Acid House (2000) de Paul McGuigan

Par Seleniecinema @SelenieCinema

Premier long métrage déjanté et audacieux du réalisateur Paul McGuigan qui se fera doucement un nom avec des films plus consensuels comme "Rencontre à Wicker Park" (2004), "Slevin" (2006), "Push" (2009) ou encore "Docteur Frankenstein" (2015). Pour son premier projet il met en scène le recueil de nouvelles éponyme (1994) d'un certain Irvine Welsh, ce dernier étant devenu une icône après le succès de son livre et de son adaptation "Trainspotting" (1996) de Danny Boyle. L'avantage est que le cinéaste a pour scénariste l'auteur lui-même, Irvine Welsh assurant le travail d'écriture jusqu'au bout. On ne peut que penser que le succès de "Trainspotting" a sans aucun doute pousser à explorer un peu plus l'univers de l'auteur, en témoigne par ailleurs certaines thématiques et la présence de quelques acteurs en commun. Le film réunit trois segments distincts, intitulés "The Granton Star Case", "The Acid House", "A Soft Touch"... Le premier segment voit un jeune homme surnommé Boab transformé en mouche par Dieu lui-même pour le punir de son existence indigne, Boab va alors se venger de ses proches à sa façon. Le second segment est l'histoire d'un couple de parents, lui accepte un mariage alors qu'elle est sans doute une simple salope, ce qui va se confirmer voir même qu'il va devoir ouvrir les yeux sur les capacités de prostituée de son épouse le tout sous effets stupéfiants et éthyliques. Puis enfin, le troisième segment voit un junkie partir en overdose jusqu'à ce que durant un orage son esprit s'inverse avec celui d'un nouveau-né avec échange de corps en prime !...

On constate donc au casting la présence de deux acteurs déjà présents dans "Trainspotting", Ewen Bremner alias Spud qui reviendra dans la suite "Trainspotting 2" (2017), acteur qu'on voit aussi dans "Snatch" (2000) de Guy Ritchie et "My Name is Hallam Foe" (2008) de David Mackenzie, il retrouve dans un segment différent Kevin McKidd vu dans "Small Faces" (1995) de Gillies MacKinnon et qui deviendra populaire avec la série TV "Grey's Anatomy" (2008-...). Parmi les plus connus citons Jemma Redgrave (dynastie Redgrave, fille de , nièce de... etc...) vue dans "Retour à Howard Ends" (1992) de James Ivory et récemment dans "Love and Friendship" (2016) de Whit Stillman, Maurice Roëves connu pour avoir été le colonel Munro dans "Le Dernier des Mohicans" (1992) de Michael Mann et qui retrouvera Ewen Bremner dans "My Name is Hallam Foe", et Stephen McCole pour qui l'année 1998 fût celle de la révélation après des films comme "Rushmore" (1998) de Wes Anderson et "Orphans" (1998) de et avec Peter Mullan qu'il retrouvera par ailleurs dans "My Name is Joe" (2012) de Ken Loach. Citons encore Garry Sweeney qui retrouve Kevin McKidd après "Small Faces" (1995) de Gillies MacKinnon, Arlene Cockburn vue dans "L'Invitée de l'Hiver" (1998) de et avec Alan Rickman, Stewart Preston vu dans "Carla's Song" (1996) de Ken Loach, Martin Clunes vu dans "Shakespeare in Love" (1998) de John Madden et "Saving Grace" (2000) de Nigel Cole, avant d'obtenir un rôle principal dans la série TV "Doc Martin" (2004-...), puis Gary McCormack vu dans "Sweet Sixteen" (2002) de Ken Loach et "Le Guerrier Silencieux" (2009) de Nicolas Winding Refn... Rappelons que Irvine Welsh a écrit son recueil "The Acid House" comme des histoires contextuelles à "Trainspotting", on y retrouve donc les bas-fonds de Edimbourg, l'accent écossais à couper au couteau, le sravages de la drogue et de l'alcool, la misère sociale, mais aussi une certaine idée de la fête, du dilettantisme, du rapport au travail... etc... Mais si la comparaison s'avère automatique tant les deux oeuvres sont liées, on constate que nous avons aussi là l'exemple parfait pour une thèse sur le travail d'adaptation. D'abord et avant tout "Trainspotting" raconte une vraie histoire, avec ses personnages, intrigue, un propos de fond, une évolution notable aussi bien des personnages que de l'histoire... etc...

Alors qu'on constate que "Acid House" est plutôt dénué d'intérêt, que tout semble un peu vain car la vulgarité n'amène à rien d'autre qu'à plus de vulgarité encore avec donc cette gratuité qui empêche toute réflexion. Provoc sans aucun doute, mais à quoi cela sert-il quand cela mène nulle part ?! Ainsi Dieu qui est un être aussi abject que les autres personnages punit un jeune branleur à cause de sa vie sans intérêt, un couple qui se hait (ou qui s'aime pour de mauvaises raisons, ou qui croit s'aimer ?!) vit dans un quotidien crades à tous points de vue où notre seul pensée est de se dire pauvre gosse (!), et enfin ce dernier récit qui reste le plus amusant mais qui ne mène nulle part puisque sans morale. Trois récits donc qui ne sont reliés par aucune réelle thématique, un premier genre "rape and revenge" avec sa dose de fantastique qui pourrait être le cauchemar sous mauvais trip stupéfiant, un second qui serait dans une sorte de réalisme social façon Ken Loach en burn-out, un troisième façon "Allo Maman ici Bébé" (1989) de Amy Heckerling sous acide. On reste perplexe, surtout au début avec un premier segment franchement hideux sur le fond comme sur la forme voir même nauséabond. Le second est presque trop sérieux dans sa dramaturgie comparé au deux autres et semblent alors hors sujet, tandis que le troisième est sans doute le plus drôle même si on a bien du mal à en rire. En conclusion on peut sans mal affirmer que ce film est une expérience à tous les niveaux, qu'il risque sans mal d'en choquer certains, de laisser d'autres dans une sorte de léthargie devant tant de vulgarité, mais on ne peut nier le potentiel et certaines idées qui auraient sans doute mener vers un film d'une autre ampleur avec un scénariste plus "cinématographique" avec une vue d'ensemble, avec un fil conducteur entre les segments plus probants. Après "Trainspotting", citons aussi le chef d'oeuvre "Requiem for a Dream" (2000) de Darren Aronofsky, ce film ne peut malheureusement qu'être anecdotique.