Mais Où est donc passée la Septième Compagnie ? (1973) de Robert Lamoureux

Par Seleniecinema @SelenieCinema

Premier film d'une trilogie qui surfe sur une sous-genre en soit, un sous-genre franchouillard qui parsème le cinéma hexagonal régulièrement de de "Les Gaietés de l'Escadron" (1932) de Maurice Tourneur à "La Folle Histoire de Max et Léon" (2016) de Jonathan Barré en passant par les cultes "la Grande Vadrouille" (1966) de Gérard Oury et "Papy fait de la Résistance" (1984) de Jean-Marie Poiré. Le général en chef de cette aventure est Robert Lamoureux qui avait connu une période faste dans les années 50 dans des comédies vaudevillesques inspirées de ses propres numéros de cabaret avec le dyptique "Papa, Maman, la Bonne et Moi" (1954) et "Papa, Maman, ma Femme et Moi" (1956) tous deux de Jean-Paul le Chanois, mais aussi en offrant sa gouaille dans le rôle titre de "Les Aventures d'Arsène Lupin" (1957) de Jacques Becker suivi de "Signé Arsène Lupin" (1959) de Yves Robert. Il était ensuite passé derrière la caméra en adaptant ses pièces "Ravissante" (1960) et "La Brune que Voilà" (1960) avant de retourner sur les planches durant de longues années. Il faut donc attendre une douzaine d'années avant que l'artiste ne revienne sur grand écran avec cette aventure qui s'inspire plus ou moins de son expérience personnelle lors de la débâcle de 1940... Alors que la Wermacht est en train d'envahir la France au printemps 1940, la 7ème Compagnie se réfugie dans les bois mais est faite prisonnier à l'exception de trois hommes : les soldats Tassin et Pithivier, puis leur sergent-chef Chaudard. Alors que les trois soldats semblent s'accommoder de cette "retraite obligatoire" la guerre va les rattraper à l'insu de leur plein gré, surtout lorsqu'il croise bien malgré eux un officier français...

Pour ces trois trublions guerriers Lamoureux à fait appel à des acteurs populaires dans la grande tradition française avec Pierre Mondy vu auparavant dans des films comme "Ni Vu Ni Connu" (1958) de Yves Robert, "Austerlitz" (1960) de et "Compartiments Tueurs" (1965) de Costa Gravas, retrouvant donc après ce dernier son partenaire Jean Lefebvre remarqué dans bon nombre de comédies cultes dont "Les Tontons Flingueurs" (1963) de Georges Lautner et "Le Gendarme de Saint-Tropez" (1964) de Jean Girault, puis Aldo Maccione, alors en pleine ascension au cinéma après "Le Voyou" (1970) et "L'Aventure c'est l'Aventure" (1972) tous deux de Claude Lelouch mais qui connaîtra son apogée dans les années 80 notamment avec "Tais-Toi quand tu Parles" (1981) et "Plus Beau que Moi tu Meurs" (1982) tous deux de Philippe Clair. Le réalisateur-scénariste Robert Lamoureux s'octroie un petit rôle, son épouse Magali de Vendeuil également, puis citons Jacques Marin connu comme épicier dans "Jeux Interdits" (1952) de René Clément mais aussi pour avoir été partenaire de son ami dans pas moins de 18 films (!), et n'oublions pas une des plus grandes "gueules" du ciné français Robert Dalban qui retrouve Jean Lefebvre après "Les Tontons Flingueurs". Au casting on reconnaîtra bon nombre de seconds et troisièmes rôles récurrents du cinéma français avec pêle-mêle Pierre Tornade, Alain Doutey, Florence Blot, Pierre Mirat, Rudy Lenoir, Paul Bisciglia, Raymonde Vattier, Paul Mercey... Le film débute un peu comme on pourrait s'imaginer une débâcle telle qu'elle ne peut que faire rire ! Si la tragédie de l'époque est certaine, en rire est depuis une auto-thérapie qui a déjà fait ses preuves. Si on fait la connaissance assez vite de nos trois pieds nickelés on s'aperçoit assez vite que le reste de la 7ème Compagnie n'est pas franchement mieux lotie. Sans doute peut-on s'en consoler (?!). Néanmoins, si on pense d'emblée à de la lâcheté, on prend vite partie pour leur humanité et leur joie de vivre et soudain on se prend à penser que ces trois larrons ont sans doute bien raison de profiter de leurs instants champêtres.

Une première partie dans les bois aussi touchante que drôle avec une première scène cultissime ("Un p'tit baib pour le chef !", "qu'est-ce que vous nagez bien chef !"...). Mais heureusement, nos trois lascars croisent un officier qui est assez malin pour ne pas se laisser endormir par ses trois soldats qui ne pensaient pas se retrouver aussi vite embrigadés. La guerre reprend, de façon furtive ("J'ai glissé chef !" à "Vous afez du à l'ail ?!") en passant par l'action ("la t'naille !"), des efforts de guerre qui auront des conséquences ("qu'est-ce que je vais dire à Paulette ?"). Le rythme est bien géré, sans être hilarant les gags sont semés comme du papier à musique et la mission reste toujours un fil rouge qui permet tous les rebondissements nécessaires. Pour les pointilleux on constate pas mal d'anachronismes, surtout techniques (fusils du film datent de 47 et non pas de 38, la ligne stop au sol n'existait pas en 40...) mais cela reste des détails insignifiants au vu du film et de son but premier. On est plus gêné par une question d'arithmétique, où comment une erreur de dates prouverait que Tassin/Lefebvre aurait 27 ans en 1940 (l'acteur en a alors le double !). Plus anecdotique, le tournage fut plus difficile, notamment et surtout à cause de la mésentente entre Maccione et Lamoureux, le premier était un trublion même en coulisse ce qui ne plaisait pas à Lamoureux plus intransigeant alors qu'il pardonnait à son pote Lefebvre ses écarts (poker et alcool). Néanmoins, le film sera un succès se situant à la 2ème place d box-office 1973 avec près de 4 millions d'entrées France. Robert Lamoureux signe une comédie drôle, sans prise de tête, bien écrite avec des répliques cultes devenues populaires et qui font encore mouche des générations après, une comédie divertissante qui a le bon goût de ne pas se prendre au sérieux : c'est ce qu'on lui demande. Un très bon moment.

Pour info bonus, Note de mon fils de 11 ans :