A ne pas confondre avec les films éponymes, long métrage (2001) de Jérôme Enrico et le court (2004) de Erick Malabry, mais évidemment on pense surtout au clin d'oeil au célèbre tableau "L'Origine du Monde" (1866) de Gustave Courbet. Mais ce film est avant tout l'adaptation de la pièce éponyme (2013) de Sébastien Thiéry, auteur mais aussi acteur de temps à autre pour des petits rôles la plupart du temps mais également réalisateur d'un premier long avec "Momo" (2017) co-signé avec Vincent Lobelle. L'acteur Laurent Lafitte a découvert la pièce en 2013, pièce durant laquelle il avoue avoir beaucoup ri mais plus tard il y aurait aussi vu un second niveau de lecture plus grave comme il l'explique : "Ces thèmes me touchent intimement. Cette histoire m'a tellement habité, j'ai tellement rêvé autour que je n'avais pas envie d'écrire autre chose pour mon premier film. J'ai proposé à Sébastien Thiéry d'acheter les droits, il a accepté, puis je suis passé à autre chose pendant presque deux ans car je travaillais beaucoup et je n'avais pas le temps de me pencher sur l'adaptation. En fait, le film mûrissait tranquillement dans ma tête : quand je me suis mis à écrire, tout est allé très vite." Laurent Lafitte signe là son premier long métrage en tant que réalisateur-scénariste...
Jean-Louis s'aperçoit que son coeur ne bat plus, et qu'il n'a plus de pouls non plus mais il continue pourtant à vivre "normalement". Vivant ou mort il ne sait plus quoi penser et fait appel à son ami vétérinaire qui est abasourdi et perdu ne sachant ni quoi penser ni quoi faire. Valérie, son épouse, propose de faire appel à sa coach de vie, sorte de gourou, mais sa vision des choses perturbe encore plus Jean-Louis car son coeur arrêté aurait un lien direct avec le vagin de sa mère !... Cet homme soudain "sans coeur" est incarné par Laurent Lafitte lui-même qui revient à la comédie après plusieurs drames avec "L'Heure de la Sortie" (2019) de Sébastien Marnier, (2019) de Vincent Mariette et "Nous Finirons Ensemble" (2019) de Guillaume Canet. Son épouse est interprétée par la toujours succulente Karin Viard vue cette année dans "Tokyo Shaking" (2021) de Olivier Peyon et "Les Fantasmes" (2021) des frères Foenkinos. L'ami vétérinaire est joué par Vincent Macaigne vu récemment dans "Les Choses qu'on dit, les Choses qu'on fait" (2020) de Emmanuel Mouret et "Médecin de Nuit" (2021) de Elie Wajeman, il retrouve après "Le Sens de la Fête" (2017) du duo Toledano-Nakache deux de ses partenaires, Hélène Vincent vue récemment de "Adorables" (2020) de Solange Cicurel, puis Pauline Clément qui retrouve aussi Karin Viard après "Les Fantasmes". La gourou est incarnée par Nicole Garcia, réalisatrice-actrice connue qui retrouve Laurent Lafitte après "Papa ou Maman 2" (2016) de Martin Bourboulon. Citons enfin celui qui joue le papa de Valentine/Viard, Benoît Dupac surtout réputé pour le doublage et le petit écran qui n'est apparu que dans deux précédents longs métrages, "La Vérité si je Mens 2" (2001) de Thomas Gilou et "Ma Place au Soleil" (2006) de Eric de Montalier où il avait déjà croisé Nicola Garcia... Lafitte avoue avoir modifié un peu la pièce pour l'adapter sur grand écran, et ce n'est pas anodin pour le résultat final. Il précise donc :"De plus, je tenais à m'éloigner au maximum des mots d'auteur. Au cinéma, la " réplique drôle " me fait moins rire qu'une situation. J'ai aussi ajouté toute la première partie. Alors que la pièce commence quand le cœur de Jean-Louis s'arrête de battre, je souhaitais installer un peu sa vie avant. Et en général pour sortir de la pièce, j'ai écrit des séquences en extérieur, chez la mère, la photocopieuse, les cauchemars, et des flashback... J'ai également voulu que sa femme soit plus présente." Présenter l'homme dans son milieu est sans doute une bonne idée, mais on regrette deux choix : le rythme qui reste particulièrement amorphe, puis l'absence de musique. L'un associé à l'autre accentue le côté théâtral, et surtout donne une sensation d'ennui, de langueur qui ne sied jamais à une comédie. D'autant plus vrai quand le sujet est aussi scabreux !
En comptant les passages déjà présents dans la bande-annonce il faut attendre un gros trois quarts d'heure avant de voir le rythme et la tension grimper un peu et de réveiller l'intérêt. On rit 2-3 fois enfin, dont un gag surprise qu'on doit à Macaigne, sinon ça reste surtout des sourires plus ou moins malaisant au vu des situations cocasses qui flirtent souvent avec le mauvais goût. Mais il est sans doute important de replacer certains points, ceux qui crient à l'apologie du viol par exemple devrait surtout s'interroger sur eux ! Il n'y a aucun viol (dans le sens juridique du terme), mais forcément, vu le sujet, vu cette transposition du complexe d'Oedipe version nouveau millénaire, il est évident que certains passages peuvent gêner les plus puritains, les plus émotifs, alors même qu'il n'est question que d'une photo (des soit-disants artistes exposent bien pire que ce qu'on voit dans le film !) et d'une question de survie. La grande force de film est pourtant de jouer le funambule, Lafitte ne dépasse pas la ligne jaune du vulgaire même si le choc émotionnel dû au tabou que peut représenter ce complexe d'Oedipe est compréhensible. Lafitte joue avec le feu mais s'en sort plutôt bien avec de dialogues qui font mouche et surtout des acteurs absolument parfaits, jouant des personnages à la fois abjects et touchants. Sur un autre point, le film insiste un peu trop sur la situation bourgeoise des protagonistes, mais franchement ce paramètre sonne faux car en quoi le complexe d'Oedipe ne pourrait pas toucher un pauvre par exemple ?! La plus décevant est que ce complexe n'est finalement qu'un concept, une sorte de macguffin (cher à Hitchcock !), alors qu'on aurait aimé un propos plus probant sur le final et moins gratuit. On a surtout le sentiment que Lafitte savait qu'il devait trouver le bon équilibre et que c'est parfois tendu. Néanmoins on salue l'audace et quelques passages restent très efficaces à défaut d'avoir un film qui tient la route de bout en bout. On pense parfois à Etienne Chatliez, il manque sans doute à Lafitte des personnages pour qui on aurait un peu plus d'empathie, sans compter le manque de rythme. En conclusion, un film inabouti, bancal, mais avec les qualité d'un OFNI (Objet Filmé Non Identifié) à savoir de l'audace, des idées, certaines qui font mouche, quelques rires, et malgré tout un film qui pourrait bien avoir le potentiel d'un film culte (même on en doute...).