Acteurs : -
Distributeur : -
Budget : -
Genre : Documentaire, Drame.
Nationalité : Éthiopien, Qatarie, Américain.
Durée : 1h58min
Synopsis :
D’après la tradition soufie, si l’on mâche le khat, une feuille verte aux vertus stimulantes, on trouve le chemin vers l’éternité. Ce premier film de Jessica Beshir est un voyage dans les montagnes d’Éthiopie où le khat est devenu une culture répandue et lucrative. Entre légende et réalité, Faya Dayi raconte l’histoire d’un peuple qui vit de cette feuille minuscule mais puissante.
Tout commence par le khat dans le premier long métrage de Jessica Beshir, Faya Dayi. Parmi les magnifiques plaines du Harar, une région éthiopienne, la culture de cette plante aux effets psychotropes domine. Autrefois productrice de café, la région s’est rabattue sur le khat, qui demande beaucoup moins d’eau. La plante envahit donc souvent le cadre de ce film spirituel et onirique. Il faut s’accrocher pour comprendre la densité de l’histoire que nous compte la cinéaste éthiopienne-mexicaine. Le récit est parsemé de symboles, de plans lourds de sens.
Cinetic Media
Jessica Beshir présente son projet comme un film organique, il lui a fallu dix ans pour le mener à bien. S’éloignant d’un format documentaire classique, Faya Dayi plonge dans le quotidien de cette communauté soufie, les habitants locaux, sans détour. Avec de longs plans s’attachant aux moindres gestes de la culture du khat, la mise en scène se fait lente, pour mieux appréhender le sous-texte : l’aspiration spirituelle de la plante, la triste réalité d’une nouvelle génération qui ne rêve que d’une chose, partir. Il existe toute une méditation autour du khat, par le bienfait des feuilles, que l’on peut mâcher. La plante est très vite arrivée dans le quotidien des familles de la communauté et ses effets détériorent les liens et les personnes qui en consomment une grande quantité. Le début du film forme une succession de plans, sans fil rouge — c’est ce que l'on pourrait croire. Pourtant, la cinéaste nous donne toutes les clefs de compréhension de son récit. Elle ne nous facilite peu la tâche cependant et nos yeux sont vites distraits par la beauté picturale de son cadre. Le choix du noir et blanc participe à un effet éthéré, la lumière possède une sorte de voile, forme de rêve éveillé. La composition du son est également très travaillée. Le caractère particulier du visionnage, permis par un festival en ligne, fait que nous pouvons écouter avec un casque chaque bruit, chaque son, qui nous emportent un peu plus vers un état de délectation. Malgré l’immersion sensorielle, la narration s'élève vers un propos plus universel, plus terre à terre. Une réalité économique et sociale que doit porter la jeune génération, tandis que les anciens se laissent aller au rythme de mastication du khat.C’est avec deux jeunes hommes, deux amis, que Jessica Beshir rythme son film. La caméra finit toujours par revenir sur leurs visages, aux contours enfantins tout d’abord, pour finir de plus en plus grave au fil des péripéties. Péripéties, le mot est peut-être un peu fort tant le rythme est lent, la mise en scène se basant sur la communication souvent difficile. Il faut savoir appréhender ce rythme, se laisser porter. Cette lenteur s’explique par le khat, le centre de toute chose dans le village que filme la cinéaste. Seule économie viable dans cette communauté, les feuilles de khat sont aussi le centre de tous les problèmes. C’est un cycle perpétuel que montre Fayi Dayi, un enfermement dans un quotidien dénué d’avenir. L’émigration semble alors être la seule solution, la seule réponse face à la structure économique façonnée par cette plante destructrice.
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C’est un puissant premier film que nous présente Jessica Beshir, à l’accent fataliste. Faya Dayi n’a pas beaucoup de lignes de fuite, dans le cadre et dans sa narration, entraînant les spectateur‧trices et les protagonistes vers une triste réalité, vers un avenir incertain.
Laura Enjolvy