De quoi ça parle ?
D’un couple libre, Bella et Andreas (joués par les réalisateurs Saskia et Ralf Walker), qui aime s’encanailler avec d’autres amants, en occurrence le même, Daniel (Devid Striesow). Et de leur fils, Kostja qui, du haut de ses quinze ans, se pose aussi plein de question sur le couple et les catégories de relations amoureuses, de la liaison factice, que l’on entretient pour être populaire, au grand Amour.
Pourquoi on n’atteint pas l’extase ?
Le point de vue n’est pas inintéressant en soi. A travers le triangle amoureux formé par Bella, Andreas et Daniel, les cinéastes semblent prôner l’amour libre pour atteindre une forme de complétude et d’équilibre personnelle. En tout cas, leurs personnages trouvent dans ce dispositif une sorte de plénitude.
Bella fricote avec Daniel, puis Andreas fait avec ce dernier une partie de lutte plus grecque que romaine, et finalement, le couple se retrouve plus soudé que jamais. Andreas revient apaisé auprès de Bella, qu’il considère comme son âme-soeur, la seule capable de le supporter au jour le jour.
Le problème, c’est que cette démonstration tient en trois ou quatre scènes qui, même étirées, ne suffisent pas à tenir la durée d’un long-métrage.
Alors les cinéastes ajoutent le point de vue du fils du couple, un adolescent qui n’ose pas déclarer sa flamme à l’une de ses camarades et demande conseil à sa meilleure amie, dont on devine aisément qu’elle est amoureuse de lui. L’idée aurait été excellente si Saskia et Ralf Walker avaient cherché à alterner les ébats assez crus des adultes et les marivaudages innocents des adolescents. Hélas, le personnage de Kostja est un peu sacrifié. Il n’intervient qu’un peu au début du récit, et en toute fin de film, pour laisser place à des scènes assez étranges, dont on peine à comprendre la signification profonde et qui ne semblent pas avoir grand chose à voir avec la choucroute…
On se demande même avec appréhension vers quoi le film va bien pouvoir évoluer.
Car après une scène de lit où Bella et Daniel rejouent la scène du frigo de Neuf semaines et demie, en version germanique, avec du saumon, du radis et un concombre, ils retrouvent Andreas, également très émoustillé par Daniel, et partent pour une promenade en forêt. Là, ils manquent de peu de se faire canarder par la propriétaire du domaine, la comtesse Charlotte, en pleine chasse au sanglier. Pour se faire pardonner, cette dernière les invite à dîner. Il y aura évidemment au menu l’infortuné suidé, qu’elle étripe sur place avant de le charger dans son pick-up.
Pendant que le trio fait cuire le sanglier au barbecue, un vieil ermite, nu comme un ver, se roule dans les tripes fumantes de l’animal. Il s’invitera finalement au diner de la comtesse. Tout comme un voisin, venu accompagné de… son cheval.
Peut-être qu’on a l’esprit mal tourné, mais à ce stade du film, on craint que la soirée se termine en orgie caligulesque. Le trio d’invités principaux a une libido débordante, les deux autres convives ont l’air parfaitement azimutés et leur hôtesse semble assez disposée à se “prendre une cartouche”. Si elle a organisé ce dîner-cochon (pardon, sanglier), ce n’est pas par amour du barbecue – elle est végétarienne – mais par envie de partager une soirée au coin du feu avec hommes et bêtes. Et on ne parle même pas du cheval, bête vigoureuse à laquelle son propriétaire semble très attaché…
Mais en fait, il ne se passera rien de très immoral. Juste une indigestion de sanglier ou un abus de vin… Ouf! Ou peut-être dommage, diront certains… Car quel intérêt de mettre en place ces scènes bizarres pour ne rien en faire – à cheval –, quelle plus-value pour le propos du film?
Vouloir faire un film libre sur l’amour libre, pourquoi pas. Mais film libre, ne veut pas dire sans queue ni tête, hum… reformulons… Mais film libre ne veut pas dire incompréhensible et accumulant les scènes pseudo-psychanalytiques qui tournent au n’importe quoi.
A l’arrivée, le message des cinéastes sur les vertus du ménage à trois est bien reçu, qu’on y adhère ou non, mais la traversée du film s’avère relativement pénible.
Autres avis sur le film
”Der Film möchte gern in die Fußstapfen von Tom Tykwers « Drei » treten, scheitert aber phänomenal. Schade.”
(“Le film veut suivre les traces de “Trois” de Tom Tykwer, mais il échoue de manière phénoménale. C’est dommage.”)
(Mélanie sur Letterboxd)
Crédits photos : © déjà vu film