Lancé depuis des années dans une collection de comédies populaires à succès, le duo Jean-Marie Poiré et Christian Clavier poursuivent leur collaboration après "Le Père Noël est une Ordure" (1982), "Papy fait de la Résistance" (1983), "Twist Again à Moscou" (1986) et "Mes Meilleurs Copains" (1988). On constate que la qualité des films semblent s'araser au fur et à mesure que l'équipe du Splendid se disperse, ainsi le financement sera plus difficile qu'à l'accoutumé suite à la déception de leur dernier film. Le duo Poiré-Clavier co-signe donc une nouvelle fois le scénario, le premier toujours à la réalisation et le second assurant un des premiers rôles... Squale est le nom de code d'un espion français de la DGSE qui décide de manipuler un citoyen lambda pour atteindre un trafiquant d'armes qui serait sous statut diplomatique. Mais la DST sont en embuscade et sa conjointe va s'avérer un grain de sable inattendu...
Logiquement Christian Clavier s'octroie donc le rôle du pauvre bougre au centre de la manipulation, un psychologue nommé Granianski. Le Squale a d'abord été proposé à Gérard Depardieu qui déclina pour cause de planning incompatible (il se rattrapera avec "Les Anges Gardiens" en 1996) et c'est Marie-Anne Chazel, memebre du Splendid et alors compagne de Clavier qui émet l'idée d'un certain Jean Reno qui s'est fait particulièrement remarqué peu de temps avant avec "Le Grand Bleu" (1988) et "Nikita" (1990) tous deux de Luc Besson. Madame Granianski est incarnée par une débutante, Valérie Lemercier, qui a déjà joué deux petits rôles dans "Milou en Mai" (1990) de Louis Malle et "Après Après-Demain" (1990) de Gérard Frot-Coutaz et qui vient surtout de cartonner avec son premier one woman show pour lequel elle obtient un Molière cette même année 1990. Madame Squale est interprétée par une autre débutante choisit parmi de nombreuses candidates, Isabelle Renauld qui après quelques films obtient là son premier rôle important avant d'apparaître entre autre dans "L'Eternité et Un Jour" (1998) de Theo Angelopoulos et "Les Blessures Assassines" (2000) de Jean-Pierre Denis. Enfin, on peut citer l'excellent Jacques François qui a été de toutes les aventures du duo Poiré-Clavier. À noter que la musique est signée de Eric Lévi, futur fondateur du groupe Era, et qui rejoindra l'équipe du futur "Les Visiteurs" (1993)... Dans le genre, l'histoire nous fait forcément un peu penser on pense évidemment un peu à "Le Grand Blond avec une Chaussure Noire" (1972) de Yves Robert. La grande différence se joue essentiellement sur la subtilité des dialogues, l'humour moins bulldozer et un énorme décalage de classe au casting. D'abord, d'ores et déjà on est aveuglé par ce spot publicitaire qui ne dit pas son nom à la gloire de la gamme de voiture de marque Citroën, omniprésente à croire qu'elle est la seule et unique marque mondiale ! Détail sans doute, mais un détail qui parasite l'intérêt à chaque instant. Le début est un peu laborieux notamment sur la crédibilité du monde des services secrets mais l'intrigue autour du couple du Squale est prometteur. L'entrée en scène du psy Gardianski /Clavier tarde un peu également. Mais le rythme est bon et on se laisse entraîner dans l'aventure rocambolesque de cette mission d'espionnage plutôt inspirée à défaut d'être toujours réussie !
Les séquences d'action sont d'une réussite plutôt aléatoire, ne sachant jamais vraiment s'il faut oser le burlesque ou assurer un minimum de réalisme. Néanmoins, précisons que Jean Reno a assumer plusieurs cascades lui-même comme conduire la voiture à grande vitesse sur l'autoroute avec comme résultat une frayeur de Clavier qui est réelle. Cette parodie de film d'espionnage s'avère tout de même bien vue, le scénario qui mêle espionnage et vaudeville reste divertissante à défaut de convaincre pleinement. D'abord il y a de nombreuses incohérences et/ou faux raccords comme la découpe du coffre de la voiture, Garbianski qui hèle le vrai nom du Squale alors qu'il ne peut le savoir à cet instant, on peut rappeler que le Sentier Lumineux est péruvien, on remarque des indications de tournage qui apparaissent à mauvais escient, mais tout ceci restent de petits détails. Le plus gênant, c'est quand le Squale/Reno ne reconnaît même pas le corps nu de son épouse, sans même au moins se douter alors qu'elle est également une collègue et donc susceptible d'avoir à assumer ce genre de mission. Dommage, car le gros point fort du film réside justement dans ce jeu du chat et de la souris entre le Squale et sa conjointe, puis ensuite dans la gestion pro-intime du pot-aux -roses. La partie la plus hilarante reste assurément les minutes de l'adultère en flagrant délit, avec un Jean Reno cartoonesque et une Isabelle Renauld fatale à souhait. D'ailleurs, niveau acting, Clavier vire sur ce film vers le surjeu horripilant qui va devenir sa marque de fabrique, Jacques François toujours aussi mémorable, Lemercier qui semble un peu bridée et une mention spéciale à la méconnue Muriel Rufel en agent un peu enrobée fan du Squale, tandis que le duo Reno-Clavier se cherche encore un peu. Malheureusement,le film pêche surtout par des dialogues trop insipides, sans punchline, sans inspiration qui ne permettent pas aux personnages de vraiment s'épanouir. La partie la plus râtée demeure la fin sur sa partie dénouement d'enquête, trop précipitée et trop invraisemblable occultant notamment toute la dimension géo-politique et diplomatique. En conclusion, le duo Poiré-Clavier signe une comédie franchouillarde qui ne manque d'idées mais pas toujours bien exploitées, néanmoins Reno est espion cocu avec une femme espionne séduisante assure le spectacle pour une comédie familiale qu'on pourrait qualifier "de base". En tous cas, l'équipe se cherche pour mieux se retrouver dans un prochain film qui marquera plus son temps, "Les Visiteurs" (1993) où on retrouvera le gros du casting.
Note :
Pour info bonus, Note de mon fils de 11 ans :