[FUCKING SERIES] : Halston : Biopic pimpant mais engourdi

[FUCKING SERIES] : Halston : Biopic pimpant mais engourdi

(Critique - avec spoilers - de la mini-série)


Il était assez étonnant qu'une figure aussi extravagante que fascinante telle que le créateur de mode mononyme Roy Halston Frowick - Halston pour les intimes et... tout le monde -, n'avait pas encore eu les honneurs d'une incarnation aussi bien sur le petit que sur le grand écran; du pain béni pour un Ryan Murphy qui semble ne pas pouvoir passer un mois sans avoir un concept de série à mettre en boîte (et rendre encore plus fructueux son partenariat avec Netflix aussi), mais aussi un Ewan McGregor qui va passer ses prochaines années sur les diverses plateformes - coucou Obi-Wan Kenobi sur Disney Plus.
Après avoir connu l'apogée de sa carrière en redéfinissant le style à l'américaine avec des designs épurés et minimalistes, le bonhomme a peu à peu glissés côté obscur en perdant le contrôle de sa maison de couture et même de son propre nom, la faute à une série de décisions commerciales terribles et à une accumulation de dépenses personnelles calamiteuses (tout n'a pas été si gaspillé au fond, tant il s'est acheté une quantité astronomique énorme de cocaïne et d'orchidées).

[FUCKING SERIES] : Halston : Biopic pimpant mais engourdi

Copyright ATSUSHI NISHIJIMA/NETFLIX


Passé à la moulinette - ou presque - du traitement Murphy (même si le show n'a strictement rien à voir avec les productions du magnat télévisé pour la plateforme commençant par un N majuscule), les cinq décennies de la vie de l'emblématique créateur sont " condensées " et résumées en à peine cinq épisodes (le tout tiré de la biographie non officielle Simply Halston de Steven Gaines) tout rond.
Un maelstrom (trop) imposant composé entre son enfance difficile, son ascension fulgurante (sa carrière a explosé lorsqu'il avait 29 ans, grâce au fameux Pillow Box Hat rose que Jackie Kennedy portait en 1961, le jour de l'investiture de son JFK de mari) et sa chute inévitable - avec énormément de fêtes intenses au milieu -; même si la série choisit surtout de zoomer - logiquement - sur l'aspect le plus important de l'histoire d'Halston : comment il a monté sa propre maison de couture, tout en nous proposant à côté une visite guidée appliquée de tout ce qui faisait sa légende (notamment ses fameuses nuits new-yorkaises dans le célèbre club Studio 54).
Un parti pris un poil castrateur (d'autant plus pour une mini-série), comme si l'on venait à vouloir intégralement résumer un pavé littéraire de 900 pages sur les 256 caractères d'un tweet (Halston est, sans trop forcer le trait, le pendant US de YSL), tout en ne voulant jamais totalement déborder dans la marge du divertissement aussi foutraque que pouvait l'être la vie de son sujet.
Un poil trop révérencieux voire aseptisé (deux, trois scènes de sexes " provocatrices " ne changent rien à ce constat) mais élégant (esthétiquement parlant, c'est un régal pour les yeux), le show, totalement voué à mettre en exergue le génie réel d'Halston (ce qu'il réussit, et l'on ne doute jamais une seule seconde de l'hommage sincère de Murphy à l'une des idoles de sa jeunesse), a au moins pour lui un guide d'exception : un Ewan McGregor des grands jours, quasiment de toutes les scènes et savoureusement piquant en orfèvre aussi audacieux que capricieux (il lui donne même plus d'épaisseur que l'histoire en elle-même).

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Dommage donc qu'au-delà de l'hagiographie expéditive mais honnête de cette figure importante de la mode outre-Atlantique, le show n'est pas prit plus de temps pour questionner ce qui faisait vraiment vibrer Halston (ces années formatrices sont même dégainées à l'arrache dans un simple flashback), de sonder un peu plus sa vulnérabilité (perceptible au moment de sa douloureuse dégringolade), ou même d'offrir un regard pertinent sur un artiste tiraillé entre ses principes et son art (même en ce qui concerne sa relation avec muse et amie fidèle, Liza Minnelli/Krysta Rodriguez), et les sirènes du sacro-saint billet vert.
On aurait pu avoir droit à un show biopic mélancolique et flamboyant - comme Feud, déjà signée Murphy -, on a in fine droit à un téléfilm de luxe classique et timide même si didactique pour ceux ne connaissant ni d'Adam ni d'Eve, la figure Halston... dommage donc, comme dit plus haut.
Jonathan Chevrier
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