'humanité et même de la métaphysique dans une société supposément éclairée - mais en réalité totalement égoïste et refermée sur elle-même.

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Une terreur angoissante, puisqu'elle ébranlera les croyances autant de ses protagonistes (hommes de foi compris) que de son auditoire, et totalement cristallisée au coeur d'une ambiance crépusculaire et anxiogène (appuyée par un score oppressant du Big John), ou le malaise est à chaque recoin du cadre, et où rien ne peut survivre, pas même l'amour ni la foi.
Désespéré, faisant continuellement fit de ses moyens limités (ce qui renforce de facto, la puissance de son huis clos), grâce à une mise en scène ample et un script millimétré, qui saura nous glacer le sang jusque dans son final dantesque (soudain mais surtout mémorable); Prince of Darkness est un Carpenter majeur, violent (psychologiquement et frontalement, avec quelques scènes gores prenantes), personnel et puissant.
Une dissection anti-spectaculaire et nihiliste d'un monde contemporain à l'agonie, façon huis clos tendu et satanique, ou il confronte science et religion sous l'ombre imposante des ténèbres.
Qu'on se le dise, le mal est (vraiment) partout.
Jonathan Chevrier