(Critique - avec spoilers - de la saison 1)
Ne vous laissez pas induire en erreur par ce qui pourrait très bien être le titre d'un futur film James Bond, la nouvelle série fantastique et ambitieuse made in Netflix Shadow and Bone, basée sur une trilogie de livres à succès de Leigh Bardugo (et qui aurait très bien pu incarner une adaptation cinématographique il y a une poignée d'années, à une heure ou Hollywood sautait sur tout bouquin fantastico-YA qui bougeait), et qui coche toutes les cases du hit facile mais accrocheur comme la plateforme - et son auditoire - les affectionne tant.
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Comportant un lot gentiment impressionnant de tropes et d'éléments fantastiques familiers, tout en faisant l'effort assez louable de ne pas forcément s'y limiter, le show se paye un cadre de choix pour se démarquer de la concurrence : le cadre d'une Russie alternative tsariste, qui tranche avec l'univers britannico-alternatif vaguement médiéval desservi à toutes les sauces possibles, et lui donnant un petit air de Docteur Jivago 2.0 loin d'être désagréable.
Mais plus que son cadre, son souci d'aborder le genre fantastique uniquement du point de vue humain, sans la moindre entité surnaturelle, lui confère une authenticité assez unique, d'autant plus lorsqu'elle aborde les questions d'identités sexuelles et raciales, et de la tension qui s'en émane, habituellement formulée dans un codage fantaisiste (les elfes détestent les nains, les humains détestent les orcs,... la liste est longue).
Cela donne résolument du corps et un sentiment de réel à une narration intelligente (qui ne balance pas à la face du spectateur un rouleau sans fin de textes/discours explicatifs grandiloquents et assommants pour étayer sa mythologie), se donnant la priorité de pleinement construire son - immersif et épique - monde, bien aidée par son héroïne (comme dit plus haut, Alina est une cartographe militaire), tout en cherchant à aller strictement à l'essentiel - même dans sa montage, chaque scène n'allant jamais plus loin quelle ne le doit -; un empressement qui va étrangement de pair avec son excessivité et sa générosité (une pluie de personnages, qui pourrait presque nous perdre parfois, même si chacun a le temps de s'exprimer et d'exister).
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Volontairement addictif (chaque fin d'épisode nous pousse plus ou moins subtilement à enchaîner avec le suivant), s'extirpant de toute complexité chronologique ou de nuances caractéristiques inutiles (tout le contraire, par exemple, de The Witcher), Shadow and Bone incarne exactement et à la perfection ce qu'elle doit être : un petit show solide et prenant, qui n'a que pour seule intention d'occuper notre temps libre - et elle le fait très bien.
Jonathan Chevrier