Cette œuvre est magistrale. Planté au cœur d’une enquête contre un trafic de drogue, ce film en dit énormément sur tout l’état d’un pays, l’Iran ; au bord du chaos. Dès la première course poursuite dans le dédale des rues pauvres de Téhéran, on est happé par ce polar sur l’enfer du crack. Et des scènes aussi époustouflantes que la première, ce film en regorge. Placé du point de vue du flic qui brigue un poste de commissaire, on perçoit très vite qu’il a des pieds d’argile. On a beau être flic et pouvoir faire appliquer la loi selon ses propres règles ; on peut vite basculer du côté des inculpés. Dans ce pays, la justice, la police et plus largement toute la société est gangrenée. Ce flic arrête plus vite que l’on ne le pense le parrain local, et là Saeed Roustayi, digne héritier d’un cinéma iranien qui lui se porte bien, fait un pas de côté. A partir de là, nous suivrons deux hommes qui jouent chacun leur vie. Le trafiquant dispose de quelques heures pour trouver dans son réseau celui qui viendra sauver sa tête ; le flic verra sa vie et sa carrière pulvérisée si le premier trouve la faille légale pour lui échapper. Le décor est planté pour un polar social ambitieux à la réalisation virtuose mais sans effet de manche. William Friedkin, réalisateur en son temps du fameux « French connection », dit même qu’il s’agit d’un des plus grands thrillers qu’il n’ait jamais vu. Ce genre de compliment place ce long métrage super haut dans la hiérarchie du cinéma mondial. Rarement film de deux heures m’aura autant tenu en haleine, paradoxe pour un film très souvent en quasi huis clos asphyxiant et extrêmement bavard.
Et pour finir avec ce chef d’œuvre, j’ai pu lire : « …l’enjeu pour ce peuple est de sortir de la pauvreté. A commencer par les policiers, prêts à toutes les corruptions ou tous les mensonges pour monter les marches de la hiérarchie ou simplement augmenter leur pouvoir d’achat, en se payant sur la peau des délinquants. Même les dealers de bas étage font figure de résistants face au chaos économique et social qui gangrène l’Iran… on est révolté par les méthodes expéditives de la police et de la magistrature… les malfrats obéissent finalement aux mêmes règles que les institutions chargées de faire régner l’ordre, c’est-à-dire la loi du plus fort ».
Au terme du film on réalise que la vie est belle dans nos pays démocratiques.
Sorti en 2021
Ma note: 20/20