(Critique - avec spoilers - de la saison 1)
Si la série en tant que tel n'aurait sans doute pas attirer plus que de raison notre attention, force est d'avouer qu'un show visant à les origines, l'utilisation de la culture pop, la science et l'impact culturel des mots maudits et - surtout - vulgaires (grâce à des entretiens avec des experts en étymologie, de la culture pop, des historiens et des artistes), avec Nicolas " Fucking " Cage en host de luxe et résolument on fire; ça attire son cinéphile, et encore plus son amoureux de l'éternel Castor Troy.
Il faut dire, mirer le bonhomme dégainer des monologues savoureusement volubiles et imprévisibles avec un sérieux des plus solennel, avant de les terminer dans un frisson excitant avec des mots tels que " Fuck " ou " Pussy ", c'est un petit bonheur qui, en ces temps moroses, se doit d'être apprécier à sa juste valeur.
Il n'y a vraiment aucun orateur public plus captivant que Cage, que ce soit le génie décrié ou le comédien fou et démesurément théâtrale, un performeur presque mystique au magnétisme chamanique qui rend la moindre de ses performances étrangement captivante, et encore plus ici.
Copyright Adam Rose/Netflix
Il nous jette littéralement un sort avec les phrases les plus banales qui soit, et peut transformer un cri de quatre lettres hurlé vers le ciel en un air obscène qui sonne amoureusement dans nos écoutilles, comme une symphonie majestueuse.
Impossible donc de concocter sérieusement une mini-série sur le phénomène complexe des jurons, à la fois sur leur histoire académique digne que leur statut moderne régressif et interdit, sans lui, à tel point que le show lui-même paraît cruellement fade quand il n'est pas à l'écran.
Malgré de courtes apparitions (réservés aux introductions et aux conclusions), il apporte plus de gravité et de prestance que ce que le projet aurait pu espérer, sa narration ludique boostant des vignettes youtubesques d'une vingtaine de minutes, divertissantes et didactiques autant qu'elles pourront paraître à certains inégales voire peu essentielles.
Ces exégèses sur les origines et l’évolution de la signification des mots les plus vilains/vulgaires de la langue anglaise sont aussi amusantes (même certaines tentatives humoristiques tombent à plat) qu'édifiantes mais seulement par à-coups, et ce malgré une durée pourtant fortement rétrécie et vraie volonté d'informer/instruire son spectateur.
Chaque épisode offre un regard sous tous les angles sur un éventail de blasphèmes dans un ton bienveillant et légèrement irrévérencieux, axé sur le plaisir simple et immédiat d'user des mots " interdits " avec une légitimité fugace, mais au final réellement pertinent que lorsque les excellents sketches animés et un brin spirituels, illustrent les différentes étymologies.
Copyright Adam Rose/Netflix
Entre témoignages un brin insignifiant et vrais exposés carrés, tentant de draguer tous les publics avec une familiarité certaine (ce qu'il n'arrive jamais vraiment au fond) mais un regard scientifiquement lâche (parce que jamais totalement rythmé), History Of Swear Words semble tout du long le cul coincé entre deux sièges à l'ampleur mesurée même si ses intentions, allant plus loin que le simple show fait pour buzzé, est souvent perceptible notamment quand il laisse la grâce de Cage rendre crédible cette entreprise au demeurant plus qu'intéressante même si formellement bancale.
Il est le moteur d'une poésie lyrique improbable au coeur de la vulgarité, un maestro rendant subtile ce qui ne l'est pas, et clairement LA raison pour laquelle la mini-série mérite son pesant de pop-corn.
On t'aime Nic, vraiment.
Jonathan Chevrier