Alors que le cinéaste est en plein montage de "Rich and Strange" (1932) le patron du BIP (British International Picture) Walter C. Mycroft confie à Hitchcock l'adaptation d'une nouvelle pièce, "Number Seventeen" (1926) de Joseph Jefferson Farjeon. Comme depuis "Junon et le Paon" (1929) le réalisateur-scénariste retrouve son épouse Alma Reville comme scénariste, cette fois en collaboration également avec Rodney Ackland qui avait un petit rôle dans "The Skin Game" (1931) et qui sera un scénariste prolifique au cinéma comme à la télévision jusqu'à sa mort en 1991. Le film est connu pour être un des premiers exemples par Hitchcock de l'utilisation d'un Macguffin (tout savoir ICI !), ici un collier de perles, qui est un enjeu en fait de pacotille car qu'importe l'objet qui influe pas du tout sur l'intrigue elle-même. Ce film est aussi le dernier que tourna le réalisateur pour la société BIP avant de passer chez Gaumont British...
Passant dans la rue un homme remarque une lueur étrange au n°17 de la rue, s'agissant vraisemblablement d'une maison abandonnée il entre par curiosité mais découvre un cadavre. Très vite il constate que étonnamment cette maison n'est pas si abandonnée que ça. Il fait ainsi la rencontre d'un vagabond, une ravissante jeune femme, des "acheteurs" jusqu'à ce que le cadavre disparaisse ! La nuit va s'avérer longue et va s'emballer quand tout ce petit monde va devoir quitter la maison... Les deux rôles principaux sont tenus par Anne Grey vue entre autre dans "The Warning" (1929) de Reginald Fogwell, "The Squeaker" (1930) de Edgar Wallace ou "The Happy Ending" (1931) de Millard Webb, puis Leon M. Lion vu notamment dans le dyptique "Chin Chin Chinaman" (1931) et "The Chinese Puzzle" (1932) de Guy Newhall. Citons ensuite Donald Calthrop qui retrouve Hitchcock après "Chantage" (1929) et "Meurtre" (1930), John Stuart qui était dans le premier film de Hitchcock "Le Jardin du Plaisir" (1925) et qui sera un acteur récurrent chez les films fantastiques de la Hammer comme dans "La Revanche de Frankenstein" (1958) et "La Malédiction des Pharaons" (1959) tous deux de Terence Fisher, et enfin Barry Jones qui sera un second rôle dans de nombreuses superproductions comme "Prince Valiant" (1954) de Henry Hathaway, "Les Gladiateurs" (1954) de Delmer Daves ou encore "Guerre et Paix" (1956) de King Vidor... Le début du film est un savoureux mélange entre le début surréalisme poétique et l'impressionnisme allemand si cher à Hitchcock. Un noir et blanc qui accentue le mystère, un certain onirisme même teinté d'un suspense qui mêle angoisse et simple curiosité. Le film est assez jouissif d'un point de vue de pur divertissement car le réalisateur scinde son film en deux parties distinctes qui offrent en quelque sorte deux films en un.
Ainsi la première partie est un huis clos dans une maison avec son suspense, ses mystères, ses inquiétudes et ses ombres avec un côté bavard, tandis que la seconde partie est déjà plus "aérienne", dans un train puis en plein air avec sa dose d'action, d'aventure bien moins bavard, et de catastrophes dont un accident spectaculaire qu'on voit assez rarement chez Hitchcock. Le réalisateur fait comme à son habitude lorsque le récit en lui-même ne l'intéresse guère, il en fait alors surtout un exercice de style ce qui sauve le film car comme l'ont dit Claude Chabrol et Eric Rohmer : "Number Seventeen est un film agréable dans la mesure où l'on voit un grand enfant s'amuser avec ses jouets préférés". D'ailleurs Hitchcock lui-même avouera que la scène qu'il a préféré tourné est celle de la course-poursuite avec le train et le bus, un tournage en maquettes et modèles réduits qui a donc ravi la maître du suspense. Sur d'autres points le film paraît maladroit mais sur des détails plus scénaristiques, comme la femme voleuse qui tombe amoureuse d'une simple regard de l'"homme qu'il ne faut pas", ou encore la séquence du coup de feu dans la maison qui semble laisser tout le monde stoïque, sans réaction tangible. Le réalisateur britannique dira de son film que c'est un "désastre", mais loin de là et même si ça reste effectivement un film mineur les références "a posteriori" (couple suspendu qui renvoie à "La Mort aux Trousses" en 1959, les menottes...) et la mise en scène énergique et inventive de Hitchcock font que ça reste un plaisir cinéphile passionnant.
Note :
11/20