[CRITIQUE] : Haut et Fort

Par Fuckcinephiles

Réalisateur : Nabil Ayouch
Avec : Ismail Adouab, Anas Basbousi, Meriem Nekkach, Zineb Boujemaa,...
Distributeur : Ad Vitam
Budget : -
Genre : Musical, Drame.
Nationalité : Marocain, Français.
Durée : 1h42min
Synopsis :
Anas, ancien rappeur, est engagé dans un centre culturel d’un quartier populaire de Casablanca. Encouragés par leur nouveau professeur, les jeunes vont tenter de se libérer du poids de certaines traditions pour vivre leur passion et s’exprimer à travers la culture hip hop…



Critique :

Ce qu'il perd en consistance dans sa volonté de renoncer à une narration conventionnelle, #HautEtFort le compense pleinement dans l'énergie de sa mise en scène, incarnant une sorte de comédie musicale façon tsunami entraînant et ininterrompu de paroles, de mouvement et de musique pic.twitter.com/wxb6gUOapv

— Fucking Cinephiles (@FuckCinephiles) November 15, 2021

Les mauvaises langues argueront sans trembler que le bien nommé Haut et Fort de Nabil Ayouch, à tout d'un divertissement qui traite son sujet, furieusement familier, à la légère, au point de ne jamais pouvoir prétendre incarner une version made in Casablanca de ses références les plus évidentes - School of Rock et Dead Poets Society -; une comédie plus ou moins dramatique inspirante sur un prof non conventionnel, aidant ses élèves à trouver leur voix.
Ce qui n'est pas entierement faux, dans le sens où sa narration manque sensiblement de poids et ne donne jamais suffisamment de profondeur à ses personnages/protagonistes, mais ce qu'il perd en consistance ou même dans son refus - louable - de renoncer à une narration conventionnelle, il le compense pleinement dans la fougue de sa mise en scène, sorte de fantastique et enthousiasmant tsunami ininterrompu de paroles, de langage, de mouvement et de musique débordant de tous les pores de sa pellicule. 

Copyright Ad Vitam


Réussissant la prouesse pour le moins désinvolte, de faire une comédie musicale hip-hop choral là ou hip-hop est généralement plus un mode d'expression et de créativité individuelle, Haut et Fort est une vraie expérience de cinéma énergique et sensorielle, ou Ayouch remplace les dialogues par des barres de freestyle, réfute les arcs narratifs pour laisser sa caméra (nerveuse) virevolter d'étudiant en étudiant, les suivant au quotidien dans leur manière de décharger leur fougue au travers du chant et de la danse; une vision abstraite de la comédie musicale, rappelant un brin le parti pris de Cats avec son enchaînement de personnages au temps d'expression plus ou moins développés.
D'autant qu'à son pendant musical, le film greffe une célébration vibrante et exaltante l'autonomisation et la puissance libératrice de pouvoir trouver une (sa) voix pour être entendu, sans pour autant cacher les difficultés (jamais exagérées) que peuvent rencontrer ses sujets dans une Casablanca hétéroclite filmé sans filtres - entre lois religieuses strictes (et imposante dans l'éducation), intégrisme, privations économiques ou encore place des femmes inexistantes.

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Dans une volonté de ne pas fuir la réalité, de laisser exploser une agitation intérieure pour qu'elle devienne une tempête créative apprivoisée et grandiose, Haut et Fort ne révolutionne rien mais charme par la puissance et l'aspect essentiel de son message : le pouvoir de l'expression personnelle libérée des carcans de la société moderne, peut bouleverser des vies, voire même le monde.
Jonathan Chevrier