Réalisateur : Zack Snyder
Acteurs : Dave Bautista, Ella Purnell, Omari Hardwick,...
Distributeur : Netflix France
Budget : -
Genre : Action, Epouvante-horreur.
Nationalité : Américain.
Durée : 2h28min.
Synopsis :
Profitant d'une attaque de zombies à Las Vegas, un groupe de mercenaires fait le pari fou de s'aventurer dans la zone de quarantaine pour tenter le braquage le plus spectaculaire de tous les temps.
Retour nostalgique aux débuts de Snyder, #ArmyOfTheDead ou une tapisserie baroque de sang, de balles et d'os ne cherchant jamais totalement à bousculer le genre mais plus à revenir vers une insouciance jubilatoire en mélangeant joyeusement le heist movie avec le film de zombies. pic.twitter.com/4XYxTzB2pk
— Fucking Cinephiles (@FuckCinephiles) May 21, 2021
Il y a 17 ans, on ne donnait pas cher de la peau de Zack Snyder, réal talentueux issu de la publicité, qui après s'être fait les dents sur sa version avortée de S.W.A.T. chapeauté avec Oliver Stone (le bonhomme, fasciné par les armes, déclinera in fine la proposition tant il ne voyait pas comment illustrer convenablement l'action des unités d'élites de la police de L.A., avec un élan PG-13 castrateur...), tentait de littéralement gravir l'Everest en tatant du remake de l'intouchable - jusqu'ici - Zombies de feu Romero.
Depuis, on connaît la chanson : le bonhomme a évacué toute la critique sociale chère au film original, pour lui préférer une violence brutale et viscérale, sorte de cauchemar crépusculaire mise en scène avec une énergie proprement hargneuse.
Une véritable carte de visite qui l'a amené à s'enticher de plusieurs comics mais surtout à apporter sa patte, n'en déplaise à certain, plus que nul autre cinéaste sur la dernière décennie, à un genre superhéroïque auquel il a offert plus d'une réussite (Watchmen les gens, Watchmen...).
Copyright Clay Enos / Netflix
Passé une tragédie à double résonance (la mort de sa fille et, dans une moindre mesure, la catastrophe corrigée du Snyder-verse et de son Justice League), le Zack s'est donc lancé dans un retour aux sources salvateur autant de son propre cinéma, que d'un désir de réellement s'éclater dans la pratique de son métier.
Et s'il y a bien quelque chose que l'on ne peut absolument pas retirer à Army of The Dead - dont le titre renvoie à celui français de Dawn of The Dead -, c'est l'enthousiasme presque adolescent qui se dégage de ce pur délire XXL et hystérique de 2h30, à la générosité sans égale.
Ne tardant pas à mettre son auditoire dans le bain avec une ouverture bien métal, retraçant comment Las Vegas est devenue la capitale des zombies (un Elvis sanglant, des hectares de destruction massive, de la showgirl nue, le tout avec Viva Las Vegas en musique de fond : un régal pour les amateurs de bon goût); le film se transforme vite en un rip-off déglingué - donc génial - de Ocean's 11, en se concentrant sur un groupe hétéroclite d'anciens bidasses - mais pas que - dominé par un Danny Ocean badass, Scott Ward (Dave Bautista, surhomme Herculéen comme Snyder aime les canoniser), qui se met en tête de récupérer rien de moins 200 millions de dollars en cash dans un coffre-fort, avant que Vegas ne soit vaporisée et devienne poussière - que ce soit à cause des zombies ou d'un gouvernement ricain bien décidé à faire péter la cité de tous les péchés.
Un voyage périlleux qui pourrait cependant offrir un double gain à Ward, veuf suite à l'épidémie zombiesque, qui pourrait renouer des liens avec sa fille Kate, devenue bénévole dans une zone en quarantaine, au-delà du Strip.
Copyright Clay Enos / Netflix
Retour nostalgique à ses débuts, qui peut se voir comme un propre remake sauce Bigger and Louder de son premier long, véritable tapisserie baroque de sang, de balles et d'os, jamais à court de séquences mémorables (et au symbolisme aussi pregnant et évident que pour Justice League, comme si l'on entendait Snyder le gueuler au mégaphone à chaque plan); Army of the Dead ne cherche jamais à totalement révolutionner quoique ce soit - tant mieux -, mais plus à revenir vers une insouciance jubilatoire, une sorte de champs de tous les possibles venu d'un autre temps, ou mélanger le heist movie avec le film de zombies aurait quelque chose de fabuleusement familier.
Ce qui en fait de facto dès sa première bobine (si l'ouverture met dans l'ambiance, elle sert avant tout d'indicateur sur ce que sera le film, laissant directement sur le carreau les réfractaires), un véritable roller coaster à sensations fortes totalement conscient aussi bien de ses qualités que de ses facilités, mais qui prend cependant une résonance toute particulière dans la réflexion métaphysique qu'il convoque, autant que le parallèle édifiant qu'il compose aussi bien entre les vivants et les zombies (comme chez Romero), que le miroir qu'il dégaine sur la société actuelle.
S'il y injecte son cynisme habituel (ce qui contrôle le récit, ce n'est pas tant l'intervention des cadavres réanimés, mais bien la cupidité de ses personnages humains), sa conscience sociale (un regard pertinent/prophétique sur une pandémie mondiale) et politique détonne, d'autant plus quand on la replace dans le contexte de sa confection avec la présidence de Trump (l'enrichissement à peine masqué des élites, l'accroissement des faussés entre les classes sociales, les murs frontaliers, le traitement des réfugiés ou encore un président qui pense que déclencher une bombe nucléaire le 4 juillet serait " le feu d'artifice ultime ").
Copyright Clay Enos / Netflix
Même son émotion, étonnamment subtile, nous touche en plein coeur (impossible de ne pas voir dans la relation complexe entre Ward et Kate, celle de Snyder et sa défunte fille) et laisse entrevoir l'idée que tout n'est pas qu'un simple défouloir de 2h30 bien tassé, mais bien une oeuvre certes faite pour divertir, mais aussi le fruit d'un cinéaste redevenu insaisissable même sur son propre terrain de jeu.
Ne transformant pas le plomb en or, Snyder parvient donc sans peine à masquer les insuffisances notoires du script (la profondeur des personnages en tête, même s'ils sont pour la plupart attachants), en instaurant une ambiance de fin du monde ludique et ironique (un tigre zombie quoi) tout en empathisant clairement ses séquences d'action, à l'énergie brute de décoffrage grâce à une mise en scène sollicitant pleinement nos glandes surrénales.
Pas chiche en référence (New York 1997, Apocalypse Now, Aliens, La Planète des Singes,...) et en idées couillues (une hiérarchisation des zombies), généreux, fun et féroce, Army of The Dead est un pur pop-corn movie galvanisant, qui semble boucler une boucle entamée par Snyder en 2004... vivement la suite.
Jonathan Chevrier