Personnage : l’appel aux sens

Par William Potillion @scenarmag

Un personnage n'échappe pas aux détails. Dans votre empressement à obtenir un premier projet sur papier, vous pourriez vous fier trop aux aspects visuels de la description. Même vos détails " révélateurs " sont probablement visuels : un miroitement, un réverbère blafard, un fard à paupières bleu.

Mais vous avez aussi quatre autres sens avec lesquels vous devriez travailler : le goût, le toucher, l'odorat, l'ouïe. Ce que votre personnage sent et entend peut être encore plus important que ce qu'il voit. Une odeur de souffre par exemple peut avoir son importance dans le récit.

Prenons un personnage qui découvre pour la première fois l'appartement où vivait sa mère dont il était séparé depuis de nombreuses années et cette mère vient de mourir. Si l'auteur précise simplement que c'est un petit appartement bien rangé, il y a alors un méchant manque car hormis la suggestion que chacun d'entre nous peut avoir de l'expérience d'un appartement bien rangé, aucun des autres sens n'ait sollicité.

Les détails sensoriels invitent les lecteurs à prendre le parti de votre personnage, à comprendre ce qu'il lui arrive, à s'identifier à ses espoirs et à ses craintes. Ces détails apportent de l'ampleur et de la profondeur au personnage et au lieu, en informant vos lecteurs de manière surprenante, révélatrice et agréable à lire.

Des images sensorielles

Les images sensorielles sont un dispositif littéraire que les auteurs emploient pour faire participer l'esprit d'un lecteur à plusieurs niveaux. Ces images explorent les cinq sens humains : la vue, l'ouïe, le goût, le toucher et l'odorat.

Les images sensorielles impliquent l'utilisation d'un langage descriptif pour créer des images mentales (y compris pour le lecteur ou la lectrice d'un scénario). Une image sensorielle fonctionne en faisant appel aux cinq sens du lecteur. Toute description de l'expérience sensorielle par écrit peut être considérée comme de l'image sensorielle.

La plupart des écrits contiennent un certain niveau d'images. L'une des raisons pour lesquelles les auteurs de fiction traitent de détails concrets est de permettre au lecteur d'avoir le plaisir d'arriver à ses propres jugements et conclusions grâce à des indices perceptifs. Cependant, les auteurs ne doivent pas toujours recourir à la description de l'apparence des choses pour créer des images mentales.
Décrire le goût, l'odeur, le son ou la sensation d'une chose, et non seulement son apparence, permet de donner de la vie, de conférer une réalité, à une scène. L'utilisation d'une combinaison d'images (c'est ce qui est projeté au lecteur de l'extérieur par l'écrit ou par les images d'un film) et d'images sensorielles (qui sont élaborées en interne, dans l'esprit du lecteur ou de la lectrice) fournit à ce lecteur ou à cette lectrice le plus d'informations possible et l'aide à se faire une idée plus précise de ce qu'il se passe car ce qu'il ou elle ressent intervient énormément dans l'interprétation de la scène.

Par exemple, considérons ce passage de Jane Eyre que Charlotte Brontë écrivit en 1847 :

j'entendais la pluie battre continuellement contre les vitres de l'escalier, et le vent hurlant dans le bosquet derrière le hall ; peu à peu je devins froide comme la pierre et je perdis tout courage. L'habitude que j'avais contractée d'humilité, de doute de moi-même, d'abaissement, vint, comme une froide ondée, tomber sur les cendres encore chaudes de ma colère mourante.

La pluie " battant " et le vent " hurlant " sont des exemples de personnification de la pluie et du vent. La pluie " bat " et le vent " hurle " possède des équivalents ou analogies humains.
" peu à peu je devins froide comme la pierre est un exemple d'objectivation de la sensation de froid à celle d'être une pierre. Les descriptions de la température et de l'humidité sont des images tactiles. Dans ce cas, la pluie et l'inconfort physique de Jane reflètent son humeur sombre.

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