La mutinerie

Par Platinoch @Platinoch

Un grand merci à BQHL Editions pour m’avoir permis de découvrir et de chroniquer le blu-ray du film « La mutinerie » de Buzz Kulik.

« Maintenant on se tire. Rien que nous. Rien que le mitard. »

Le pénitencier d’État de l’Arizona, l’une des prisons les plus dures des États-Unis. Isolés au mitard, des détenus canalisent le gardien et s’emparent des clefs des cellules. Les rôles s’inversent, les prisonniers devenant maîtres d’une grande partie de l’établissement, d’où certains espèrent pouvoir s’évader. Une situation explosive qui pourrait s’achever dans un bain de sang. Si, dans l’attente d’une libération sur parole, Cully Briston se tient à l’écart du soulèvement, les criminels les plus dangereux tentent le tout pour le tout, conscients qu’ils n’ont rien à perdre à mettre le feu aux poudres…

« ça fait quatre ans que tu nous mène à la cravache et maintenant tu oses dire que tu es un vieil homme malade ? »

Le succès du film La grande évasion va relancer au cours des années suivantes l'intérêt du cinéma pour le genre du film de prison. Un retour sur le devant de la scène qui correspond également à l'émergence du Nouvel Hollywood dont les réalisateurs trouvent dans ce sujet des thématiques fortes (l'enfermement, le goût pour les outsiders et les marginaux, la remise en cause de la norme morale et de l'autorité). Ce qui donnera lieu à toute une série de films comme « Luke la main froide », « Papillon », « Sugarland Express » et qui culminera avec « Vol au-dessus d'un nid de coucou ». Une lignée à laquelle il convient également de rattacher « La mutinerie » réalisé en 1969 par Buzz Kulik, réalisateur qui œuvrera essentiellement pour la télévision et qui signera à la marge un petit corpus de huit films pour le cinéma, dont le plus célèbre demeure certainement « Le chasseur » (1980) avec Steve McQueen.

« Je suis désormais trop profondément embringué. Plus je m’implique et plus je m’enfonce. Jamais plus je ne serai libéré sur parole. Jamais plus je ne sortirai d’ici. »

Adapté d’un roman de Frank Elli, lui-même librement inspiré d'un authentique fait divers tragique et sanglant survenu dans un pénitencier de l’Arizona, « La mutinerie »voit son intrigue centrée sur le soulèvement d’un groupe de prisonniers jusqu’alors placés au mitard. Libérés de leurs geôles et tenant une poignée de gardes en otage, les mutins se retrouvent désormais acculés et ne rêvent plus que de profiter de cette occasion pour tenter de s’évader. Mais dans l’impréparation totale compte tenu de la spontanéité de leur action, ces derniers devront en premier lieu gagner du temps pour mener leur opération à bien. Sur la forme, l’originalité du film tient d’abord à cette vision de la gestion du groupe : les meneurs savent qu’ils ne pourront réussir que s’ils œuvrent de façon collective, en canalisant (ou en neutralisant) les éléments les plus violents et imprévisibles, à même de faire échouer l’opération. De même, qu’en créant une forme d’anarchie au sein du pénitencier visant à faire diversion et à occuper les matons. Sur le fond, le film vaut surtout pour son parti pris d’inversion des valeurs (influence du Nouvel Hollywood oblige), présentant les prisonniers (dont on prendra bien soin de ne jamais préciser les crimes) comme des hommes ordinaires et travailleurs, brimés – souvent injustement – par des matons sournois, cruels et sadiques. La prise en main de la prison par les mutins permettra d’ailleurs  d’insuffler une bouffée de liberté au cœur du pénitencier où l’alcool, la sexualité et surtout l’homosexualité auront ainsi libre court. De quoi faire apparaitre, de façon symbolique, les forces de l’ordre et les pouvoirs publics comme les agents d’un ordre établi et d’une répression systématique des aspirations libertaires du peuple. Mais plus encore, juste avant l’avènement de la blaxploitation, Kulik place ici un personnage noir dans le rôle du héros (malgré lui) qui, par son charisme et sa sagesse, finira par imposer son leadership parmi les mutins pour éviter les bains de sang. Surtout, il sera au final le seul à réussir à s’échapper dans se faire prendre. En cela, « La mutinerie » se révèle être une série B de très bonne facture particulièrement audacieuse.

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Le blu-ray : Le film est présenté dans un Master Haute-Définition, en version originale américaine (2.0) ainsi qu’en version française (2.0). Des sous-titres français sont également disponibles.

Côté bonus, le blu-ray propose une présentation du film par le cinéaste Laurent Bouhnik, réalisateur de « Zonzon », « Sélect Hôtel » ou encore« 24 heures de la vie d’une femme ».

Édité par BQHL Editions, « La mutinerie » est disponible en blu-ray ainsi qu’en DVD depuis le 15 juin 2021.

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