Un grand merci à Rimini Éditions pour m’avoir permis de découvrir et de chroniquer le blu-ray du film « Le pont de Remagen » de John Guillermin.
« On fusille des officiers pour l’exemple. De cette manière, ils resteront à leur poste. Mieux vaut mourir face à l’ennemi que devant un peloton d’exécution »
1945 : les Alliés font leur dernière avancée dans le territoire allemand. Seul un pont sur le Rhin demeure aux mains des nazis. Les deux camps ont beaucoup à gagner : les Allemands, la vie de 50 000 soldats postés du mauvais côté du pont ; les Alliés, une issue plus rapide à la guerre, et de nombreuses vies épargnées. Mais seul une armée pourra gagner la terrifiante bataille du Pont de Remagen.
« Le problème n’est pas de détruire ce pont mais de le garder intact ! »
Né à Londres de parents immigrés français, John Guillermin fut à l’évidence le plus français de tous les réalisateurs anglais. Après avoir pris part très jeune à la Seconde guerre mondiale au sein de la RAF en mentant sur son âge, il devient réalisateur au sortir du conflit. Longtemps abonné aux série B notamment policières, il faut néanmoins montre d’une appétence certaine pour les films d’action et de guerre. Remarqué notamment pour la qualité technique de ses fresques militaires (« Contre-espionnage à Gibraltar » en 1958 et « Les canons de Batasi » en 1964), il part à Hollywood où il s’illustre aux commandes d’une série de grosses productions telles que « Le crépuscule des aigles » (1966, avec George Peppard), « Alerte à la bombe » (1972, avec Charlton Heston), « King Kong » (1976, avec Jeff Bridges) et surtout « La tour infernale » (1974, avec Paul Newman et Steve McQueen). Avant de disparaitre progressivement des écrans au cours des années 80, après avoir signé un dernier succès public avec « Mort sur le Nil » (1978). En 1969, il signe avec « Le pont de Remagen » un des films de guerre les plus intéressants de la décennie. Tourné en partie en Tchécoslovaquie, le tournage sera finalement contrarié par le Printemps de Prague qui obligera l’équipe du film à quitter précipitamment le pays en abandonnant derrière lui une grande partie du matériel (notamment les chars) et à terminer le tournage en RFA.
« Général, vos regrets ne sauveront pas le pont. Vos panzers, eux, auraient pu. »
Adapté d’un livre de Ken Hechler, « Le pont de Remagen » raconte l’épopée d’une brigade américaine au cours des combats qui ont conduit à la prise le 7 mars 1945 du pont Ludendorff, à Remagen, qui était le dernier pont sur le Rhin à ne pas avoir été détruit. Mais l’approche du film de guerre a changé au cours des années 60, rompant avec une certaine tradition qui cherchait à enjoliver la réalité de la guerre pour mieux souligner l’héroïsme et la bravoure des soldats (« Bastogne », « Le jour le plus long »). A l’instar de Dmytryk (« La bataille pour Anzio ») ou Pollack (« Un château en enfer »), Guillermin préfère lui une approche plus réaliste de la guerre dont il filme frontalement la violence et l’absurdité. Une absurdité symbolisée en premier lieu par ce pont que les états-majors ordonnent de détruire mais que les hommes sur le terrain s’évertueront à maintenir en état. Absurdité aussi d’une hiérarchie militaire toujours prompte à envoyer ses hommes au casse-pipe jusqu’à l’épuisement pour quelques médailles honorifiques mais qui n’hésitent pas à les faire exécuter froidement et à la sauvette pour éviter d’avoir à reconnaitre leur défaite. Refusant tout manichéisme facile, le cinéaste filme ainsi la guerre à hauteur d’hommes, dans ce qu’elle a de plus laid et de déshonorant, tant du côté allemand (l’enfant endoctriné qui lutte jusqu’à la mort, des femmes qui s’offrent contre un paquet de cigarettes et un peu de protection, des hommes qui renient leur foi dans le nazisme pour protéger leurs biens) qu’américain (le sergent qui pille les cadavres, le soldat qui dépouille ses camarades aux cartes). D’autant que derrière, Guillermin ne lésine pas sur les moyens pour nous montrer l’âpreté des combats. A ce titre, les séquences d’attaque du pont (notamment celle de l’explosion) restent formidablement spectaculaire. Un grand film de guerre, épique, élégiaque et désabusé, qu’il convient de réévaluer à sa juste mesure.
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Le blu-ray : Le film est présenté dans un Master Haute-Définition, en version originale américaine (2.0) ainsi qu’en version française (2.0). Des sous-titres français sont également disponibles.
Côté bonus, le film est accompagné de « La Bataille de Remagen », présentation de la véritable bataille ainsi que du tournage du film par Stéphane Chevalier (9 min.). Un livret de 24 pages consacré au tournage du film vient avantageusement compléter cette édition.
Édité par Rimini Éditions, « Le pont de Remagen » est disponible en éditions blu-ray et DVD depuis le 15 avril 2021.
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